lundi 28 décembre 2009

Nouvelle Boy's Love - Intermède

Trois ans après...

Aujourd'hui, cela faisait trois ans qu'ils étaient ensemble. Bill était rentré tôt dans leur appartement commun, mais Alec n'était pas encore là. Son travail devait une fois de plus l'accaparer. Bill espéra qu'il ferait l'effort de ne pas arriver trop tard pour qu'ils puissent fêter leurs trois ans. Avec un peu de chance, Alec se souviendrait qu'aujourd'hui était un jour spécial. Seulement, il ne fallait pas trop compter sur lui pour ce genre de choses. L'année précédente, il était tombé sur la surprise qu'avait préparée Bill et avait l'effort d'y répondre en allant acheter... une paire de chaussettes. Bill, lui, ne pouvait s'empêcher d'être remué par ce genre de date. Sa première longue relation amoureuse, c'était quelque chose ! Cependant, il savait bien qu'un homme de son âge n'aurait pas dû s'enthousiasmer ainsi comme une adolescente. Malgré lui, les souvenirs de leur première rencontre affluaient...

Tout avait commencé dans un bar où tout deux solitaires, buvaient chacun un verre côte à côte au comptoir, à demi-tournés vers la salle. Quand un homme très séduisant avait fait son apparition, Bill n'avait pu s'empêcher de murmurer "Wahou!" tandis que celui qui n'était alors encore qu'un inconnu pour lui avait sifflé entre ses dents pour exprimer son admiration. D'un même mouvement, ils s'étaient alors retournés l'un vers l'autre. Bill avait de suite détourné le regard, très embarrassé d'avoir fait preuve d'aussi peu de retenue. Alec, visiblement plus à l'aise, lui avait demandé de but en blanc :
– Alors, tu es aussi gay ?
Bill, gêné, n'avait d'abord pas su quoi répondre. Il était resté là, bêtement, la bouche ouverte. Puis, l'adverbe "aussi" lui était arrivé au cerveau et il avait acquiescé, mal à l'aise. Alec lui avait sourit de façon charmeuse et Bill n'avait pas pu s'empêcher de remarquer qu'il était très attirant dans son genre : il avait de grand yeux verts, des cheveux bruns aux mèches indisciplinées, et un corps mince et musclé. Alec avait commencé à parler. Il travaillait dans le journalisme et était passionné par son métier, ce qui lui laissait peu de temps pour se consacrer aux autres... Bill n'avait pas compris tout de suite qu'Alec le trouvait suffisamment à son goût pour essayer de le mettre dans son lit. Il faut dire que Léo avec sa carrure de rugbyman et ses pattes d'ours n'avait jamais eu trop de succès. Le problème résidait moins dans son physique que dans le fait qu'il n'osait pas dire qu'il était homosexuel et que les fois où il s'était lancé, cela s'était toujours mal terminé. Finalement, Alec avait révélé ses véritables intentions franchement :
– Alors, Bill, cela te dit qu'on aille à chez moi prendre un dernier verre ? Je te ferai une place dans mon lit.
Bill n'avait pas trop hésité. Il se sentait seul et il n'avait pas grand chose à perdre, si ce n'est de se faire rejeter une fois de plus quand Alec comprendrait qu'il était hors de question qu'il joue le rôle de l'homme dans la relation ! A cause de son physique d'ours, ils s'attendaient toujours à ce que Bill veuille prendre la position dominante et étaient inévitablement déçus quand ils comprenaient que celui-ci n'en avait pas la moindre envie... Bill se demandait de temps à autre pourquoi il n'était pas né avec un autre corps, un corps féminin par exemple ! Il aimait les choses mignonnes, la broderie et les comédies romantiques...
Alec avait conduit Bill jusqu'à chez lui et là, il n'avait pas perdu de temps. Il avait proposé qu'ils se mettent à l'aise : enlever chaussures et chaussettes, déboutonner un peu les chemises. Ensuite, il l'avait installé sur le canapé et l'avait embrassé par surprise. Bill avait cru fondre au contact de cette langue douce et aventureuse. Il s'était à peine rendu compte qu'Alec avait défait le haut de son pantalon. Quand bien même s'en serait-il aperçu, il n'aurait pas le moins du monde protesté. Bill n'était pas du tout habitué aux aventures d'un soir avec des inconnus rencontrés dans les bars, mais son célibat lui pesait et il y avait un début à tout. Qui plus est, Alec menait le jeu et cela arrangeait bien Bill. Sa passivité n'avait pas semblé gêner Alec. Ce dernier avait même défait son propre pantalon et caleçon après avoir ôté ses vêtements à Bill. Finalement Bill, mis en confiance par la douceur d'Alec avait commencé à le caresser. Il avait glissé la main du torse d'Alec jusqu'au bas-ventre et de là, était descendu jusqu'au pénis. Il avait aussi rendu les baisers d'Alec. Il s'étaient excités mutuellement à coups de langues, à force de caresses douces ou appuyées. Il s'étaient frottés l'un contre l'autre, pénis contre pénis. Bill avait oublié de s'inquiéter de qui allait pénétrer qui... et avait bien fait, car, ils avaient éjaculés sans que la question ne se pose. Chacun avait maculé le torse de l'autre et leurs râles de plaisirs s'étaient lentement éteints sur leurs lèvres. Après ça, Bill, satisfait, s'était endormi pour se réveiller le lendemain dans le lit d'un quasi-inconnu.
– Salut ! Le beau au bois dormant ! Je pars travailler d'ici une demie-heure, alors, tu serais gentil de te préparer...
– Hein ? Oh ! Oui, bien sûr...
Alec lui avait montré où se trouvait la douche, lui avait filé une serviette et l'avait laissé. Il devait avoir l'habitude de ramener des hommes chez lui. Bill s'était efforcé de se dépêcher, mais sans trop de succès, car, quand il était sorti de la salle de bains vêtu de ses habits de la veille, Alec semblait un peu énervé.
– Désolé, mais faut que je file !
– Pas grave...
En moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, ils s'étaient retrouvés sur le trottoir au bas de l'immeuble. Bill un peu déboussolé, allait partir quand Alec l'avait retenu :
– Pars pas si vite ! Ça te dit qu'on se revoit ?
Bill était resté un instant interloqué. Alec, après la tendresse et le charme de la veille, avait été relativement mal aimable au réveil et voilà qu'il lui proposait, contre toute attente, de poursuivre leur relation. Bon, bien sûr, il n'était que question que de coucher ensemble de nouveau... Bill avait accepté. Ils s'étaient échangés leur numéro de téléphone et Alec était parti. Bill s'était demandé s'il le rappellerait vraiment... et Alec l'avait fait trois jours plus tard, contre toute attente.
A partir de ce jour-là, ils ne s'étaient plus quittés. Même la fameuse question de qui occuperait la position active n'avait pas posé de réel problème... Quand ils s'étaient revus, Alec avait gémi d'une voix haletante :
– Prends-moi...
Bill s'était figé, effrayé. Alec n'avait d'abord rien remarqué, puis croyant que le problème se situait à un autre niveau, il avait précisé qu'il y avait du lubrifiant et des préservatifs dans le tiroir de la table de nuit. Bill n'avait pas bougé et Alec avait fini par comprendre que quelque chose n'allait pas. L'excitation était retombée comme une soufflé raté et une discussion quelque peu embarrassante s'était engagée.
– Tu n'as pas envie de me pénétrer ?
– Non.
– Pourquoi ? T'es contre la sodomie ? C'est religieux, psychologique ?
– Je... Je ne veux pas faire l'homme.
Alec avait éclaté de rire, puis voyant que Bill avait l'air vraiment mal, il était redevenu sérieux.
– C'est surprenant venant d'un grand gaillard, comme toi...
Le cœur de Bill s'était serré. Toujours sa fichue carrure !
– Je sais, je vais y aller.
– Minute ! Je n'ai pas dit que je ne voulais pas te pénétrer, moi... A moins que cela ne te gêne aussi ?
– Non.
– Bonne nouvelle !
– Tu veux me...
– Oui, je te désire, mais je ne pensais pas qu'un grand baraqué comme toi, allait vouloir.
Bill avait senti le sang remonter à ses joues. Il ne rougissait pas facilement, mais tout ça était difficile pour lui. Il avait été trop souvent rejeté pour son désir d'avoir la position passive...
Alec avait considéré que la discussion était close. Le ballet des baisers et des caresses avaient recommencées. Et puis, les doigts d'Alec s'étaient glissés entre les fesses de Bill qui avait frémi d'être ainsi touché. C'était nouveau pour lui et peut-être aurait-il dû le préciser à Alec, car ce dernier, pensant sans doute que Bill était habitué, l'avait pénétré assez rapidement. Bill s'était mordu la lèvre jusqu'au sang pour ne pas crier sa douleur. Alec l'avait embrassé lui murmurant de se détendre, lui léchant l'oreille. Finalement, les coups de rein d'Alec avait fait naître des sensations plus qu'agréables et la souffrance avait décru tandis que son corps s'habituait peu à peu. Bill avait gémi alors de plaisir. Après l'amour, il y avait encore eu une discussion quelque peu gênante...
– Je ne savais pas que cela pouvait faire mal, avait laissé échappé Bill.
Alec avait alors ouvert de grands yeux.
– Ce n'était tout même pas ta première fois !
Bill avait piqué un fard. C'est vrai quoi, à son âge, c'était gênant.
– Pourquoi tu ne me l'as pas dit, bougre d'idiot ? avait reprit Alec.
– Je ne sais pas. Je ne voulais pas compliquer plus les choses.
– J'aurais fait plus attention, j'y aurais été plus doucement si j'avais su...
– Ce n'est pas comme si j'étais complètement novice non plus. Je me suis déjà touché à cet endroit.
Quand il y repensait, cela avait vraiment été une journée pleine de révélations embarrassantes...
Après cela, les mots engagements et amour n'avaient pas été prononcés, mais la relation avait continué. Alec ne téléphonait pas à Bill que pour le sexe, même s'ils finissaient immanquablement par y venir. Ils avaient de longues conversations sur leur travail respectif, leurs goûts, la vie... Cependant, ce n'est qu'un mois plus tard qu'Alec avait révélé qu'il aimait Bill. Il avait reconnu ne pas avoir cherché plus qu'une simple aventure le premier soir, mais que Bill avait su l'intéresser suffisamment pour qu'il ait envie de le connaître mieux.
Au bout de quelques mois, ils avaient emménagés ensemble et découvert les grandes joies et les petites misères de la vie de couple.

Et voilà, trois ans s'étaient à présent écoulés depuis leur première rencontre... Bill fut tiré de ses souvenirs par le bruit de la porte qui claquait. Alec était rentré relativement tôt : se souvenait-il? Comme à son habitude, Alec commença par l'embrasser, puis demanda :
– Alors, ça a été ta journée ?
– Bien, bien. Et toi ?
– Cre-van-te...
– Tu veux un massage ?
– Je n'osais pas t'en demander un, mais puisque tu me le proposes si gentiment...
Bill sourit tout en disant avec un brin de tristesse qu'Alec, une fois de plus, avait oublié...
– Mets toi à l'aise et va t'allonger dans la chambre, je vais m'occuper de toi.
– Super ! Mais avant ça, prends ça...
En disant ces mots, Alec ouvrit son sac et tendit à Bill ce qui ressemblait furieusement à cadeau. Avec émotion, Bill attrapa le paquet, puis serra dans ses bras Alec.
– Tu as pensé à notre anniversaire de rencontre !
– Ne me broie pas les os, répliqua Alec en grimaçant légèrement.
D'un air coupable, Bill relâcha précipitamment son compagnon. Il mesurait parfois mal sa force...
– Je suis désolé...
Alec agita les épaules.
– Ce n'est rien, ne fais pas cette tête... Ouvre plutôt le paquet ! Pour tout t'avouer, j'ai bien failli, une fois de plus, oublier notre anniversaire de rencontre, mais, quand j'ai vu ça en vitrine à la pause de midi, ça m'est revenu... Et je sais que ce genre de date compte pour toi, alors... Bref, ouvre-le !
Bill déchira le papier et découvrit un adorable ours en peluche à la fourrure couleur miel.
– Il est super mimi !
Avec un sourire, Bill imagina Alec perdu au milieu des peluches et des poupées... Cela avait dû lui coûter d'entrer dans la boutique pour acheter ça.
– Je suis content qu'il te plaise. Il m'a fait penser à toi...
– Comment ça ?
– Tu es mon gros nounours adoré, après tout...
Bill se sentit fondre... Il n'y avait qu'Alec pour dire ce genre de choses tranquillement et sans avoir l'air ridicule.
– J'espère que je le resterai longtemps, murmura-t-il.
Pour tout réponse, Alec lui prit l'ours en peluche des mains, le posa à terre, puis il captura les lèvres de Bill avec passion. Lentement, sans cesser de l'embrasser, il le conduisit à la chambre et ce n'était certainement pas pour un massage...

FIN


lundi 21 décembre 2009

Pause de Noël


Après ce long chapitre consacré à Demian et Léo, il faudra patienter encore un peu avant de retrouver Aldrick et Youri.
Le début du chapitre VIII du Suivant du prince intitulé "Des pages, un centaure, et un prince jaloux" sera en effet mis en ligne le lundi 4 janvier 2010.

Cependant, avant cela, pour finir l'année en beauté, je posterai le lundi 28 décembre, une nouvelle intitulée "Trois ans après" dans laquelle Bill se souvient de sa rencontre avec Alec...

Avec un peu d'avance, je vous souhaite donc un très joyeux Noël!
J'espère que vous avez réussi à trouver des cadeaux pour vos proches et que vous aurez de jolis paquets au pied du sapin !


vendredi 18 décembre 2009

Le Suivant du prince - 36

Tout en se disant qu'il faudrait qu'il mette en garde Demian contre les hommes, Léo prit des vêtements dans sa commode et s'habilla. L'adolescent, sage comme une image, attendit qu'il fut prêt. Bien que Demian affirme qu'il pouvait faire quelques pas, Léo le porta ensuite jusqu'à la cuisine qui fleurait bon le pain frais.
– Sire, vous êtes de retour ! s'exclama le chef cuisinier avec un plaisir évident.
Léo Lyonn semblait très apprécié de ces gens et Demian comprenait parfaitement pourquoi. Malgré sa taille impressionnante, Léo était un homme gentil et généreux. D'ailleurs, c'était simple, depuis qu'il avait débarqué dans sa mansarde, la vie de Demian s'était transformée en conte de fée ! Le petit déjeuner renforça ce sentiment chez l'adolescent : sur la table tout un tas de mets plus délicieux les uns que que les autres furent mis en place par un marmiton. Avec timidité, Demian mordit dans une tranche rectangulaire couleur caramel. C'était sucré et doux.
– Qu'est-ce que c'est ? demanda-t-il à Léo quand il eut fini la tranche.
Ce dernier eut l'air si étonné que l'adolescent se mordit la lèvre, gêné d'avoir posé la question.
– Tu n'avais jamais mangé de pain d'épices ?
– Non. C'est délicieux.
Léo se tourna vers le chef cuisinier et déclara :
– Kharl, tu veilleras à ce qu'il y en ait sur la table du petit déjeuner tant que notre invité sera là.
– Bien, Sire.
Léo reporta ensuite de nouveau son attention vers Demian qui avait repris un morceau de pain d'épice et la mangeait avec un air de chat gourmand. Les mots que Léo allaient prononcer restèrent coincés dans sa gorge. Ce gosse allait le rendre fou tellement il était craquant !
– Dès que tu auras fini, nous irons faire un tour au village afin de te chausser, t'habiller et te faire rencontrer mon vieux tuteur, le prêtre Paflore afin qu'il évalue ton niveau scolaire.
– Merci de tout ce que vous faîtes pour moi.
– Remercie plutôt ton frère d'avoir parlé de toi au prince Aldrick !
– Même si vous vous occupez de moi parce qu'on vous l'a ordonné, je vous suis reconnaissant.
Léo Lyonn lui ébouriffa les cheveux en murmurant « brave petit » et Demian se sentit un peu triste d'être considéré comme un gamin. Il avait déjà seize ans tout de même ! Cependant, il ne protesta pas. Il y avait quelque chose d'affectueux dans ces appellations de « gosse » et de « petit »...
– Tu es prêt ?
– Oui, répondit l'adolescent en se levant précipitamment.
– Alors, je t'emmène !
De nouveau, Demian se retrouva dans les bras de Léo. Désormais habitué, il en profita pour examiner ce dernier : il avait des cheveux châtains clairs, des yeux dorés, un nez aquilin et des lèvres minces. Leurs visages étaient tout proches et le cœur de Demian se mit à battre un peu plus fort. C'est d'une oreille distraite qu'il écouta Léo lui expliquer comment allait se dérouler son séjour dans le manoir des Lyonn.

(Fin du chapitre 7)

jeudi 17 décembre 2009

Le Suivant du prince - 35

– Qu'est-ce que tu fais là ? Tu n'aurais pas dû marcher, surtout pas pieds nus... Ah, tu as envie d'aller aux toilettes peut-être ? Il y a un pot prévu à cet effet dans la chambre...
Demian secoua la tête.
– Non, ce n'est pas ça. C'est juste que...
Il n'acheva pas. Léo tombait de sommeil et l'impatience le gagnait. Il n'avait pas sommeillé durant la chevauchée, lui !
– Je peux dormir dans le même lit que vous ? termina le gamin.
– Tu as quel âge déjà ?
En posant la question, Léo se rendit compte qu'il ne cherchait pas à savoir si Demian était trop grand pour avoir peur de dormir seul, mais à savoir s'il était suffisamment âgé pour qu'il couche avec. Il se sentit honteux.
– Seize ans. Nous avons toujours dormi dans le même lit, mon frère et moi, et je trouve cela dur de trouver le sommeil quand je suis tout seul.
C'était encore un gamin, trancha Léo. Sans un mot il l'embarqua dans sa chambre. Là, il le coucha dans le lit, puis il ôta sa serviette et s'allongea avec satisfaction. Son bonheur fut de courte durée, car l'adolescent se pelotonna immédiatement contre lui, comme un chat.
– Vous dormiez ainsi Youri et toi ?
– Oui, pour se tenir chaud. Bonne nuit.
– Bonne nuit...
Léo soupira intérieurement. Demian avait seize ans, il n'y aurait rien eu au fond de répréhensible à le séduire. Mais comment pouvait-il envisager de prendre un gamin pour partenaire ? Jusque là, il avait préféré la compagnie de la gente féminine. Il avait de nombreuses aventures d'un soir avec des jeunes femmes charmantes qu'il avait tôt fait d'oublier le lendemain matin. Avec un léger sourire, Léo songea que la chaleur du petit corps collé à lui était quelque peu dérangeante, mais pas désagréable. Épuisé, il glissa doucement dans le sommeil.
Au matin, quand il se réveilla, il eut une sacrée surprise : la main de l'adolescent reposait à un demi-centimètre de son sexe en érection. Demian dormait à poings fermés, inconscient de l'embarras dans lequel il plongeait Léo. Ce dernier repoussa doucement la main, mais réveilla tout de même l'adolescent.
– Bonjour, fit-il en ouvrant les yeux.
Léo souleva la couverture afin de se lever avant de se rappeler de son érection matinale qui n'avait, bien sûr, aucun rapport avec l'individu qui partageait son lit. L'adolescent ne manqua pas de la remarquer, et sentant la gêne de son compagnon, il déclara :
– C'est naturel le matin.
Demian poussa à son tour la couverture et Léo put voir la bosse que formait le pénis dressé de l'adolescent sous la tunique. Il eut l'impression que son cœur allait s'arrêter de battre.
– Allons, petit déjeuner, dit-il d'une voix qui sonna étrange à ses propres oreilles.

mercredi 16 décembre 2009

Le Suivant du prince - 34

– Tu ne veux pas te laver le reste tout seul ?
– Oh non, c'est si agréable de se faire savonner.
Demian souriait en effet depuis à tout à l'heure. Léo blêmit. L'adolescent ne craignait pas qu'un homme touche ses parties intimes, mais criait quand une femme le faisait, cela devait signifier que...
– Pourquoi as-tu réagi ainsi quand Fanny t'a effleuré tout à l'heure ?
Le sourire de Demian disparut.
– C'est dégoutant... commença l'adolescent.
Il frissonna et se rappela avec horreur la première fois que Mme Boulgs était venue le retrouver dans sa chambre, cinq jours après la disparition de Youri. Elle avait grommelé « Avec ton pied, tu n'es qu'une bouche inutile à nourrir ! Même ton frère t'a abandonné, bon à rien ! Je vais te trouver de quoi t'occuper moi. » Il avait essayé de se débattre, mais les doigts de la femme de l'aubergiste s'étaient refermés sur son sexe. Elle s'était servie de lui comme d'un jouet. Après cela, elle était revenue régulièrement, l'obligeant à la supplier de lui donner à manger. Il se revit entre ses cuisses, glissant sa langue dans la chair infâme de cette femme. La sueur, les cris... La main de Léo qui caressait ses cheveux interrompit le fil de ses souvenirs.
– C'est la femme de l'aubergiste qui...? Ah, désolé, je ne te le redemanderai plus. Il faut juste que tu saches que toutes les femmes ne sont pas comme ça.
La mort dans l'âme, Léo passa le savon sur les fesses de Demian, glissa sa main entre celles-ci pour le laver. Il toucha à peine le pénis de l'adolescent. Puis vite, vite, il passa au rinçage en lui déversant de l'eau tiède sur la tête. Il le sortit ensuite du bain et l'enveloppa au plus vite dans une serviette. Demian, les cheveux mouillés, le visage frais était encore plus adorable qu'auparavant. Léo secoua la tête pour chasser toutes pensées incongrues. Il le sécha avec vigueur, puis lui donna l'une de ses tuniques en guise de tenue de nuit. Le gamin flottait littéralement dedans, mais au moins, il n'était plus tout nu ! Léo le souleva comme s'il était une princesse et se dirigea vers les escaliers. Il le conduisit jusqu'à une chambre vide. D'une main, il ouvrit les draps, puis il déposa le gamin et le borda.
– Merci de vous être occupé si bien de moi.
– De rien. Dors bien.
Il était si mignon que Léo ne résista pas à la tentation de l'embrasser sur le front. Il sortit ensuite de la pièce et partit faire un brin de toilette.
N'ayant guère l'énergie de se laver complètement, il se contenta de verser un seau d'eau froide sur le corps, puis il se frictionna et remonta à l'étage, vêtu une serviette ceinte à la taille. Demian attendait en haut de l'escalier, assis sur la première marche.

mardi 15 décembre 2009

Le Suivant du prince - 33

Il faisait effectivement nuit quand ils arrivèrent et Demian somnolait, la tête contre le torse de son compagnon de route. Léo le secoua doucement.
– Nous sommes chez moi.
Le gamin se frotta les yeux.
– Hmm...
– Ça va ?
Demian bailla et avec gêne, réalisa qu'il s'était appuyé lourdement sur Léo. Il s'écarta avec vivacité. Le chevalier Lyonn descendit de cheval, attrapa le gamin par la taille et l'emporta à l'intérieur. La vieille servante de la maison, Fanny déboula aussitôt dans l'entrée.
– Léo, mon petit, que fabriques-tu ici ?
Puis s'avisant de ce qu'il tenait dans les bras, elle ajouta :
– Tu nous apportes un enfant caché ?
Léo rit.
– Fanny, voyons ! Non, non. Est-ce que tu veux bien t'occuper...
– Bien sûr, l'interrompit Fanny avec chaleur en prenant le gamin des bras de Léo.
– Je vais bouchonner Orage.
Il appréciait que la servante prenne les choses en main. Demian le regarda sortir non sans inquiétude. Celle que Léo Lyonn appelait Fanny était une femme rondelette qui ressemblait beaucoup à la patronne de l'auberge des Deux Cygnes.
– Allez, petite, au bain.
Petite ? L'adolescent se demanda s'il avait bien entendu.
Elle le porta jusqu'à la cuisine, l'installa sur une chaise et s'affaira à préparer un bain.
– Déshabille-toi, ça va être bon.
– Vous restez là ? demanda Demian d'une voix blanche.
– Oui. Je vais te donner un coup de main pour te laver.
– Je n'ai pas très envie de me baigner.
– Tatata.
Fanny s'approcha et avant que Demian n'eut le temps de dire ouf, la tunique rouge se retrouva sur le sol. Elle baissa ensuite le pantalon - Demian était nu dessous - et surprise de ce qu'elle voyait, elle toucha l'entre-jambe.
– Un garçon ! s'exclama -t-elle, interloquée.
Demian poussa un cri étrange et Léo revint en courant.
– Que se passe-t-il ?
Il s'arrêta interdit en voyant le gamin recroquevillé à terre et le visage effaré de Fanny. La brave femme lui jeta un regard désemparé.
– Je croyais que c'était une fille... j'ai juste effleuré son sexe... je n'aurais pas dû, mais j'ai été si surprise que ce soit un garçon.
Léo se mit à réfléchir à tout à allure. Demian n'avait pas poussé un cri d'embarras, mais bien de peur comme si on allait l'égorger ou quelque chose de ce genre. C'était étranger.
– Fanny, je vais me charger de lui faire prendre son bain.
– Sire Lyonn, ce n'est pas votre rôle... et vous devez être fatigué.
– Tout est bien. Va te coucher, d'accord ?
– Bien, sire.
La brave Fanny se retira, visiblement un peu vexée d'être congédiée.
– Et maintenant, à nous deux...
L'adolescent se mordit la lèvre avec inquiétude. Léo s'approcha, l'attrapa sous les aisselles et le déposa dans le baquet d'eau chaude. L'eau propre ne cachait rien des lignes pures du corps de Demian, et Léo, vaguement troublé, détourna les yeux.
– Tiens, voici un savon.
Le gamin regarda le gros carré vert avec intérêt et le tint au-dessus de l'eau comme si il avait peur de le faire tomber dedans.
– Eh bien sers-t-en !
Demian quitta le savon des yeux pour regarder Léo, puis reporta son attention sur l'objet que ce dernier lui avait donné. Léo, agacé lui reprit le savon des mains et se mit à frotter le bras du gamin.
– Personne ne m'avait jamais lavé... Et le morceau de savon est si gros...
Léo comprit mieux son attitude. Il lava les jambes, les bras, les cheveux, puis le torse de l'adolescent. Là, il se surprit une fois de plus à penser à des choses peu décentes. Au bas du ventre, la main de Léo s'arrêta.

lundi 14 décembre 2009

Le Suivant du prince - 32

– Quelle belle bête ! s'exclama Demian.
Léo tourna légèrement la tête vers le gamin.
– Tu t'y connais en chevaux ?
– Un peu. Je m'occupe souvent des chevaux des clients de l'auberge.
L'aubergiste n'avait donc pas l'habitude de prendre soin des chevaux. Ceci expliquait cela.
– Il s'appelle Orage. A propos, mon nom est Léo Lyonn.
En disant ces mots, le chevalier déposa son fardeau sur le dos de l'étalon, puis, il enfourcha l'animal. Ils partirent au galop, laissant derrière eux la porte de l'écurie grande ouverte. Au diable l'aubergiste ! Bientôt ils furent hors de la ville.
– Où va-t-on au juste ? finit par demander Demian.
– Chez moi.
– Youri est là-bas ?
– Non, désolé. En fait, je dois t'apprendre deux ou trois trucs avant que nous allions au château pour que tu y suives une formation de page. Avec un peu de chance, tu y croiseras ton frère.
– Page ? Youri est devenu le Suivant du prince Aldrick ?
– Oui. Il a même sauvé la mise au prince. Il a été blessé, mais il va bien à présent, ne t'en fais pas. Il a parlé de toi à Aldrick, et la meilleure solution pour que tu ne sois pas trop loin de lui, c'est que tu deviennes mon page.
– Oh. Je ne pensais pas que les hommes sans origine et sans fortune comme moi pouvaient devenir pages.
– Il y a toujours des exceptions. Comme pour ton frère. Au fait, où en es-tu avec ton pied ?
– Il est presque guéri.
– Qu'est-ce que tu t'étais fait au juste ?
– Un clou est entré dedans. Si j'avais des chaussures, je pense que je pourrais déjà remarcher. En attendant, je peux clopiner.
Léo prit conscience pour la première fois que le gamin n'avait pas de chaussures. Il baissa les yeux sur les petits pieds blancs qui pendaient de chaque côté des flancs d'Orage. D'un geste brusque, il tira sur les rennes et descendit de sa monture pour regarder la blessure du gosse.
– C'est le pied droit, ça ne s'est pas infecté. Youri y a veillé.
Léo attrapa la cheville et fut ému par sa finesse. Il se mit à genoux et regarda sous le pied. Quand il passa le doigt sur la cicatrice, Demian poussa un petit cri.
– Encore sensible, dirait-on, murmura Léo en lâchant la cheville.
Le gamin hocha la tête. Il était vraiment agréable à regarder avec sa peau blanche, ses yeux bleus pâles, ses cheveux blonds comme le blé mûr et ses lèvres roses comme des pétales. Il était très mignon. Léo aurait pu se demander si c'était une fille s'il ne l'avait pas vu nu. Nu. Il secoua la tête pour chasser l'image de son esprit et remonta en selle. La chevauchée reprit en silence. C'est seulement après un long moment que Léo finit par dire :
– Si tu veux dormir, tu peux. Nous n'arriveront pas avant la nuit tombée.
– D'accord.

vendredi 11 décembre 2009

Le Suivant du prince - 31

Mme Boulgs baissa la main, l'air mauvais.
– Je paye aussi pour la tenue qu'il emporte.
– Je veux 25 pièces d'argent en tout.
– Ne me faîtes pas croire que ça coûte si cher que ça un loyer d'un mois dans une mansarde, et un vêtement déjà usé qui tombe en loques.
– 25 pièces d'argent. Sinon, vous pouvez toujours rêver d'emmener le gamin. C'est une juste compensation pour les torts que son absence va me causer.
C'est sûr qu'une main d'œuvre quasi gratuite qui disparaissait, ça allait lui manquer.
– Je ne suis pas aussi riche que vous allez l'air de le croire.
Elle s'imaginait quoi au juste ? Qu'il avait l'intention de vendre les charmes du gamin au premier pervers venu ?
– 10 pièces d'argent, la dizaine d'avant n'est évidemment pas comprise.
Il proposait à la femme un peu moins de la moitié de la somme exigée. Mme Boulgs regarda le visage fermé de Léo et comprit que si elle se montrait trop exigeante, il partirait sans rien payer en embarquant le gosse.
– D'accord, grommela-t-elle.
Léo lui passa la bourse.
– Je vous laisse vérifier, dit-il en se tournant vers Demian.
Pendant le temps de la transaction ce dernier s'était complètement habillé. Il portait une tunique rouge élimée et un pantalon marron trop grand qui tenait grâce à un bout de corde. Il faisait pitié à voir.
– Prêt ?
Le gamin hocha la tête. Sans lâcher le balluchon, Léo attrapa Demian par la taille.
– Mets ton bras sur mon épaule et accroche-toi.
Demian mis une minute avant de réagir tellement il était surpris. Finalement, il glissa timidement son bras sur l'épaule de l'étranger et referma ses doigts sur la chemise. Ayant constaté que le gosse était bien calé, Léo quitta la pièce sous le regard un peu effaré de la femme de l'aubergiste. Quand ils revinrent dans la grande salle, un moment de silence se fit à la vue de l'étrange tableau que formait ce géant et le gamin qu'il portait. Demian rougit comme une tomate, embarrassé. A chaque fois que l'homme s'était baissé pour ne pas se prendre une poutre, Demian avait eu peur de se casser la figure, mais tous ces yeux posés sur eux était beaucoup plus effrayant Heureusement Léo ne perdit pas de temps et il sortit rapidement de l'auberge. Il traversa la cour et entra dans l'écurie. Orage était dans une stalle, mais il n'avait pas été dessellé et encore moins brossé. Si c'est ainsi que l'aubergiste s'occupait des montures de ses clients, pas étonnant que son auberge soit au trois quart vide ! En même temps cela arrangeait Léo qu'Orage ait encore sa selle, il pourrait ainsi quitter ce triste lieu au plus vite.

jeudi 10 décembre 2009

Le Suivant du prince - 30

– Vous dîtes cela, mais vous allez repartir sans rien me laisser, grogna la femme.
Léo sortit sa bourse et posa sur le comptoir une dizaine de pièces de cuivre.
– Pour le voir. La suite après.
– Bon. Suivez-moi !
Elle se mit à monter à l'étage. L'escalier était sombre, sale et étroit. Léo qui gardait la tête baissée pour ne pas se cogner aperçut un gros rat noir qui disparaissait dans un trou du mur à leur approche. Enfin, ils arrivèrent sous les toits.
– C'est ici, dit la femme et sans même frapper, elle entra.
Quelle femme sans gêne, songea Léo.
– Demian! Tu as de la visite ! s'écria-t-elle d'une voix désagréable.
Léo la suivit dans la pièce et vit Demian. Il était assis sur le bord du lit, ses pieds ne touchant pas le sol. Il était nu. Des vêtements étaient posés sur le lit. Sans doute allait-il se changer avant leur irruption dans la chambre. Si Léo l'avait vu habillé, il lui aurait donné douze ans à peine, mais ses parties génitales révélaient un développement bien plus avancé. Demian les recouvrit dès qu'il fut remis de sa surprise. Leurs regards se croisèrent et Léo eut un choc en voyant la couleur des yeux du frère de Youri : ils étaient d'un bleu extrêmement pâle, pur comme le cristal.
– Qui est-ce ? demanda timidement Demian à la femme sans quitter Léo des yeux.
– J'sais pas. Il vient te chercher, dit la femme. Je veux mon argent, ajouta-t-elle à l'intention de Léo.
Vu la façon dont elle présentait les choses, on aurait dit qu'il achetait le pauvre enfant.
– Je viens de la part de ton frère.
– Youri !? s'écria Demian avec bonheur.
Il était donc encore en vie ? Demian savait que Youri ne l'aurait jamais abandonné, aussi en ne le voyant pas revenir, il avait craint qu'il lui soit arrivé quelque chose.
– Les efforts de ton frère ont été récompensés.
Léo n'en dit pas plus. Il n'était pas nécessaire que la femme de l'aubergiste en sache trop.
– Vous m'emmenez où ?
– Rejoindre ton frère.
Pouvait-il faire confiance à l'étranger ? Demian sentait qu'il n'avait pas trop le choix. De toute façon, rester avec la femme de l'aubergiste serait cent fois pire. Il lui lança un coup d'œil effrayé. Visiblement cette dernière s'impatientait.
– Payez-moi, il faut que je retourne en salle.
Léo l'ignora superbement.
– Habille-toi, Demian. As-tu des affaires à emporter ?
– Tout ce qui est ici est à moi, glapit la femme.
– Juste le balluchon qui est dans le coffre. C'est tout ce que l'on possède véritablement, mon frère et moi.
– Les vêtements viennent aussi de moi !
– A l'exception de la tunique rouge, répliqua Demian qui se voyait mal suivre l'étranger nu comme un vers.
Mme Boulgs le gifla alors que l'homme était penché sur le coffre pour y récupérer le balluchon. Ce dernier se retourna vivement. Demian se tenait la joue ; la femme avait de nouveau la main levée.
– Ça suffit ! s'exclama Léo.

mercredi 9 décembre 2009

Le Suivant du prince - 29


Le chevalier Lyonn soupira tout en sortant du château. Aldrick ne se rendait pas compte de la difficulté de de la tâche... Non, il savait parfaitement ce que cela impliquait, mais comme d'habitude, il l'avait entortillé autour de son petit doigt, le pressant d'accepter sans lui laisser le temps de réfléchir. Frères de lait... Ah ! Si sa mère avait refusé... Mais c'était un tel honneur que la reine choisisse une dame de la basse noblesse comme mère nourricière. Après avoir vérifié qu'il était assez éloigné du château, Léo se glissa derrière un rideau d'arbres et troqua ses beaux vêtements contre une tenue modeste. Il changea le harnais de son cheval Orage, et s'arrangea pour le rendre moins présentable. L'étalon noir renacla tandis que son maître maculait sa belle robe de boue. Une honte ! Léo voulut lui flatter l'encolure, mais Orage détourna la tête avec dédain.
– Tu n'aimes pas ça, hein ? Mais tu sais, tu es encore trop beau pour l'endroit où nous allons et comme je ne veux pas utiliser un autre cheval que toi...
Le chevalier retint un nouveau soupir et se remit en selle. S'il ne lui fallut guère de temps pour arriver en ville, il eut du mal à dénicher la petite auberge dont l'enseigne de bois avait tellement vécu qu'on en distinguait à peine l'emblème, deux cygnes blancs. Le tavernier un petit homme au nez pointu vint l'accueillir dans la cour pleine d'immondices. On voyait qu'une partie de sa main d'œuvre gratuite n'y travaillait plus.
– Bienvenue dans notre humble auberge, dit-il avec respect, car il avait repéré que la monture de son voyageur était de prix.
– Occupez-vous de mon cheval, répondit simplement Léo en descendant.
Le tavernier prit les rênes et disparut dans l'écurie avec Orage. Léo entra dans l'auberge. Quelques clients bavardaient autour d'un pot de bière. Il n'y avait pas foule, ce qui ne le surprit guère. Il alla directement au comptoir où se trouvait la femme de l'aubergiste, une femme tout ronde au visage rougeaud : une vraie caricature.
– Je voudrais voir Demian, déclara-t-il sans préambule.
La femme le regarda d'un air surpris. Personne ne devait jamais demander à parler à l'un ou l'autre des orphelins.
– Qu'est-ce que vous lui voulez ?
– L'emmener rejoindre son frère.
– Ce sale rat ! Il m'a laissé son frère sur les bras, souffla la femme avec colère.
– S'il y a quelque chose à payer, je le ferai.
La femme resta interdite un instant, puis ses yeux se mirent à briller d'anticipation.
– Il me doit un mois de loyer.
Payait-il un quelconque loyer ? Léo n'en savait rien et s'en moquait bien, Aldrick le rembourserait.
– Je veux voir Demian. Je paierai après.

mardi 8 décembre 2009

Le Suivant du prince - 28


Chapitre VII : Le frère de Youri


Il fallut près de deux semaines à Youri pour avoir l'audace de parler de son frère au prince. Youri n'était guère à l'aise avec Aldrick VII et, les journées étaient longues et bien remplies. Cependant, petit à petit, le jeune homme avait compris que Aldrick n'était guère différent de Al. Le prince se montrait littéralement charmant avec lui et n'était pas prétentieux pour un sou à la différence de Chriss de Bergac et autres nobliaux qui ne se privaient pas de lui faire sentir à la moindre occasion ses basses origines. Pour des raisons diplomatiques, il n'était pas si évident que ça de faire résider le frère de Youri au château, aussi Aldrick prit le temps de réfléchir à la question avant d'envoyer quelqu'un chercher Demian. Il choisit pour cette mission Léo Lyonn qu'il présenta officiellement à son Suivant.
– Voilà mon frère de lait, un homme en qui j'ai toute confiance.
Youri adressa un sourire poli à Léo. Son frère allait être dans ses petits souliers : cet homme était un géant !
– Enchanté de vous rencontrer.
– Ton frère va devenir son page, expliqua Aldrick. Il faudra bien sûr qu'il entre par la filière officielle pour être formé, sinon, des gens risqueraient de protester.
– Je ne pense pas que tu puisses éviter que les gens râlent, intervint Léo.
– Je sais, mais c'est bien pour ça qu'il va devenir ton page et non pas un quelconque page du château. Comme ça, tu pourras faire peur aux contestataires de services.
– Dis tout de suite que ma réputation est exécrable...
– Je dis simplement que ta taille dissuade les gens sensés de te chercher querelle.
– Ils savent surtout que je suis ton frère de lait et que je t'ai ton oreille, oui...
Bien qu'il n'ait pas le même sang, on sentait que les deux hommes se considéraient comme des frères. Avec une certaine mélancolie, Youri songea à ses échanges avec Demian. Il avait hâte de le revoir. Depuis qu'il était au château, il ne s'était pas passé un jour sans qu'il pense à lui, s'inquiétant pour lui et pour sa santé.
– Aldrick vous a-t-il prévenu que mon frère était blessé la dernière fois que je l'ai vu ? intervint Youri.
– A la jambe, c'est ça ? demanda Léo.
– Non, au pied.
– Je l'emmènerai d'abord se refaire une santé chez moi.
– Bonne idée, approuva le prince. Tu en profiteras pour l'éduquer un peu. Sinon, il ne parviendra pas à suivre la formation de page.
Youri grimaça, déçu à l'idée que cela retarderait d'autant ses retrouvailles avec son frère. Cependant, Demian avait encore moins de connaissances que lui, aussi, il valait mieux qu'il apprenne un minimum de choses avant de se mêler aux autres qui avait une bien meilleure instruction que lui. Il ne fallait pas qu'il souffre trop de son manque d'éducation...

lundi 7 décembre 2009

Le Suivant du prince - 27

Il y avait en effet deux lits à baldaquin dans la pièce : l'un était collé au mur de droite, l'autre était placé contre le mur de gauche. La chambre étant immense, les deux lits étaient séparés par un très large espace, mais cela manquait tout de même d'intimité. Malgré lui, Youri se demanda ce qui se passerait si le prince invitait quelqu'un à partager sa couche. Si les rideaux du lit à baldaquin masqueraient les ébats, ils n'en étoufferaient que très partiellement les bruits. Peut-être que le prince lui donnerait congé ces nuits-là... Ce qui n'était pas forcément raisonnable quand on songeait que l'un des rôles du Suivant était d'assuré la protection rapproché du prince.
– Tu n'es vraiment pas bavard ! s'exclama Aldrick.
– Désolé. Si cela ne vous dérange pas, je vais me coucher.
– Tu peux me tutoyer aussi. Et, si tu en as envie, tu peux dormir dans mon lit, dit le prince, une lueur curieuse dans les yeux.
Fallait-il y voir une invite ? Youri décida que non. Il était impensable qu'un prince ait envie de coucher avec un garçon d'auberge. Aldrick l'avait embrassé pour passer le temps, pour s'amuser, rien de plus, Youri en était convaincu.
– Bonne nuit, dit-il.
Il tira les rideaux, se déshabilla entièrement et se coucha. Une fois allongé, il réalisa qu'il n'avait pas parlé de Demian au prince. Il faudrait qu'il le fasse... Prince ou pas prince, il fallait qu'il trouve le courage de demander à ce que son frère soit arraché aux Boulgs.

Aldrick, seul dans son lit, soupira. Il aurait dû ordonner à son Suivant de lui tenir compagnie. Lui laisser le choix avait été une erreur. En même temps, comment deviner qu'il allait préférer dormir à coucher avec lui ! Son refus était vexant. D'ailleurs, c'était simple, personne ne lui avait jamais dit non auparavant ! Peut-être était-ce parce que le jeune homme était puceau. A moins qu'il ne soit asexuel... Non, ce n'était pas possible : quand il l'avait embrassé, le garçon d'auberge n'avait pas semblé indifférent... Néanmoins, il ne tenait peut-être pas à coucher avec un homme. Après le baiser, il n'avait pas hésité à dire qu'il lui faudrait maintenant tester avec une femme pour avoir matière à comparaison. Aldrick poussa un nouveau soupir. Il s'y était mal pris, voilà tout. Il tenterait une autre approche demain... Maintenant que le jeune homme était propre bien coiffé et bien habillé, il était vraiment très attirant... S'il n'y prenait pas garde, une femme ou un homme allait lui dérober son innocence. En même temps, il y avait peu de risques vu que le jeune homme allait être obligé de le suivre vingt quatre heures sur vingt quatre. Rasséréné, Aldrick se dit que ce serait donc lui et pas un autre qui initierait Youri aux choses de l'amour et du sexe !

(Fin du chapitre 6)

vendredi 4 décembre 2009

Le Suivant du prince - 26

Ainsi, quand vint l'heure pour Aldrick VII de se retirer dans sa chambre, Youri lui emboîta le pas. Il appréhendait un peu de se retrouver en tête à tête avec le prince, car si parler à Al était simple, Aldrick, était une autre histoire...
– Enfin seuls ! s'exclama le prince une fois que son Grand Chambellan fut parti.
Youri ne répondit rien.
– Je suis désolé de ne pas avoir eu plus de temps à te consacrer cette dernière semaine, mais entre cette rumeur près des frontières d'Equilia, la découverte qu'une faction d'elfes m'en veut à mort à Iridia, et les problèmes causés par ta nomination au poste de Suivant, je n'ai pas eu une minute à moi... continua le prince.
Les mots semblaient coincés dans la gorge de Youri. Il n'avait jamais été particulièrement timide, mais il se sentait petit face au prince... Ce qui était stupide vu qu'il le dépassait de six bons centimètres !
– Tu as perdu ta langue ?
– Non, votre Altesse.
– Ah ! Non, pas de ça entre nous ! Appelle-moi Aldrick... ou même Al quand nous sommes tous les deux.
– Bien, votre Al...drick.
Le prince éclata de rire devant le piètre rattrapage de Youri. Quand son hilarité se fut calmée, il expliqua au jeune homme pourquoi il avait participé au concours sous une fausse identité.
– Pourquoi m'avoir sélectionné comme Suivant alors que je n'ai pas gagné ? osa demander Youri quand le prince eut fini.
– Parce que tu m'as sauvé la vie ou du moins évité une blessure grave... D'ailleurs, j'ai besoin que tu continues à rester vigilant, car les Iridiens qui veulent ma peau sont toujours libres et toujours prêts à envoûter et payer des Astriens pour me tordre le cou. Les agents du ministre des Relations Extérieures n'ont pu récolter suffisamment de preuves pour faire agir la justice iridienne...
Tout ça dépassait complètement Youri, mais il ne le dit pas. Si quelqu'un attaquait, il répliquerait, voilà tout.
– Et cette rumeur près d'Equilia, de quoi s'agit-il ? Les centaures se préparent à nous envahir ?
Ce n'était peut-être pas si difficile que ça de discuter avec le prince...
– Rien de si grave ! La rumeur veut qu'un homme chevauchant un centaure ait été vu. Ce n'est pas la première fois que ce genre de légende courre la campagne, seulement, là, ce ne sont pas seulement quelques personnes portées sur la bouteille ou quelques amateurs de contes qui en parlent... Quand on sait ce que les centaures nous considèrent comme une espèce inférieure, cette rumeur est intrigante et j'ai, par conséquent, envoyé des hommes à la recherche de cet homme qui aurait réussi à monter sur le dos d'un centaure !
Bien qu'il trouve l'histoire fascinante, Youri étouffa un bâillement. Il était remis de sa blessure, mais affronter les regards hostiles des nobles l'avait épuisé.
– Fatigué ? Moi aussi. Ton lit est là, juste en face du mien, déclara Aldrick.

jeudi 3 décembre 2009

Le Suivant du prince - 25

Au final, Youri ne revit le prince que le jour de la cérémonie où il devint officiellement son Suivant. Il s'était écoulé pas plus d'une semaine depuis qu'il avait repris conscience au château, mais le jeune homme avait l'impression que cela faisait beaucoup plus longtemps que cela. Durant la cérémonie, il fut obligé de constater que l'opinion de Chriss de Bergac était partagée par la majorité des nobles du château. Les commentaires désobligeants étaient dit à mi-voix, mais Youri les entendait parfaitement. Malgré cela, il remonta la tête haute l'allée conduisant au trône du prince Aldrick et s'inclina comme ce petit pédant de noble lui avait appris. Il prononça ensuite le discours qu'il devait faire selon l'usage.
– Je jure de suivre Aldrick septième du nom où qu'il aille envers et contre tout. Son bien être sera désormais ma seule préoccupation.
Ensuite, il attendit, les yeux fixés sur les chausses du prince que ce dernier fasse ce qu'il devait faire. Cependant, Aldrick ne se leva pas et ne l'enjoignit pas à se relever comme Chriss de Bergac lui avait dit qu'il le ferait. Avec angoisse, Youri se demanda s'il avait oublié quelque chose. Il envisagea également que le noble comte de Bergac ne lui ait pas enseigné tout ce qu'il aurait dû afin de le ridiculiser. Toutefois, au lieu d'augmenter, les murmures dépréciateurs des nobles diminuèrent. Si quelqu'un était en tort, ce n'était à priori pas lui ! Il jeta un coup discret au prince. Ce dernier jouait pensivement avec la manche en dentelle de sa chemise sans s'occuper le moins du monde de la personne à ses pieds. Au lieu de s'en agacer, Youri se sentit amusé. Si l'attitude de Aldrick le mettait dans une position plutôt inconfortable, elle avait le mérite de laisser les nobles mariner dans leur jus. Finalement, Rudolf Hautcœur qui se tenait debout à côté du prince se racla légèrement la gorge, alors Aldrick VII se redressa et accomplit son rôle.
– Relève-toi. Avec cette bague, j'accepte ton serment et fais de toi mon Suivant, déclara-t-il d'une voix forte.
Comme le voulait l'usage, il prit ensuite la main de Youri et lui passa au doigt une bague en or surmontée d'un griffon bleu. En faisant cela, Aldrick murmura à l'intention du jeune homme :
– C'est un peu comme un mariage.
Le sang monta au visage de Youri. Il récupéra sa main plus vite que nécessaire et s'inclina maladroitement. Dans l'assemblée, des gens se moquèrent.
– Que mon prince soit remercié.
Serrant les poings, Youri gravit les marches et se plaça à gauche du trône du prince. La brève cérémonie touchait bientôt à sa fin. Le jeune homme écouta d'une oreille distraite le discours qu'adressait Aldrick à sa cour : il avait hâte que tout ça soit terminé. En même temps, une petite voix lui disait que cela ne faisait que commencer... En tant que Suivant du prince, il devrait désormais participer à tous les évènements auxquels Aldrick assistait : audiences, conseils... Selon Le Manuel du Suivant, il devait demeurer toujours aux côtés du prince, à moins que celui-ci ne l'en dispense. Ce soir, il quitterait d'ailleurs les quartiers qu'on lui avait attribué quand il était blessé, pour gagner les appartements du prince.

mercredi 2 décembre 2009

Le Suivant du prince - 24

Les jours suivants, l'incroyable situation persistant, Youri réalisa qu'il était parfaitement sain d'esprit. Une chose d'extraordinaire lui était arrivé, voilà tout. Quand il avait décidé de participer au concours de Suivant du prince, il avait espéré gagner, mais n'avait pas du tout imaginé ce que sa vie serait après cela. Il n'avait pas pensé à tous les changements que cela impliquerait. Son nouveau statut lui conférait des avantages et des devoirs qui le perturbaient profondément. Premier souci : le bain. Se laver tous les jours dans un grand baquet d'eau chaude était fort agréable, mais le fait d'être assisté par trois servantes gloussantes l'était beaucoup moins. D'ailleurs, Youri les avait mis dehors au plus vite. C'était trop embarrassant d'exposer ainsi sa nudité à des étrangères. Pour s'habiller, il avait le droit à un page, mais là aussi, il s'en était débarrassé. Malheureusement, il avait dû le récupérer dans le couloir quand il s'était rendu compte qu'il ne savait ni comment enfiler la chemise de soie ni comment se dépêtrer avec les lacets de sa veste en velours. L'habillement des riches était pour le moins compliqué... Pour les repas, il avait fallu subir les commentaires sévères de Chriss de Bergac, un jeune noble qu'on lui avait assigné comme professeur. La fourchette devait être tenue d'une certaine façon, le couteau d'une autre. L'usage de tout un tas de couverts dont il ne soupçonnait même pas l'existence lui avait été enseigné. Les plats étaient délicieux, mais manger était devenu une activité pénible. Chriss de Bergac n'arrêtait pas de le reprendre sur tout. Et pas seulement durant les repas. Chaque mot que prononçait Youri semblait être trop vulgaire pour la cour du prince Aldrick. Chaque geste était trop brusque... Chriss de Bergac considérait visiblement comme une honte qu'un modeste garçon d'auberge ait été promu Suivant du prince et il lui faisait sentir. Hélas, c'était à peu près l'unique personne que voyait le jeune homme. Il aurait préféré rester seul à lire Le Manuel du Suivant, un épais bouquin de 500 pages que lui avait donné Al quand il était revenu le voir. Youri n'avait pas pu lui parler, car le prince avait été immédiatement entraîné au loin par son Grand Chambellan. A la place de Chriss de Bergac, le prêtre Mell eut été un professeur autrement plus sympathique. Il ne le traitait pas de haut. Il avait juste sourit en apprenant que le jeune homme avait refusé de se laisser savonner par les servantes. Il lui changeait son bandeau avec délicatesse, et il lui avait volontiers donné les renseignements demandés sur les blessures aux pieds. Youri n'oubliait en effet pas son frère. Cependant, il ne savait pas à qui s'adresser pour aider Demian. Il n'allait certainement pas demander quoique ce soit à Chriss de Bergac... Et malgré la gentillesse de Mell, il n'avait pas osé aborder le sujet avec lui. Peut-être aurait-il le courage de parler de son frère au prince Aldrick... mais encore fallait-il qu'il arrive à le voir !

mardi 1 décembre 2009

Le Suivant du prince - 23

– Merci d'avoir veillé sur lui, Mell.
– Je suis au service de son Altesse.
– Comment te sens-tu, Youri ? demanda le prince.
Youri déglutit, tout semblait si vrai...
– Un peu perdu. J'ai du mal à croire que tu es... que vous êtes...
Aldrick lui adressa un sourire resplendissant. Ses yeux outremer se mariaient divinement bien avec ses cheveux bleus.
– Oui, je comprends ton choc. Refaisons les présentations. Je suis Aldrick, septième du nom. Et toi, tu es désormais mon Suivant. Du moins, tu le seras dès que tu pourras quitter ce lit et participer à la petite cérémonie qu'il faut faire selon l'usage.
Youri resta bouche bée. L'homme aux longs cheveux noirs intervint :
– Il faudrait d'ailleurs la faire au plus vite afin d'entériner votre choix.
– Je sais bien, cher Rudolf, mais je doute que Mell accepte de laisser Youri sortir du lit avant au moins deux jours.
– Cela ne serait en effet pas raisonnable, approuva le prêtre.
Le dit Rudolf soupira, puis, l'air légèrement embarrassé, il demanda à Mell :
– Pourrais-je vous demander d'aller ausculter mon époux ? Il a une mauvaise toux depuis hier soir...
Une ombre passa sur le visage du prêtre.
– Je suis désolé d'apprendre que mon fils se porte mal. Si sa Majesté accepte que je quitte momentanément le chevet de son Suivant, j'irais bien sûr volontiers le soigner.
– Youri étant hors de danger, cela ne me pose aucun problème. Je suis désolé d'apprendre que ton époux est malade, Rudolf. Remarque j'aurai pu m'en douter, tu es aujourd'hui, encore plus à cheval sur les principes que jamais...
Youri se pinça discrètement l'intérieur de la paume de la main. Non, il ne rêvait pas. Il ferma les yeux, les rouvrit : le décor n'avait pas changé et les trois hommes étaient toujours là, en train de discuter. Il était possiblement devenu fou. Peut-être que les trois hommes présents étaient en réalité Demian, M.Boulg et un prêtre de l'asile... S'il avait perdu la tête, qu'est-ce que son frère allait devenir ? Le jeune homme inspira à fond. Le prêtre se détourna de ses interlocuteurs et lui jeta un coup d'œil inquiet.
– Je crois qu'il faudrait mieux laisser le blessé se reposer au calme, déclara-t-il.
– Je vais retourner auprès du représentant des Commerçants, mais je reviendrai dans l'après-midi.
– Je doute que vous en ayez le temps, votre Altesse. Outre vos tâches habituelles, des rumeurs persistantes près de la frontière d'Equilia nécessitent votre attention. Sans compter que nous avons enfin des informations sur les commanditaires des attentats à votre vie.
– Bien, bien...
Aldrick et Rudolf s'éloignèrent et sortirent de la chambre. Le prêtre Mell vérifia le bandage, puis s'éclipsa à son tour, laissant Youri seul avec son incrédulité.

lundi 30 novembre 2009

Le Suivant du prince - 22

Chapitre VI : La difficile position de Suivant du Prince

Quand Youri reprit conscience, son environnement le surprit. Le lit sur lequel il était allongé était recouvert d'une tenture dorée, le matelas était moelleux et les draps étaient d'une douceur incroyable. Assis auprès du lit, un homme vêtu de la robe vert amande des prêtres soignants sommeillait. Il devait avoir entre quarante-cinq et cinquante ans. Youri, la bouche sèche et le cœur battant, se redressa dans le lit. Où était-il ? La dernière chose dont il se rappelait, c'était le son des trompettes qui mettaient fin à ses espoirs de gagner le concours. Le prêtre se réveilla au moment où le jeune homme tentait de se lever.
– Il vaut mieux que vous restiez couché, vous avez perdu beaucoup de sang et êtes resté inconscient une journée entière, dit-il d'une voix douce.
Youri se souvint de la lame et de l'homme qui avait attaqué Al dans les tranchées. D'un coup d'œil, il constata que sa blessure avait été bandée avec soin.
– Où suis-je ? murmura-t-il.
– Vous êtes au château du prince Aldrick.
La surprise rendue Youri muet. Le prêtre ne développa pas plus le sujet, et lui tendit un verre d'eau que le jeune homme prit avec gratitude. Jamais il n'avait bu d'eau aussi bonne : elle était parfumée et très légèrement sucrée. Quand il eut terminé de boire, le prêtre reprit le verre et déclara :
– Je vais aller prévenir qui de droit que vous êtes réveillé.
Dès que l'homme fut sorti de la pièce, Youri essaya de sortir du lit. Il se sentait extrêmement faible et il eut du mal à se mettre debout. La richesse des meubles et des objets qui l'entouraient augmentait sa sensation de vertige. Prudemment, il se recoucha et ferma les yeux. Il avait beau retourner la situation dans sa tête, il ne voyait pas comment il était arrivé là. Peut-être rêvait-il ? Sans s'en rendre compte, il glissa dans le sommeil.

Quand il rouvrit les yeux, le prêtre avait regagné son chevet. Derrière la porte, on entendait des éclats de voix :
– Vous ne pouvez pas traiter le représentant des Commerçants avec autant de légèreté, surtout après ce que vous avez fait hier...
– Enfin Rudolf, ce n'est pas comme si je l'avais abandonné sans explications... il peut bien patienter une demi-heure !
Deux hommes débarquèrent dans la pièce. L'un avait de longs cheveux noirs qui lui descendaient jusqu'au creux des reins, l'autre avait les cheveux bleus coupés court. Quand ce dernier arriva tout près du lit, Youri le reconnut avec étonnement. C'était Al. Un Al aux cheveux bleus et à la tenue princière, mais c'était bel et bien Al.
– Alors, comment va le blessé ? demanda-t-il.
– Très faible, encore, votre Majesté, répondit le prêtre.
Youri comprit alors que « Al » était le diminutif de « Aldrick » et que l'ouvrier était en fait le noble prince Aldrick. Le jeune homme passa un doigt sur ses lèvres, se rappelant le baiser qu'il avait reçu de Al, et décida qu'il devait délirer : il n'était pas au château de Aldrick VII, il n'était pas en présence du prince...

vendredi 27 novembre 2009

Le Suivant du prince - 21

– Capitaine, laissez-moi me charger du cas.
C'était Léo, son frère de lait. Sa venue était une véritable bénédiction, songa Aldrick. Normalement, sa taille gigantesque et sa réputation, pousseraient le capitaine de s'écraser...
– Chevalier Lyonn, il me semble que ce n'est pas de votre ressort.
Voilà un capitaine qui serait rétrogradé. Tant de bêtises, tant d'incompétence, ce n'était pas possible ! A se demander comment il avait obtenu son poste !
– Vous avez raison...
Le capitaine se rengorgea, fier de lui, mais Léo poursuivit :
– Seulement, aux dernières nouvelles, en tant que membre de la noblesse, j'ai tout à fait le droit de vous donner des ordres.
L'homme perdit de sa superbe.
Léo, considérant que le problème était réglé, ignora le capitaine pour demander ce qui s'était passé. Aldrick s'empressa d'expliquer la situation.
– Capitaine, je vous suggère d'emprisonner l'homme qui se trouve à vos pieds. Je me charge des soins de l'autre, déclara Léo.
Au moment où le capitaine s'éloignait avec ses hommes et l'agresseur de Aldrick, le garçon d'auberge s'évanouit. Léo Lyonn le rattrapa de justesse, puis il appela un page pour qu'il fasse venir un prêtre et un carrosse.

– Et je t'assure, j'ai failli commettre un meurtre tellement ce capitaine était obtus, déclara Aldrick à son frère de lait tandis qu'un prêtre désinfectait et pansait avec efficacité la plaie du jeune homme.
– Ce n'eût pas été une grosse perte, mais heureusement que je suis arrivé, cher Al.
Le prêtre jusque là penché sur le corps du blessé, se releva et s'inséra dans leur conversation :
– Messieurs, j'ai donné les premiers soins, mais la blessure est plus profonde qu'il n'y paraît et ce jeune homme a perdu beaucoup de sang. Il lui faudra du temps et du repos pour se remettre.
– Merci pour votre peine, répondit Léo en tendant quelques pièces d'argent à l'homme qui les accepta avec une courbette avant de se retirer.
Après cela Aldrick et Léo portèrent avec précaution le corps inanimé de Youri à l'intérieur du carrosse et ils prirent la direction du château.
– Au fait, comment se fait-il que tu aies apparu si opportunément ? demanda le prince quand ils furent installés à l'intérieur.
– Ce cher Rudolf m'a simplement demandé de venir te chercher. Je te rappelle que tu dois accueillir ton nouveau Suivant qui se dirige en ce moment vers le château.
– Oh... Oh.
– Ne me dis pas que tu avais oublié...?
– Ne deviens pas un second Rudolf, j'en ai déjà assez d'un !
– Ce n'est pas pour te faire la morale...
– Bien. Tu vois ce jeune homme sur la banquette en face de nous ?
– Le Sans-Guilde ?
– C'est un garçon d'auberge, et il fait parti de la Guilde des Ouvriers, mais passons... Il m'a évité une blessure mortelle sans savoir qui j'étais, ce sera lui mon Suivant.
– Je crois que ce cher Rudolf va avoir une crise cardiaque, déclara Léo avec un large sourire.

(Fin du chapitre 5)

jeudi 26 novembre 2009

Le Suivant du prince - 20

Contrairement à ses attentes, les gardes n'arrivèrent pas assez vite pour séparer les combattants. Ils cueillirent à la sortie de la tranchée Youri qui avait réussi à mettre hors d'état nuire l'agresseur d'Aldrick, puis l'un des plus jeunes gardes alla, sur ordre de son supérieur, tirer le corps de l'autre homme impliqué dans l'histoire. Pendant ce temps, le garçon d'auberge, malgré le sang qui coulait le long de son bas, essayait de négocier avec les gardes pour qu'ils le laissent terminer le parcours. Le fait que Youri veuille à toutes forces continuer, permit à Aldrick de réaliser que le jeune homme ne savait pas qu'il était le prince. Les gardes refusèrent bien sûr, car ils étaient de leur devoir de tirer cette agression au clair. Comme c'était l'autre homme qui avait perdu connaissance et que sa tenue était celle d'un artiste, ils avaient l'impression que le coupable du combat était Youri. Il faut dire que ce dernier avait vraiment piètre allure et que le sang qui maculait sa pauvre tunique déchirée, lui donnait un air impressionnant. Aldrick essaya d'expliquer que c'était lui qui avait été attaqué à l'origine, mais il ne réussit pas à se faire entendre. Voyant que les gardes n'avaient même pas la présence d'esprit d'appeler une prêtre pour soigner Youri, Aldrick allait dévoiler sa royale identité quand des trompettes annoncèrent que l'ultime épreuve s'était terminée. Il ne restait que seize candidats à départager. Le garçon d'auberge, déjà pâle à cause du sang qu'il perdait, devint encore plus blanc : ses espoirs s'envolaient. Dans la foule, le brouhaha était à son comble Les gardes se laissèrent distraire. Eux aussi, ils avaient envie de savoir quel allait être l'heureux élu. Il y eut un roulement de tambour, puis le nom du candidat gagnant ainsi que sa guilde fut cité. C'était un commerçant. Dans son for intérieur, Aldrick se réjouit : si cela avait été un Noble, le faire renoncer au prestigieux poste de Suivant du Prince eut été quasiment impossible, mais avec un commerçant, négocier ne serait pas trop difficile. Youri méritait d'être son Suivant et il le serait. Si le jeune homme avait su qu'il était le prince, Aldrick n'aurait pas envisagé de rendre inutile le concours qu'il avait organisé, mais là, cela s'imposait. Si le garçon d'auberge était capable de s'interposer entre un poignard et un homme qu'il ne connaissait que depuis quelques jours, faisant ainsi preuve d'altruisme et de bravoure, il était certain qu'il saurait protéger son prince avec autant de fougue.
Une fois l'issue du concours connue, les gardes revinrent à la charge. Aldrick perdit alors patience :
– Vous êtes bigleux ou quoi, il perd tout son sang ! Je doute qu'un cadavre vous aide à connaître les tenants et les aboutissants de l'affaire !
Le capitaine de la garde n'apprécia évidemment pas la remarque.
– Je ne vous permets pas de me dire comment faire mon travail, monsieur. Je ne comprends d'ailleurs toujours pas bien votre rôle dans l'histoire.
Aldrick allait se jeter sur le capitaine pour l'étrangler quand une voix familière l'empêcha de faire cette bêtise.

mercredi 25 novembre 2009

Le Suivant du prince - 19

Pour que les candidats ne soient pas tous les uns sur les autres, il fallait, pour commencer, courir jusqu'au poteau de départ du parcours. Le premier arrivé devait grimper, utiliser la corde enroulée au faîte et franchir un bassin rempli de poissons carnivores. Le prince fut volontairement l'un des trois derniers. Youri faisait, hélas, parti du lot. Aldrick constata que le garçon d'auberge avait de larges cernes.
– Allez, courage ! lui glissa-t-il à mi-voix.
– Merci, répondit le jeune homme en se mettant à grimper avec agilité au poteau.
Celui qui avait conçu le parcours s'était arrangé pour permettre aux candidats de se doubler dans certains passages, mais les occasions étaient peu nombreuses. Avec inquiétude, Aldrick se demanda si Youri parviendrait à temps à la fin du parcours. Lui, il fallait absolument qu'il n'y arrive pas, sous peine de subir les foudres de son Grand Chambellan ! Toutefois, traîner la patte n'était pas si évident que ça, car derrière lui, il y avait un autre candidat qui ne méritait sans doute pas d'y rester et, devant lui, le garçon d'auberge se retournait de temps à autre pour vérifier sa progression. Le jeune homme semblait avoir oublié que Aldrick lui avait dit ne pas tenir spécialement à gagner.
Ils étaient en train de ramper dans une tranchée boueuse recouverte d'épais fils de barbelés, quand Aldrick sentit l'homme qui était derrière lui se rapprocher. Sans doute lassé par son allure d'escargot, il avait dû décider de le doubler. Aldrick continuait à avancer en se collant contre la paroi droite de la tranchée afin de donner la possibilité au dernier candidat de le dépasser, quand un cri d'avertissement lui fit comprendre que l'homme avait d'autres intentions en tête.
– Al ! Attention !
Aldrick aperçut l'éclat d'une lame de poignard. Il roula sur le côté, évitant le coup. Youri qui l'avait prévenu, avait fait volte-face et était revenu vers eux avec une rapidité étonnante. Il tira Al vers lui, le protégeant de son corps. La lame du poignard entra dans sa chair. Il laissa échapper une brève plainte, mais enfonça son poing dans le visage de l'agresseur. Le garçon d'auberge mettait une énergie si farouche à le défendre que Aldrick se demanda si Youri connaissait sa véritable identité et espérait gagner quelque chose dans l'affaire. Si un candidat était au courant, pourquoi pas lui ? Le prince se morigéna. Ce n'était pas le moment de penser à ça et de s'en agacer. Il aurait aimé aider Youri, mais l'étroitesse de la tranchée et les fils de barbelés au-dessus rendaient délicat tout intervention directe. Le mieux était de ramper hors de la tranchée tout en appelant la garde. C'est ce que le prince fit, bien qu'il se sente lâche de s'éloigner ainsi de la zone de combat.

mardi 24 novembre 2009

Cicatrices - Le livre est disponible !

Et voilà, le livre de Cicatrices est disponible à la vente :

Acheter Cicatrices
Comme d'habitude, le livre se veut une version améliorée de ce que vous avez pu lire sur le blog : la chasse aux fautes a été réalisée avec soin et avec l'aide de Shakounette que je remercie chaleureusement, la ponctuation a été revisitée, des tournures de phrases ont été arrangées...

Le livre coûte 12,69€, contient 235 pages dont 10 pages de textes inédits :
- une scène « coupée » illustrant une des manies de Liam qui consiste à ne jamais laisser traîner la vaisselle (2 pages)
- la 1ère rencontre au bar vue par Liam (4 pages)
- la rencontre au bar du chapitre 7 vue par Liam (2 pages)
- Si le héros de Cicatrices avait été Jack... (2 pages)

Bonne lecture !

Le Suivant du prince - 18

Le garçon d'auberge avait gagné sa participation aux épreuves de demain. Il n'avait bien sûr presque aucune chance de l'emporter vu son score global, mais s'il parvenait à faire partie des 11 finalistes, alors une place de choix l'attendrait au château. Comme il est toujours bon de s'entourer d'hommes valeureux, le prince avait en effet prévu de récompenser ceux qui participeraient à la dernière épreuve en leur proposant un poste au château. Aldrick avait préféré garder la chose secrète pour éviter que le nombre de candidats de départ soit encore plus élevé qu'il ne l'avait été et puis aussi, parce qu'il aimait les surprises !
Le prince se leva de son fauteuil, s'étira, se frotta les yeux, puis sonna pour qu'un page vienne récupérer les copies. Un autre page se chargerait d'établir la liste de ceux qui s'étaient qualifiés pour les épreuves du troisième jour. Une fois qu'il eut confié le paquet de copies, le prince se plongea avec bonheur dans son moelleux lit à baldaquin. Le réveil demain serait difficile... mais il tenait à assister aux ultimes épreuves.

La foule était en effervescence le lendemain. Aujourd'hui, on saurait qui serait nommé Suivant du Prince. De nombreux participants repartirent la mine basse après qu'un page leur ait signifié qu'ils ne s'étaient pas qualifiés. Quelques uns protestèrent, prêts à faire un esclandre, mais la présence menaçante des gardes du château les calmèrent assez vite. Finalement, un coup de trompette retentit et l'épreuve de saut en hauteur commença. Tout ceux qui ne sautait pas un mètre en trois essais étaient éliminés. Bien qu'il ait l'air soucieux et fatigué, le garçon d'auberge s'en tira avec les honneurs. Aldrick qui avait eu du mal à sortir du lit, était arrivé tard et n'avait pu lui parler, aussi n'avait-il pas lui demander la raison de sa triste mine. Le prince ne put pas plus discuter lors de la seconde épreuve en deux parties qui se déroulait immédiatement après. Il s'agissait en effet d'une course d'endurance suivie d'une course de rapidité. Ceux qui ne couraient pas sans discontinuer durant une demie-heure ne pourraient montrer leurs talents à cette seconde course. Si le garçon d'auberge sut faire preuve d'endurance, ce fut en revanche limite pour la course de rapidité. Youri arracha de justesse la vingt-cinquième et dernière place qui permettait de participer à l'ultime épreuve. Des pages distribuèrent aux 25 candidats restants un pichet d'eau et un morceau de sucre, mais, durant cette pause, il n'y eut pas de bavardages, car chacun reprenait son souffle. Trop vite un roulement de tambours annonça le début de la troisième et dernière épreuve du concours : un parcours d'obstacles. Le but était d'arriver au bout le plus rapidement possible. Ceux qui mettaient plus de quinze minutes seraient éliminés. Il n'y aurait alors plus qu'à comparer l'ensemble des prestations qu'avaient effectuées les candidats restants pour déterminer le gagnant. Aldrick décida qu'il était temps que sa participation s'arrête. Il prendrait tout son temps pour franchir les multiples obstacles et le tour serait joué !

lundi 23 novembre 2009

Le Suivant du prince - 17

Chapitre V : Agilité et danger

Aldrick étouffa un bâillement. Il avait insisté pour noter lui-même les questions qui portaient directement ou indirectement sur le sujet du Suivant du Prince. Si les réponses à ses questions ne lui convenaient pas, il éliminait les participants du concours, et ce, même si le reste de la copie était bon. Oui, sur le moment, cela avait semblé une excellente idée au prince, mais, plusieurs heures s'étaient écoulées, et il doutait à présent du bien fondé de sa décision. Il avait gardé pour la fin la copie de Youri. C'était sa récompense personnelle, mais ladite récompense tardait à arriver. Quand il repensait au garçon d'auberge, le goût de ses lèvres lui revenaient à la mémoire, accompagné d'une montée de désir. Aldrick était sûr que Youri, avec un bon bain et des vêtements corrects, serait tout à fait séduisant. Cependant, même avec une épaisse couche de crasse, il était attirant... L'ignorance totale de ce dernier pour les choses sexuelles, le rendait terriblement attractif. C'était rare à vingt ans. Le prince eut la tentation de faire appeler un noble dont il appréciait les charmes afin de calmer le désir qu'il éprouvait, mais il se retint. Il fallait qu'il aille au bout de ses fichus copies. Certaines réponses étaient insipides, d'autres franchement ridicules... Derrière, une ou deux copies, on devinait l'homme qui sait ce qu'il faut répondre, mais qui ne serait pas à capable de mettre en applications ses propos. Bien que le prince n'ait pas envie de tomber sur un autre Quentin du Pic, il n'élimina pas ses candidats. Il comptait sur les épreuves de demain pour ça.
Il devait être aux alentours de trois heures et demie du matin quand il put enfin lire la prose du garçon d'auberge. Il eut d'abord le déplaisir de constater que la note attribuée à ses autres réponses était fort basse. Or, cette note aurait de l'importance si Youri restait en lice... Al se rencogna dans son fauteuil princier et s'attaqua à la partie qu'il devait corriger :
Quelles sont les qualités d'un bon serviteur ?
Un bon serviteur doit connaître sa place, être loyal, fidèle et accomplir son travail sans se plaindre.
C'était un peu court, mais juste, Aldrick poursuivit sa lecture :
Quel est le rôle du prince ?
Le prince doit veiller sur ses sujets, les protéger des menaces extérieures comme intérieures, en veillant à ce qu'ils vivent en harmonie. Il doit faire respecter la justice.
C'était maladroit, cependant, ce n'était pas faux. Aldrick lut rapidement les réponses aux trois questions suivantes avant d'en arriver à la partie qui l'intéressait vraiment :
Que feriez-vous si vous vous retrouviez seuls avec le prince en face d'une bande de brigands qui demande lequel d'entre vous est le prince ?
Ne sachant pas si on tuerait le prince pour ce qu'il est ou moi pour n'être qu'un pauvre serviteur, je pense que je ferai signe à sa Majesté afin que nous déclarions tous deux que nous sommes princes. Au pire, nous rencontrerions ensemble la mort, mais du moins, nous ne serions pas séparés. Rester avec le prince permettrait de peut-être trouver un moyen de l'aider à s'échapper.
Le style de Youri laissait à désirer, mais Aldrick trouva que le fond était excellent. Ce n'est pas lui qui se serait enfui comme l'avait fait Quentin du Pic...

vendredi 20 novembre 2009

Le Suivant du Prince - 16

Demian était encore plus pâle que d'habitude. Alors que la veille, il avait pressé Youri de questions sur le concours, sautant de joie en apprenant que son frère s'était qualifié pour les épreuves suivantes, il resta immobile, le saluant du bout des lèvres.
– Il paraît que tu t'es fait mal ? Qu'est-il arrivé au juste ? demanda Youri en essayant de masquer son inquiétude.
D'une voix éteinte, Demian murmura :
– J'étais chargé d'un paquet de bûches pour les fourneaux de la cuisine, mais je n'allais pas assez vite au goût de M.Boulgs qui m'a houspillé pour que j'accélère. Résultat, je n'ai pas regardé où je mettais les pieds et j'ai marché sur un clou.
Maudit soient les Boulgs qui n'avaient pas acheté de chaussures à Demian sous prétexte que celui-ci passait trop de temps, malade, au fond de son lit ! Ils n'avaient évidemment pas non plus appelé un prêtre spécialisé dans les soins... Youri se précipita sur son frère, souleva la couverture du lit et regarda le pied de ce dernier. Un chiffon sale, maculé de sang entourait le pied de son frère. Youri redescendit quatre à quatre les escaliers et alla faire bouillir de l'eau dans la cuisine heureusement désertée à cette heure avancée de la nuit. S'il avait croisé, les Boulgs, le jeune homme savait qu'il n'aurait pu s'empêcher de dire ce qu'il pensait de leur négligence ! Il remonta une bassine d'eau chaude et se mit à nettoyer la blessure de son frère. La plaie était affreuse et s'était infectée. Un sentiment d'impuissance terrible envahit Youri. Finalement, il opta pour une solution barbare. Si un clou avait fait ça à Demian, un autre clou, celui-là chauffé à blanc pourrait peut-être réparer partiellement les dégâts. Le jeune homme redescendit une fois de plus, cette fois pour récupérer une pince et un gros clou dans l'écurie, puis il revint au chevet de son frère. Ce dernier était épuisé et fiévreux, mais quand Youri lui expliqua ce qu'il allait faire, Demian sourit bravement. Youri alluma un petit feu dans leur cheminée, attrapa le clou avec la pince et le fit chauffer. Ensuite, avec plus de calme qu'il n'en ressentait, il appliqua le clou sur la plaie de son frère qui poussa un seul cri avant de perdre connaissance. Le cœur de Youri se serra, mais il termina l'opération. Après cela, il déchira un bout du drap de lit afin de bander proprement la plaie. Enfin, avec délicatesse, le jeune homme passa un peu d'eau sur le front du blessé et lui humecta les lèvres. Demian reprit alors ses esprits et lui sourit faiblement. Youri se demanda si cela valait vraiment la peine qu'il retourne sur la grand place le lendemain : ses chances de l'emporter étaient si minces, ne fallait-il pas mieux rester auprès de son frère ? Comme s'il avait deviné le cours de ses pensées, Demian déclara :
– Ne laisse pas cet incident t'empêcher d'y retourner demain. Promets-moi que tu iras.
Youri se coucha dans le lit aux cotés de son frère, lui serra gentiment la main et promit. Ce n'était qu'une journée de plus. Demian la passerait en sécurité dans son lit. Les Boulgs n'auraient pas la cruauté de l'en faire sortir alors qu'il ne pouvait pas marcher. Youri ferma les yeux et, épuisé, il s'endormit profondément.

(Fin du chapitre 4)

jeudi 19 novembre 2009

Le Suivant du Prince - 15

Chaque candidat devait déclamer un poème différent, mais d'une longueur similaire afin que nul ne soit avantagé. Il y avait beaucoup plus de spectateurs que ce matin, car cette fois, il y avait quelque chose à voir ! La foule pouvait tourner en ridicule les participants qui avaient le malheur de buter sur un mot ou de prendre un ton inapproprié au sujet du poème. Elle huait et applaudissait tour à tour. Al, en revanche, se contentait de pointer ce qui était bien et ce qui n'allait pas chez les déclamateurs. Youri ne mit pas longtemps à comprendre, qu'une fois de plus, il cherchait à l'aider. Cela rassura le jeune homme qui avait craint que Al soit fâché par ce qu'il avait dit après le baiser. Finalement, ce fut au tour de Youri de passer à la casserole. Son nom fut appelé, on lui tendit un poème et il dut aller devant les trois juges, deux femmes et un homme d'un certain âge. Depuis le début, il avait décidé qu'il prendrait le temps de déchiffrer le poème dans son intégralité avant de commencer à lire. Il fut rappelé à l'ordre, puis on lui demanda s'il avait perdu sa langue, Youri se lut alors d'une voix douce le poème d'amour sur lequel il était tombé :

Rencontre

Ils étaient tout deux, tristes et solitaires
Quand leurs routes se croisèrent.
Ils se trouvèrent au bord du chemin,
Tombèrent amoureux et se prirent la main.

Les yeux dans les yeux, ils se regardèrent,
Et puis s'embrassèrent sans songer à demain.
Dans l'herbe douce, ils se couchèrent,
Et s'aimèrent jusqu'au matin.

Mais être ensemble n'était pas leur destin,
Un dernier baiser, ils se levèrent,
Un ultime regard, ils se quittèrent,
Leur brève idylle avait déjà pris fin.

Sa lecture terminée, Youri laissa la place à Al. Sachant le travail qu'il l'attendait à l'auberge, le jeune homme ne put rester pour écouter son ami. Il le reverrait demain. Youri courut sur le chemin du retour, se doutant que les Boulgs ne seraient pas enchantés de le voir rentrer aussi tard. Hier, il avait manqué seulement l'après-midi, mais là, il avait été absent presque toute la journée. La femme de l'aubergiste l'accueillit avec une gifle retentissante tandis que son époux se plaignait de Demian :
– Ton paresseux de frère n'a même pas été fichu de faire ton boulot quelques heures ! Il a trouvé le moyen de se blesser au pied comme un idiot ! Et je n'ai rien pu en tirer de bon !
Youri se retint de monter à toute vitesse voir la blessure de son frère et d'évaluer sa gravité. Sa longue pratique des Boulgs lui avait appris que c'était le genre de chose qu'ils ne toléraient pas. Leurs intérêts et leurs petites personnages passaient avant ceux des deux orphelins.
– Je vais me mettre à l'ouvrage dès maintenant.
Cette affirmation calma immédiatement M.Boulgs. Sa femme, elle, fut, comme toujours plus difficile à satisfaire :
– Tu ne comptes pas retourner à cette folie de concours demain, j'espère ?
– J'irai, mais si j'ai échoué les épreuves d'aujourd'hui, je ne ferai que l'aller-retour.
La femme de l'aubergiste se contenta de ricaner tandis que son mari donnait tout un tas d'ordres à Youri. Ce dernier accomplit avec rapidité et efficacité toutes les tâches demandées, mais ce n'est que tard dans la nuit qu'il put regagner la chambre qu'il partageait sous les combles avec son frère.

mercredi 18 novembre 2009

Le Suivant du Prince - 14

– Tu veux dire que tu n'as pas de préférence ?
– Ni les hommes ni les femmes ne m'attirent spécialement.
– Vraiment ?
Le ton de Al était si incrédule que Youri ne put s'empêcher de rire.
– Est-ce vraiment si extraordinaire ?
– Eh bien... Tu es la première personne asexuée que je rencontre... Tu es toujours puceau, alors ?
– Oui.
La conversation avait vraiment pris un tour étrange, mais le jeune homme n'éprouvait pas d'embarras. Al s'humecta les lèvres et une lueur curieuse brilla dans ses yeux.
– Tu as quel âge au juste ?
– Vingt ans. Et toi ?
– Vingt neuf... Dis, tu n'as jamais été embrassé, ne serait-ce qu'une fois ?
– Jamais.
– Puis-je le faire ?
Youri écarquilla les yeux. Il était certain que Al ne devait avoir aucun mal à trouver des partenaires. C'était un bel homme mince au nez droit, aux grands yeux couleur océan et aux lèvres fines dont le visage albâtre était entouré de façon harmonieuse par de courtes boucles noires. En comparaison Youri était tout sauf attractif : il n'avait pas besoin d'avoir passé beaucoup de temps devant le miroir pour savoir que sa tenue était misérable, que ses yeux et ses cheveux étaient ternes...
– Pourquoi ?
Al leva les yeux au ciel.
– Ai-je besoin d'une raison ?
– Eh bien...
– Oui ou non ?
Le ton était impérieux et Youri était curieux. Pas seulement de savoir pourquoi Al voulait lui donner un baiser, mais aussi par l'expérience en elle-même. En même temps, il ne voulait pas qu'on rit de lui à ses dépens. Finalement, ce qui le décida, c'est l'amabilité constante dont avait fait preuve Al depuis qu'il l'avait abordé. Il haussa les épaules, comme indifférent, puis déclara :
– Fais comme tu veux.
A peine eut-il achevé ses mots que Al se pencha en avant et posa sa bouche sur la sienne. Une langue se glissa entre ses lèvres entrouvertes et des sensations inconnues firent frissonner le corps de Youri. Quand Al s'écarta, le jeune homme en ressentit une pointe de regret. La chose était très agréable, décida-t-il en son for intérieur.
– Alors ? demanda son compagnon.
– Alors, je n'aurais plus qu'à me faire embrasser par une femme pour pouvoir comparer et connaître ma préférence...
L'air sombre de Al fit comprendre à Youri qu'il l'avait vexé. Cependant, avant qu'il n'eut le temps de rattraper sa malheureuse phrase, Al suggéra un peu sèchement qu'ils retournent sur la place pour assister aux prestations des autres participants. Le jeune homme approuva, quelque part soulagé que la curieuse parenthèse du baiser soit refermée.

mardi 17 novembre 2009

Le Suivant du Prince - 13

S'approcher des différents stands de vendeurs venus sur la grand place faire leurs affaires, parut difficile à Youri. Sentir et voir autant de bonnes choses à manger sans pouvoir y goûter avait tout du supplice de tantale, mais il était désireux de rester en compagnie de Al, aussi le suivit-il. Travaillant comme un forcené chez les Boulgs, il n'avait jamais eu l'occasion de se faire des amis, et bien que cela ne lui ait jamais manqué - il avait son frère - il réalisait à présent à quel point cela aurait pu être agréable d'en avoir un comme Al. Ce dernier commanda deux énormes sandwichs au poulet à un stand, deux galettes au fromage à un autre et acheta deux brownies fondants à un troisième. Youri se dit qu'il avait un appétit d'ogre avant de comprendre que son compagnon lui destinait la moitié de ses achats. Qu'on lui fasse ainsi la charité déplaisait au jeune homme, mais Al sut le mettre à l'aise :
– Je n'aime pas manger tout seul. Vas-y prends.
Après une légère hésitation, Youri décida de mettre sa fierté de côté. Si son estomac se mettait à gargouiller lors de la lecture de son poème, cela serait du plus mauvais effet.
– D'accord, dit-il en débarrassant Al d'une galette, d'un sandwich et d'un brownie.
En s'éloignant de la place pour trouver un coin tranquille pour s'asseoir, Youri s'attaqua à son repas. Al fit de même si bien que quand enfin, ils dégottèrent un banc public libre, ils ne leur restaient plus que leur dessert.
– Tu vois, il suffisait que tu commences à manger pour retrouver l'appétit.
Youri sentit le sang lui monter au visage. Cela lui apprendrait à raconter des mensonges.
– Je n'avais pas de quoi me payer un repas, avoua-t-il finalement avec gêne.
Al ne commenta pas, se contentant de mordre à pleine dents dans son brownie. Ce n'est qu'après l'avoir fini qu'il demanda :
– Montre-moi ton numéro, je crois que je passe juste après toi pour le poème.
Youri essuya machinalement sa main sale sur son pantalon poussiéreux, puis sortit de sa poche le numéro qu'on lui avait donné un peu plus tôt. Al mit le sien à côté.
– On dirait, en effet, murmura Youri.
Al le désarçonna ensuite avec une question qui sortait de nulle part :
– Tu préfères les hommes ou les femmes ?
– Tout dépend pourquoi, répondit-il prudemment, ne sachant au juste ce que Al entendait par là.
– Je ne parlais pas en général, mais dans le cadre très spécifique de la chambre à coucher.
Youri ne s'était jamais posé la question. Les femmes et les hommes qu'il croisait n'avaient jamais suscité son intérêt. Il se réveillait parfois le matin avec une érection douloureuse, mais jamais il n'avait éprouvé de désir pour qui ce soit.
– Je ne sais pas, dit-il avec honnêteté sans chercher à cacher son inexpérience totale.

lundi 16 novembre 2009

Le Suivant du Prince - 12

Trois heures plus tard, un page à l'air pincé arracha à Youri sa copie inachevée. L'épreuve était terminée, mais il n'y avait pas le temps de souffler, la dictée allait commencer de suite. En raison de la nature des épreuves, nul ne saurait s'il était exclu du concours avant le lendemain : il fallait bien que les copies soient corrigées avant qu'il soit possible de déterminer ceux qui avaient réussi ou non l'examen. Le texte de la dictée était pour le moins étrange. Afin de maintenir une certaine équité entre les candidats, chaque Guilde avait le droit à sa phrase. Cela donnait un ensemble assez incohérent. Youri eut du mal à suivre le rythme, mais y parvint tout de même : depuis ses dix ans, il n'avait presque plus jamais écrit, mais les trois heures passées à gratter l'avaient de nouveau familiarisé avec l'exercice. Quand enfin la dictée fut finie, Youri fit lentement tourner son poignet afin de chasser la douleur qui s'y était logée.
Avant que les participants ne s'égaient dans la nature pour manger, des pages distribuèrent des numéros. La déclamation de poèmes se feraient à tour de rôle, aussi était-il inutile de revenir immédiatement sur la grand place. Le passage de Youri se ferait tard dans l'après-midi, mais pas suffisamment pour qu'il prenne le risque de retourner à l'auberge des Deux Cygnes où les Boulgs l'empêcheraient probablement de repartir, persuadés qu'il perdait son temps. En revanche, il allait devoir se passer de repas, car il n'avait pas d'argent. Il était affamé, mais il n'avait pas d'autre choix que de supporter les gargouillements de son estomac. Il n'était guère habitué à sauter des repas, car si les Boulgs ne leur avaient jamais versé aucun salaire à son frère et lui, ils ne les avaient non plus jamais laissés mourir de faim. Certes, le pain était sec et bien souvent, le repas était composé de restes de clients qui n'avaient pas terminés leurs assiettes, mais au moins, ils avaient toujours eu le ventre plein.
– On va s'acheter un sandwich ? proposa soudainement Al, tirant Youri de ses pensées.
Trop honteux pour avouer qu'il n'en avait pas les moyens, le jeune homme mentit :
– Je n'ai pas faim.
Al haussa un sourcil plus que dubitatif.
– C'est parce que tu as raté les épreuves ? demanda-t-il finalement.
Youri grimaça. Il préférait ne pas y penser. Ce qui était écrit, était écrit, il ne pouvait désormais plus rien y changer.
– Certaines questions semblaient directement en rapport avec le rôle de Suivant du Prince, alors j'y ai accordé un soin tout particulier, mais je n'ai pas eu le temps de répondre à tout.
Al eut un sourire satisfait, comme s'il était au courant de quelque chose qu'il ne dirait pas.
– Je suis sûr que tu seras qualifié. En attendant, viens avec moi, je vais m'acheter un petit casse-croûte.

vendredi 13 novembre 2009

Le Suivant du Prince - 11

Chapitre VI : De l'épée à la plume

Les épreuves du deuxième jour du concours angoissaient terriblement Youri. C'est la peur au ventre qu'il se rendit sur la grand place où avait lieu les épreuves. Hier, il s'en était tiré de justesse à l'épée et ce, seulement, grâce à l'aide providentielle du mystérieux Al. Youri doutait que celui-ci soit forgeron, comme ce dernier l'avait prétendu - il avait la main trop blanche et trop douce - mais ne se préoccupait guère de savoir pourquoi il avait menti. Ce qui comptait, c'est qu'il avait passé l'épreuve grâce à lui. En revanche, aujourd'hui, Youri serait seul face à sa copie : il devrait répondre aux questions de culture générale et résoudre les différents exercices sans filet. Puis, il serait obligé de se dépatouiller avec ses maigres connaissances en orthographe pour la dictée. Enfin, il y aurait le poème qu'il faudrait déclamer sans butter sur les mots et en sachant donner le ton juste... C'était quasiment mission impossible songea le jeune homme tandis qu'un page le conduisait jusqu'à sa table. La gorge de Youri se serra en voyant les feuilles de papier blanc, la plume et le petit encrier. Bravement, il s'assit et regarda en direction des spectateurs. Ces derniers étaient évidemment peu nombreux ce matin : qui a envie de voir gratter des gens penchés sur un pupitre pendant des heures ? Tous les candidats n'étaient pas encore présents et Youri sentait l'impatience le gagner quand une voix amicale l'interpella :
– Hey Youri ! Content de voir que tu aies réussi à rester dans la course.
Le jeune homme tourna la tête et constata que Al avait pris place sur le pupitre qui était à côté du sien. Seule une petite allée les séparait pour les empêcher de copier. Les grands yeux outremer de Al pétillaient. Sa présence diminua étrangement le stress de Youri.
– Merci encore pour hier.
– Ce n'était rien.
Ils échangèrent quelques mots, puis un gong retentit. Une fois que les bavardages se furent éteints, un page, à l'aide d'un porte-voix fait en corne, expliqua les conditions et la durée de l'épreuve pendant que les sujets étaient distribués. De nouveau le gong se fit entendre. Youri se mit immédiatement à déchiffrer les questions. Au début, il constata avec soulagement qu'il connaissait les réponses, puis en avançant dans la lecture du sujet, il s'aperçut que la difficulté se faisait croissante. Malgré lui, il jeta un coup d'œil à Al. La plume de ce dernier filait déjà sur le papier et Youri ne put s'empêcher d'envier son aisance. Il poursuivit sa laborieuse lecture du sujet, décidé à évaluer la tâche qu'il attendait avant de se lancer.