mercredi 30 novembre 2011

Lykandré - 117

Tonoshi distribua les cartes magnétiques qui permettaient d'ouvrir les portes, puis leur donna rendez-vous à midi dans le hall pour qu'ils aillent manger et établir un plan d'action. Ils se séparèrent là-dessus. Avec réticence, Méroé demanda l'aide de Lykandré pour marcher et ils gagnèrent en silence leur chambre qui était située au premier étage. L'homme loup qui avait pourtant attendu une opportunité pour parler à Méroé ne parvenait plus à trouver les mots. Il aurait préféré être dehors sous l'œil bienveillant des nuages que dans ce couloir aux teintes criardes à la moquette fatiguée.
Arrivés à la bonne porte, l'homme loup ne parvint pas à faire fonctionner la carte.  Méroé qui l'a lui prit des mains, réussit en revanche sans peine à s'en servir. Dès qu'ils furent à l'abri des regards dans la chambre, l'homme mouton lâcha Lykandré et avança à cloche-pieds jusqu'au lit où il s'étendit avec un soupir d'aise. L'homme loup vint s'allonger juste à côté malgré les protestations de Méroé.
– Tu as un lit rien que pour toi juste à un mètre!
– Tu es toujours fâché contre moi ?
Méroé se tourna de façon à lui faire face :
– Oui, toujours ! La manière dont tu te comportes avec moi est injuste ! Tu m'as repoussé, mais tu me donnes toujours l'impression que je suis spécial, à part. Si c'est parce que tu considères que je suis une faible créature que tu as le devoir de protéger ou je ne sais quoi, laisse-moi te dire que je me suis passé de toi pendant plus de vingt ans et que j'ai survécu chez M.Ritahoro ! Dans tout les cas, cela ne te donne pas le droit de répéter mes sentiments à n'importe qui et de les piétiner au passage !
Il était vraiment beau quand il était en colère, songea l'homme loup et approchant son visage du sien, il lui donna un coup de langue sur le nez. Méroé leva la main et s'essuya, les yeux écarquillés.
– Qu'est-ce que tu fais ?
Lykandré ne le savait pas trop lui-même. Il avait faim. L'andromorphe aux cheveux de neige ayant gardé la main sur son nez, il lécha sa bouche. Méroé répéta sa question. La fureur avait déserté sa voix.
– J'essaye de te montrer que je t'aime.
– D'amour ?
– Oui. J'ai fini par m'en rendre compte, même si j'ai eu besoin d'aide pour cela...
Méroé le bâillonna en posant ses lèvres sur les siennes. Il insinua ensuite sa langue dans la bouche de l'homme loup, l'explorant avec ardeur.
– C'est ça un baiser, murmura-t-il enfin, le souffle court.
Lykandré essaya de l'imiter. Un baiser était une chose savoureuse qu'il était doux de rendre et de répéter.

mardi 29 novembre 2011

Lykandré - 116

Hélas, Lykandré ne put clarifier les choses avec  aussi rapidement qu'il l'aurait souhaité. L'homme mouton semblait préférer le tenir à distance. C'était sur Inuyume qu'il s'appuya pour marcher sur le quai de la gare et dans le train, il s'installa près de la fenêtre, pressant Chveuil de s'asseoir à côté de lui. Lykandré se résigna à prendre place derrière lui, près d'Inuyume, dans un des étroits fauteuils gris du wagon.
Le train était un mode de transport inconnu pour Lykandré, aussi il fut soulagé de constater que c'était semblable à la voiture, en plus régulier. Bercé par le roulis, il finit même par s'endormir.
Quand il se réveilla, il put constater qu'il n'était pas le seul à être fatigué, car tout ses compagnons semblaient dormir. Il s'agita sur son siège, espérant qu'ils n'avaient pas raté le moment où il devait descendre du train. Tonoshi qui était assis dans un fauteuil non loin de lui de l'autre côté du couloir, ouvrit alors brusquement les yeux et croisa le regard inquiet de Lykandré.
– Un souci ?
– N'avons-nous pas manqué notre arrêt ?
– Non. Mais nous descendons très bientôt.
A nouveau, Lykandré se demanda s'il était vraiment raisonnable de se fier à l'épurateur. Il avait tué des andromorphes durant des années  et son revirement était curieux. Rien ne leur garantissait qu'au lieu de les amener à la ville la plus proche du clan des loups-garous, il ne les conduisait pas droit dans un piège. Maître Komori, pour sa part, ne semblait avoir aucun doute : il s'était endormi la tête contre l'épaule de Tonoshi avec un total abandon.
– Je sens bien que tu ne me fais pas confiance, et je le comprends, mais je te le redis, je n'ai pas de mauvaises intentions à votre égard. Tout ce qui m'intéresse à présent, c'est d'avoir un avenir avec Komori.
Que l'épurateur lise en lui comme dans un livre ouvert était désagréable. Heureusement, Lykandré n'eut pas besoin de répondre quoique ce soit. L'homme chauve-souris s'était réveillé, capturant toute l'attention de Tonoshi.
Ils descendirent peu après. L'épurateur prit la direction des opérations. Il les guida hors de la gare, puis les fit s'enregistrer dans un hôtel. Par soucis d'économie, il ne demanda que trois chambres et proposa qu'ils qu'ils s'installent immédiatement. Il valait mieux qu'ils soient frais et dispos avant de se jeter dans la gueule du loup. Sans compter qu'il fallait bien que Komori, Lykandré, Méroé et Inuyume reprennent à un moment ou un autre leurs formes originelles. La répartition dans les chambres ne se fit pas sans peine. Personne ne discuta du choix de Tonoshi de se mettre avec Komori, en revanche, Méroé comme Inuyume voulaient être avec Chveuil. Le cheval écureuil jouit de ce moment de popularité, puis finit par choisir la femme chien, si bien que Méroé dut se résigner à partager la même chambre que Lykandré.

lundi 28 novembre 2011

Lykandré - 115

Après que le mouton ait poussé un bêlement étouffé, Maître Komori qui avait surtout écouté jusque là, vint mettre son grain de sel :
– Si je puis me permettre, il faudrait mieux que ce soit nous qui nous rendions auprès de ce village de loups-garous, le dernier endroit où nos éventuels poursuivants songeront à nous chercher pendant que M.Schwartz reste ici pour aider son amie à acheter un terrain et un bâtiment qui nous accueillera à notre retour.
Il y eut un nouveau silence. L'idée de maître Komori était surprenante, mais elle méritait considération, car elle résolvait plusieurs problèmes d'un coup. Acheter un endroit où ils pourraient vivre tous ensemble était une solution pour le long terme, mais cela ne pouvait pas se faire du jour au lendemain et rester chez Bryan le temps que tout soit arrangé n'était pas envisageable, autant pour le manque de place que pour le risque d'être retrouvés. Une discussion houleuse s'ensuivit. Blacky tenait à aller vérifier lui-même si Koro n'était pas dans le clan de loups-garous. Inuyume considérait que tout cela était trop dangereux et elle voulait rester à l'abri. Colibri était pour sa part persuadé que le groupe Trott viendrait et s'en prendrait à Emmeline et Blacky pendant que le reste de la bande serait partie. Lykandré trouvait que ce n'était pas bien que Méroé voyage alors qu'il était blessé. Étonnamment Chveuil était le plus favorable au projet de Komori. Tout en affirmant qu'il ne sentait pas concerné par toute l'affaire, il éprouvait une certaine curiosité à découvrir le monde, lui qui avait toujours été enfermé sans jamais rien voir de l'extérieur. Finalement, vers deux heures du matin, non sans réticence, tout le monde finit par être convaincu par ce que proposait l'homme chauve-souris et il fut donc décidé que dès l'aube, Tonoshi, Komori, Lykandré, Chveuil, Inuyumé et Méroé prendraient le train et s'installeraient dans la ville la plus proche du village des loups-garous où ils aviseraient de la meilleure marche à suivre. En leur absence, Bryan et Emmeline chercheraient activement leur havre de paix, et si jamais des andromophes du groupe Trott venaient leur rendre visite, ils prétendraient ne pas avoir revu Lykandré.
Ils passèrent les quelques heures qui les séparaient du départ à préparer leur voyage. Emmeline regarda les horaires des trains sur l'ordinateur et leurs pré-commanda leurs billets.  Blacky avec l'aide de Tonoshi leur emballa un minimum d'affaires à emporter - quelques vêtements à lui et le kit de secours pour soigner le mouton. Lykandré s'habilla et Inuyume fit de même après s'être transformée. Chveuil s'enfonça à nouveau une casquette sur le crâne pour cacher ses oreilles. Komori arrangea sa tenue. Méroé, malgré la douleur, se força à se métamorphoser et avec l'aide de Colibri qui était également devenu humain, enfila des vêtements. Les voyageurs étant prêts, Emmeline les emmena à la gare dans sa voiture.  Lykandré retenu par Blacky qui avait tenu à lui communiquer des informations supplémentaires sur Koro, n'avait eu d'autre choix que de monter à l'avant, à côté de la jeune femme, les autres s'étant assis à l'arrière. Durant le trajet, au lieu de regarder les bâtiments défiler, il jeta de fréquents coups d'œil dans le rétroviseur à Méroé, se demandant quand est-ce qu'il pourrait lui parler tranquillement. Maintenant qu'il avait enfin reconnu l'importance que l'andromorphe aux cheveux de neige avait pour lui, il avait hâte de lui faire part de ses sentiments et de se réconcilier avec lui. La froideur de Méroé qui était toujours fâché contre lui était dure à supporter.

vendredi 25 novembre 2011

Lykandré - 114

Après un silence atterré, tout le monde rejeta en même temps sans appel l'idée du cheval écureuil qui, énervé, se leva pour quitter le salon. Inuyume sut heureusement trouver les mots pour le retenir :
– Je suis sûre que ta suggestion partait d'un bon sentiment parce que tu n'as connu que ça dans ta vie, mais aucun de nous n'a l'âme d'un M.Ritahoro.
Sous l'influence de la lune désormais haute dans le ciel, Bryan se transforma en Blacky et réorienta la conversation sur le sujet qui l'intéressait :
– Bon, si tout le monde est partant pour que nous achetions un terrain et un logement, pourrait-on en revenir au clan des loups-garous et leur possible lien avec la disparition de Koro ?
Cette fois, Chveuil ne s'emmêla pas et Tonoshi put révéler le peu qu'il savait. Le clan des loups-garous était situé dans un petit village isolé dans la montagne et le plus dur n'était pas d'y entrer, mais d'en sortir.  Aucun des épurateurs qui avaient tenté de l'infiltrer n'en étaient jamais revenus. Les loups-garous ne quittaient le village qu'en bande et à priori, uniquement pour se réapprovisionner en médicaments et autres biens qu'ils ne pouvaient produire eux-mêmes. Cependant, dans les archives des épurateurs, il était noté qu'un loup-garou de ce même village avait été capturé alors qu'il cherchait à échapper aux siens dont il avait transgressé les lois. Cependant, malgré différentes tortures, il n'avait rien voulu révéler pouvant causer du tort à ceux qu'il avait pourtant essayé de fuir. Des loups-garous étaient venus le récupérer et la majorité des épurateurs présents avaient été mis en pièce.
– Si je veux savoir si Koro est dans ce village, je suppose que, pour en avoir le cœur net, je n'ai d'autre choix que de m'y rendre, conclut Blacky.
– Certes, mais que ton compagnon soit là-bas ou pas, tu risques de ne plus pouvoir repartir, car ce que j'ai lu dans les archives laisse à penser qu'ils ne sont pas enclins à autoriser les leurs à se promener à l'aventure dans le vaste monde, déclara Tonoshi.
Lykandré, lui, avait surtout l'impression que le clan des loups-garous à l'image du groupe Trott  voulait tout contrôler. Certes, même la meute à laquelle il avait appartenu sur l'île d'Inukotou était régie par des règles, mais au moins, à tout moment, ses membres pouvaient remettre en cause l'autorité en place en affrontant l'alpha ou partir vivre en solitaire. Toujours était-il qu'allait mettre son museau dans ce village de loups-garous semblait une erreur. Cependant, il comprenait les motivations de Blacky.
– Je t'accompagnerai, si tu veux, annonça-t-il.
Il regrettait par avance de devoir s'éloigner de Méroé, mais il devait bien ce sacrifice au grand loup noir.

jeudi 24 novembre 2011

Lykandré - 113

Dès que sa gueule fut formée, il interrompit les répliques mordantes que s'échangeaient Bryan et Chveuil.
– Blacky m'a généreusement accueilli chez lui a trois reprises, donc si je peux l'aider à retrouver son compagnon, je le ferai. Mais il est vrai qu'indépendamment de cela, nous avons besoin de dénicher un endroit où nous pourrons vivre en toute tranquillité, car contrairement à ce que Tonoshi a laissé entendre, nous n'avons nulle part où nous réfugier. Les idées de M.Trott ne sont pas les nôtres...
L'épurateur réagit sur le champ :
– J'avais bien précisé "techniquement", car je ne souhaite en effet pas retourner auprès de mes camarades épurateurs auxquels j'ai toujours dû cacher que j'étais gay. Je veux voir un signe du destin dans mes retrouvailles avec Komori et essayer de fonder quelque chose avec lui. Après tout, ce n'est pas comme si nous pouvions procréer et ternir le sang humain.
L'homme chauve-souris parut gêné que l'épurateur dévoile sans fioriture leur relation, mais il ne nia pas.
– Dommage que nous ne puissions pas acheter une île et y vivre tous en paix ensemble, caqueta Colibri.
– Dis, le coucou, pourquoi devrait-on donc passer le restant de nos jours collé les uns aux autres, hein ?
– Personne ne te force ! Et je ne pensais pas à toi ! riposta le perroquet, ponctuant sa réplique d'un claquement de bec.
Chveuil allait se mettre tout le monde à dos, s'il continuait. A nouveau, Lykandré essaya d'aplanir les choses :
– En même temps, nous attirerons sûrement moins l'attention, si chacun va son chemin.
– Être seul, c'est aussi être en position de faiblesse et augmenter les chances de se faire tuer ou capturer. Sans compter que c'est triste, répondit Blacky.
L'homme loup était d'accord avec ça. Pendant vingt ans, il avait vécu en meute et cela lui avait très bien convenu. Il n'avait plus envie de se séparer des personnes qu'il appréciait... et surtout pas de Méroé. Comme cette pensée l'effleurait, il fut enfin obligé de s'avouer que l'andromorphe aux cheveux de neige avait une place spéciale dans son cœur, tout mouton qu'il soit. Le moment était toutefois mal choisi pour le lui révéler.
– Je pense aussi qu'il vaut mieux rrrester en grrroupe, aboya Inuyume à qui les cours de maître Maolo avaient été profitables.
– Ultimement, je m'en moque. Je veux être libre, point barre, affirma Chveuil.
– Sans aller jusqu'à posséder une île, nous pourrions à la manière du groupe Trott ou du clan des loups-garous avoir un endroit à nous où personne viendrait se mêler de notre mode de vie, proposa Tonoshi.
– Et financièrement, cela pourrait fonctionner, approuva Emmeline.
La jeune femme, Bryan et l'épurateur se mirent à parler billets et prêts, et Lykandré décrocha.
– Nous pourrions toujours tourner des vidéos pornographiques et les vendre, s'il manque de l'argent, suggéra Chveuil comme la discussion entre les trois personnes qui possédaient un compte en banque se prolongeait.
Sa proposition eut l'effet d'un pavé dans la mare.

mercredi 23 novembre 2011

Lykandré - 112

Ils s'installèrent tous tant bien que mal dans le salon. Lykandré, redevenu loup, se plaça au pied du canapé, juste sous Méroé. Chveuil et Inuyume, sous sa forme animale, se mirent à côté du loup tandis que Blacky se glissait près du mouton. Tonoshi prit possession d'un des fauteuils, Komori, de l'accoudoir. Emmeline, s'assit dans l'autre et Colibri se percha sur le dossier. L'épurateur fut le premier à prendre la parole :
– J'ai beaucoup réfléchi et je pense que nous sommes recherchés. Je ne sais pas si mes camarades ont survécu à l'attaque organisée par le groupe Trott, mais notre cellule n'est jamais qu'une partie de l'iceberg. Par ailleurs, Komori et ses amis ont faussé compagnie à M.Trott et perturbé l'attaque qu'il avait initiée. Nous avons donc deux groupes de poursuivants potentiels.
– Et peut-être même trois dans le cas de Lykandré, puisqu'il a été revendu par M.Ritahoro au laboratoire du docteur Nakahira et que ce sont des chasseurs d'andromorphes qui l'ont libéré, précisa Blacky.
– Les gens qui nous recherchent, c'est une chose. Moi, ce que je me demande, c'est où pouvons nous aller ! s'exclama Chveuil.
– Techniquement parlant, chacun de nous a un endroit où retourner. Les andromorphes ont le groupe Trott, moi, les épurateurs, Blacky, son clan de loup-garous... répondit Tonoshi.
– Je n'appartiens à aucun clan, coupa Bryan.
L'épurateur haussa des sourcils étonnés.
– Curieux ! D'après mes connaissances, tous les loups-garous vivent en clan, à la différence d'ailleurs des autres garous et c'est pour cela que nous ne pouvons pas les attaquer de façon fructueuse. Ils sont trop dangereux en bande.
– Personne ne m'a jamais parlé de ça.
– Vraiment, mais ta famille ?
– Ce sont mes grands parents qui m'ont élevé et m'ont expliqué que j'étais sensible à lune. Ma mère est morte en couche et mon garou de père, et bien, il l'avait abandonnée bien avant cela. Quant à mon compagnon, Koro, un loup-garou qui a disparu il y a plusieurs mois, il ne m'en a jamais touché un mot non plus.
Le point commun entre le père de Blacky et Koro frappa de suite Lykandré. Les deux loups-garous étaient partis, laissant derrière eux la personne qu'ils aimaient. Emmeline dut se faire la même réflexion, car elle intervint :
– Leurs disparitions respectives pourraient-elles être liées à cette histoire de clan de loup-garous ?
– C'est très probable, répondit Tonoshi.
– Bon, c'est bien gentil tout ça, mais quel rapport avec notre problème actuel ? glissa Chveuil d'un ton acide.
– Tu penses jamais qu'à ta pomme, hein, toi ? grommela Bryan.
– Ce n'est pas comme si quelqu'un d'autre allait le faire pour moi, rétorqua Chveuil.
Cela allait dégénérer en dispute. Chacun avait raison, l'un de s'accrocher à cette nouvelle piste sur la disparition de celui qu'il aimait, l'autre de vouloir trouver une solution pour vivre en toute liberté. Lykandré qui avait trop de peine à s'exprimer sous sa forme animale, se concentra et se métamorphosa pour calmer le jeu.

mardi 22 novembre 2011

Lykandré - 111

– Ta jambe te fait mal ?
– Ça va. Je ne suis pas si faible que tu as l'air de le croire.
L'andromorphe aux cheveux de neige, toujours si doux et si gentil, était fâché contre lui. C'était une évidence.
– Tu m'en veux ?
– De dire à tout le monde que je t'aime et que toi, tu t'en contrefiches ? En effet, cela ne me fait pas plaisir.
– Ce n'est pas ça... commença Lykandré sans achever sa phrase, ne pouvant se résoudre à expliquer qu'il en était venu à parler de ça avec Bryan parce que celui-ci croyait qu'il était tombé amoureux du mouton.
– Alors, c'est quoi ?
Méroé venait à peine de terminer sa question que ses traits se crispèrent. Il se mordit les lèvres. Sa tête s'allongea, son corps s'arrondit, ses bras devinrent des pattes, puis ce fut au tour de ses jambes et il bêla de douleur. Le pansement, complètement défait, tomba, maculé d'un sang rouge et frais. Lykandré fila chercher Tonoshi. L'épurateur, tout en murmurant qu'il n'était pas vétérinaire, vint soigner la patte du mouton. Méroé, hormis quelques bêlements, ne se plaignit pas. Sur ces entrefaites, Inuyume et Chveuil émergèrent de la chambre et vinrent aux nouvelles.
– Mais si cela fait ça à chaque fois qu'il se transforme, il ne va jamais guérir ! s'exclama la femme chien, catastrophée.
– Quand j'ai été blessé, cela a fini par s'arranger, déclara Lykandré plus pour se rassurer lui-même qu'autre chose.
– Mais loulou, ce n'était rien en comparaison et chez M.Ritahoro, tu as bénéficié des soins d'experts.

– Ce que je ne suis certes pas. Cependant, je ne suis pas pessimiste. Cela devrait juste être beaucoup plus long à se réparer, répliqua Tonoshi avant de partir se laver les mains dans la salle de bains.
– Indépendamment de l'état de moumou, la question est plutôt : qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
– On attend que Blacky revienne pour en discuter, répondit Lykandré.
– Et pourquoi donc ? répliqua Chveuil avec humeur.
– Parce qu'il est autant mêlé que nous à cette affaire, expliqua l'homme loup.
– Y-a-t-il à manger ici ? s'inquiéta Inuyume.
Lykandré, après s'être assuré que Méroé n'avait pas l'air de trop souffrir, les conduisit à la cuisine. Hélas, il avait terminé la dernière viande du réfrigérateur et il n'y avait rien qui tentait ses amis dans ce qui restait.
L'arrivée d'Emmeline chargée de sacs, une heure plus tard, arrangea le problème des provisions. Colibri était également présent, et il voleta joyeusement au-dessus de l'homme loup et de la femme chien, piaillant son plaisir de les revoir. Lykandré n'eut plus qu'à refaire les présentations et raconter une fois de plus ce qui s'était passé avec le groupe Trott. L'un dans l'autre, le temps passa vite. Néanmoins, quand Bryan rentra, ils lui laissèrent juste le temps de retirer ses chaussures avant d'aborder l'épineux problème de leur avenir.

lundi 21 novembre 2011

Lykandré - 110

– Je perds espoir. Cela va faire plus de sept mois qu'il a disparu à présent. Soit il lui est arrivé un accident mortel, soit il a fait exprès de s'en aller et ne veut plus me revoir. Et moi, comme un imbécile, je le cherche depuis.
– Pourquoi t'intéresserais-tu à Méroé ? C'est un mouton et tu es un loup-garou.
– Ses cheveux de neige me rappellent le pelage blanc de Koro. Ceci dit, sans vouloir t'offenser, Lykandré, tu n'es pas un simple loup et lui, un bête mouton. Vous êtes des andromorphes.
– Nous sommes surtout des mâles tout les deux.
Bryan poussa un énorme soupir et leva les yeux au plafond.
– Tu sais quoi ? Puisque même te rendre jaloux n'a pas l'air de fonctionner, je renonce à te sortir de tes illusions. J'ose espérer pour ce pauvre mouton que tu finiras par réaliser tes sentiments. Peut-être qu'à la fin de l'hiver, ton corps te fera entendre ce que ton esprit refuse.
– Méroé et moi, un couple, c'est impossible !
Il fallut que la porte s'ouvre à ce moment là sur l'andromorphe aux cheveux de neige, qui accroché à la poignée se tenait sur une jambe, celle qui était blessée ne touchant pas le sol. Il devait avoir entendu, mais il resta digne.
– Je cherche les toilettes, déclara-t-il.
– Tu n'aurais pas dû te lever, grogna Lykandré.
– Je suis venu à cloche-pied, répliqua Méroé avec une certaine froideur.
– Je vais t'y porter, intervint Bryan qui, sans attendre, prit l'andromorphe aux cheveux de neige dans ses bras.
Cette vue ne fit pas plaisir à Lykandré, et un grognement ennuyé s'échappa du fond de sa gorge. Est-ce que Blacky comptait vraiment faire sien Méroé ? Et si c'était le cas, était-ce par jalousie qu'il en était agacé ?
Après cela, l'homme loup dut regarder Bryan porter à nouveau Méroé, cette fois dans la cuisine où ils trouvèrent Tonoshi qui buvait tranquillement un café comme s'il avait été chez lui. Maître Komori avait disparu. Quand Lykandré s'enquit de son absence, l'épurateur ouvrit son gilet noir et ils purent voir une petite forme grise brune qui était accrochée à la doublure.
– Il était épuisé, commenta-t-il.
– Pas vous ? demanda Bryan, tout en servant un bol de lait avec des céréales pour l'andromorphe aux cheveux de neige.
– J'avais besoin de réfléchir. Nous ne pouvons pas rester ici, répondit Tonoshi.
– Nous en discuterons ensemble, ce soir, quand je reviendrai de mon travail.
– Ma foi, je profiterai du délai pour faire un somme.
Son petit déjeuner achevé, Blacky passa un coup de fil à Emmeline, réinstalla Méroé dans le canapé, lui ébouriffa les cheveux et quitta l'appartement. L'épurateur, lui, resta dans la cuisine pour une dernière tasse de café, si bien que Lykandré se retrouva seul avec l'homme mouton dans le salon.

vendredi 18 novembre 2011

Lykandré - 109

Dans le canapé, Méroé n'était pas encore revenu à lui, cependant sa respiration était plus apaisée. Après avoir englouti avec voracité les tranches de jambon, Lykandré prit dans sa main celle de Méroé, et la garda, fascinée par le contraste entre sa peau brune et celle blanche de l'andromorphe aux cheveux de neige.
Dans la nuit, quand l'homme mouton reprit conscience, Lykandré put le rassurer. La balle était ressortie et il était hors de danger. Il lui donna un verre d'eau récupéré dans la salle de bains et les anti-douleurs, se gardant de retourner dans la cuisine dont maître Komori et son épurateur n'étaient toujours pas ressortis. Il lui raconta aussi ce qui s'était passé, sans omettre la relation étrange de Tonoshi et l'homme chauve-souris.
– Ce n'est pas si surprenant que ça. La haine est proche de l'amour et puis, c'est connu, les contraires s'attirent.
Méroé prêchait de façon évidente pour sa propre cause en disant cela.
– Essaie de dormir, dit Lykandré qui voulait éviter que l'andromorphe aux cheveux de neige ne se fatigue à discuter.
Au petit matin, l'homme loup qui s'était assoupi, se réveilla en sursaut et vit Bryan, dans le plus simple appareil, des vêtements sous le bras qui marchait à pas de velours vers la salle de bains. Leurs regards se croisèrent et Bryan lui fit signe de venir. Lykandré, après un dernier regard à Méroé, se releva et le rejoignit.
– Tiens moi donc compagnie pendant que je me prépare avant de partir travailler, murmura Bryan.
Lykandré ne se fit pas prier et prit enfin le temps de résumer les évènements qui l'avait ramené chez Blacky.
A la fin de son récit, Bryan avait eu le temps de prendre sa douche et même de s'habiller.
– Quelle histoire encore ! Je vais téléphoner à Emmeline avant de petit déjeuner pour qu'elle vienne vous apporter de quoi manger et autre, et ce soir, nous aviserons de ce que nous allons faire, car clairement, mon appartement n'est pas assez grand pour loger tout le monde, pas sur le long terme en tout cas. Ni même sur le court. Je ne vois même pas comment vous vous êtes arrangés pour tous vous coucher.
– Maître Komori et Tonoshi sont restés dans la cuisine. Pour ma part, j'ai dormi par terre, à côté du canapé, près de Méroé.
– Tu aimes le mouton, hein ?
– C'est un ami.
Les yeux vert de Bryan pétillèrent d'amusement et il sourit.

– Tu ne t'en rends pas compte toi-même, mais c'est vrai, tu le traites différemment des autres. Tu le dévores des yeux.
– Il me donne faim, même quand j'ai le ventre plein, c'est tout.
– C'est ce que je dis, tu l'aimes. A ta manière, tu le désires.
– C'est ridicule. C'est un ami, comme toi. Pas plus, pas moins.
– Non. Moi, tu n'as jamais voulu me manger.
– C'est parce que Méroé est un mouton, une proie facile. Pas toi.
– Et Colibri ou le type aux oreilles rousses, Chveuil ? En tant que volatile, même exotique, le premier devrait pourtant être à ton goût.
– Ce n'est pas pareil. J'aurais sûrement le même appétit pour un cerf ou un lapin.
– Même quand tu es repu ?
Lykandré ne put l'affirmer. Il n'était pas naturel qu'après avoir mangé, Méroé lui fasse encore envie.
– Tu admets enfin ? reprit Bryan.
– Non.
– Dans ce cas, cela ne te dérangera pas si j'essaye de le séduire ?
– Et Koro ? s'indigna Lykandré.
Le sourire de Bryan disparut et son visage se ferma.

jeudi 17 novembre 2011

Lykandré - 108

– Je suppose que tu vas veiller ton ami. S'il y a besoin, tu peux venir me chercher.
La façon qu'avait l'épurateur de souffler le chaud et le froid était perturbante.
– D'accord, grommela Lykandré en ouvrant la porte du réfrigérateur.
– Je suis désolé de m'être montré mal aimable. Tout ça est très soudain pour moi et communiquer sur un pied d'égalité avec des créatures comme vous, c'est tout nouveau.
Se disant que le couple dans la cuisine n'avait pas dû faire que s'embrasser, Lykandré s'empara d'un paquet de tranches de jambons et répliqua :
– Vous êtes en effet plus habitué à nous tuer.
Comme Komori s'apprêtait à s'en mêler, Tonoshi lui signifia que c'était inutile d'une légère pression sur le bras.
– C'est vrai, mais je n'y ai jamais pris plaisir. La tâche d'épurateur se transmet de générations en générations et on m'a appris qu'il fallait empêcher que la semence des garous et des andromorphes se répande pour éviter qu'à terme le genre humain ne disparaisse.
– Je n'ai jamais demandé à être capable de me métamorphoser ! J'aurais préféré être un simple loup !!
– Je le conçois. A dire vrai, nul ne sait avec exactitude comment son apparus les andromorphes et les garous. Le phénomène est semblable à celui de l'œuf et de la poule. Les premiers sont peut-être à l'origine des seconds, mais l'inverse est également possible. L'influence de la lune sur les garous laisse cependant penser qu'ils sont sûrement à l'origine des andromorphes. Transformés par l'influence lunaire, ils sont allés courir les bois et les champs et poussés par leurs bas instincts, ont copulé avec les animaux dont ils prenaient la forme, si bien qu'à travers les siècles, chez les animaux, sont apparus des êtres hybrides capables de se changer en homme. D'autres pensent que les garous comme les andromorphes sont nés d'unions contre nature entre bêtes et hommes, unions qui par quelque miracle diabolique ont donné naissance à des créatures hybrides.
C'était la première fois que quelqu'un lui donnait des éléments de réponses sur ses origines et Lykandré faillit le remercier. Une méfiance persistance à l'égard de l'épurateur le retint.
– Je vous laisse tranquille. Je vais prendre mon repas dans le salon.
– Tu ne nous gênes pas, objecta Komori.
– Ce serait aussi bien qu'il retourne auprès de son ami, car nous deux, nous avons beaucoup à nous dire, rétorqua Tonoshi.
L'homme loup quitta la cuisine. L'histoire de Tonoshi et Komori était bizarre. A la base, ils étaient ennemis, mais l'amour avait faussé la donne, se moquant une fois de plus du sexe de ses victimes. En même temps, sa propre amitié pour Méroé était curieuse.

mercredi 16 novembre 2011

Lykandré - 107

– Apparemment, la balle a traversé et est ressortie. Je vais pouvoir désinfecter, recoudre et bander proprement. Il ne pourra pas marcher pendant plusieurs semaines, mais devrait se remettre assez vite.
– Et s'il se transforme ? demanda Lykandré qui se rappelait qu'après avoir été frappé par les jeunes à moto, ses métamorphoses avaient été pénibles.
Tonoshi haussa les épaules.
– Il souffrira, je suppose.
– Il y a des anti-douleurs dans le kit, intervint Blacky comme Lykandré paraissait sur le point d'exploser devant l'indifférence de l'épurateur pour la souffrance de Méroé.
– C'est vous qui voyez. En attendant, j'apprécierai avoir un peu d'air pour le soigner. Être ainsi observé me déconcentre. Je suis policier à la base, pas médecin, si je m'y connais, c'est parce que nous sommes souvent blessé durant nos combats contre...
L'épurateur n'acheva pas sa phrase, mais personne n'en avait besoin pour comprendre.
– Je tiens à rester présent, répliqua Lykandré d'une façon qui ne laissait pas place à la discussion.
– Moi aussi, enchérit Komori.
– Pour ma part, je vais aller me coucher. Et pour éviter que le nombre de spectateurs soit trop nombreux, je propose à ceux qui n'ont pas encore dit ce qu'ils souhaitaient de faire de même, déclara Blacky.
La formulation bizarre de la suggestion du garou fit réaliser à l'homme loup qu'il avait omis de faire les présentations. Il répara de suite l'erreur et Blacky conduisit Chveuil et Inuyume dans la chambre à coucher.
Avant que la porte ne se referme sur eux, les occupants du salon purent l'entendre offrir son lit à ses invités imprévus tandis que lui-même s'installerait sur le sol avec des couvertures.
Tonoshi, sous les regards attentifs de Lykandré et Komori s'occupa de Méroé comme il l'avait annoncé quelques instants plus tôt.
Une fois qu'il eut terminé, il partit dans la cuisine se laver les mains, l'homme chauve-souris sur ses talons. Lykandré, lui, s'agenouilla devant le canapé et contempla Méroé qui semblait plus fragile que jamais. Se rappelant qu'il avait faim, l'homme loup décida d'aller se servir dans le réfrigérateur de Bryan. Cependant, quand il entra dans la cuisine, la vue de Tonoshi qui embrassait Komori à pleine bouche l'arrêta. Il n'eut pas le temps de tourner les talons. L'épurateur, bien qu'en apparence très concentré sur le baiser passionné qu'il donnait, l'avait repéré.
– Il y a un problème ?
– Non, je venais juste manger un morceau.

Résultats du sondage sur le personnage avec qui devrait terminer Lykandré

Merci une fois de plus d'avoir répondu au sondage que je proposais. Comme je l'ai précisé en commentaires, c'était pour avoir votre avis, pas pour déterminer avec qui Lykandré terminerait effectivement dans l'histoire. Le suspense reste donc entier en dépit de la victoire écrasante de Chveuil !

Sans vous gâcher la surprise, je tiens à vous dire qu'à l'origine, j'avais un autre personnage en tête que celui pour lequel je me suis décidée. Et puis j'ai même caressée l'idée de le faire terminer avec encore un autre. Et même un quatrième. Ceci dit, chaque choix m'aurait amené à une histoire très différente de celle qui est en cours.

Pour les personnes ayant voté pour "Un autre personnage", n'hésitez pas à dire le nom en commentaires s'il s'agit d'un personnage déjà apparu dans l'histoire (tel Jun, Danno...) A moins bien sûr que vous envisagiez encore un personnage qui n'a pas encore débarqué !


mardi 15 novembre 2011

Lykandré - 106

L'épurateur battit des paupières et prit connaissance avec ce qui l'entourait. Il vit de suite Blacky dont la taille gigantesque était difficile à ignorer et  repéra dans la foulée les oreilles de Lykandré et celles de Chveuil qui avait fini par retirer le chapeau qu'il avait mis avant de sortir de l'immeuble du groupe Trott. Son premier réflexe fut de tâter avec la main sa poche droite, là où aurait dû se trouver son arme. Seulement, il n'y était plus, car quand ils l'avaient fouillé pour dénicher son portefeuille, ils l'en avaient délesté. Enfin, Tonoshi remarqua la présence de l'homme chauve-souris.
– Tu m'avais promis de ne plus croiser mon chemin !
– Je ne pouvais pas permettre que tu sois tué sans rien faire, répliqua Komori.
– Je m'en serais très bien sorti, même sans toi !
– Peut-être, mais je ne pense pas. Vos attaquants  se moquaient des pertes que vous leur faisiez subir et n'avaient pas l'intention que vous en réchappiez. Mon intervention t'a évité d'avoir le crâne réduit en bouillie.
Tonoshi effleura du bout des doigts sa tempe blessée. Son visage se détendit et sa voix restée froide jusque là devint douce, presque comme une caresse.
– Il faut croire que te laisser la vie sauve n'avait rien d'une erreur... Ma bêtise a surtout été de ne pas tout plaquer et partir avec toi, cette nuit-là.
Chveuil tapa deux fois dans ses mains.
– Maintenant ça suffit vos roucoulements ! Épurateur ou pas, longue histoire ou pas, est-ce oui ou non, tu peux soigner notre ami qui a reçu une balle dans la jambe ?
Pour une fois, Lykandré approuva en son for intérieur le mouvement d'humeur du cheval écureuil.
– C'est aussi un animal à la base, n'est-ce pas ? demanda Tonoshi.
Son ton était redevenu coupant et son air sévère.
– Il n'y a que vous d'humain, ici, répliqua Lykandré avec sécheresse, agacé par le mépris qu'il percevait chez l'épurateur.
– Je vois. Alors je suppose que je n'ai guère d'autre choix que de m'exécuter, sous peine de devoir le faire contraint et forcé.
Sur cette déclaration pour le moins curieuse, il s'extirpa avec lenteur du fauteuil et s'empara du kit de secours. Il découpa la jambe du pantalon de Méroé, défit le pansement de fortune pour lequel Inuyume avait déchiré sa robe, lava sommairement la jambe blessée et enfin examina la plaie soulevant avec précaution la jambe de l'andromorphe aux cheveux de neige. Durant tout le processus, Lykandré ne le quitta pas des yeux ; il n'avait pas confiance.

lundi 14 novembre 2011

Lykandré - 105

– Qui êtes-vous et que faîtes-vous chez moi ? gronda le loup-garou en retroussant les babines.
Lykandré ne prêta pas attention au ton menaçant. Dans sa joie de le revoir, ses oreilles de loup repoussèrent et sa queue touffue refit son apparition.
– Nous sommes venus nous réfugier ici, car nous avons quitté le groupe Trott.
Les muscles tendus de Blacky se relâchèrent immédiatement et il quitta sa posture combattive.

– Lykandré ! Je ne t'avais pas reconnu. Il faut dire que tu es rarement autant habillé et que le manteau que tu portes masque ton odeur... Je suis content que tu sois là, même si vu le nombre de personnes qui t'accompagne, cela ressemble fort à une invasion... Enfin, raconte ce qui t'es arrivé, car quand, inquiets de ne pas avoir de tes nouvelles, nous nous sommes rendus à l'immeuble Trott, on nous a poliment mais fermement éconduits. Ils ont prétendu que tu n'étais pas resté, et qu'ils ne savaient pas où tu étais allé.
Il y avait tellement à dire qu'il était difficile de savoir par quel bout commencer, alors Lykandré alla directement à l'essentiel.
– Nous avons un blessé.
Blacky suivit son regard soucieux et s'arrêta sur le corps mince et pâle de Méroé étendu sur le canapé, avant de s'intéresser à l'homme à la tempe ensanglantée qui était avachi dans le fauteuil.
– J'ai un kit de secours. Cependant, selon la gravité, je ne sais pas si cela sera vraiment suffisant.
Lykandré accompagna Blacky jusqu'à la salle de bains et sur ses indications récupéra dans le placard de la salle de bains une boîte blanche décorée d'une large croix rouge. Ils revinrent ensuite dans le salon où l'un des trois andromorphes avait allumé les lumières et fermé la fenêtre ouverte, rendant la pièce plus chaude et plus chaleureuse. Komori était toujours à côté de l'épurateur tandis que Chveuil et Inuyume avaient pris position près du canapé au niveau de la tête de Méroé. La femme chien s'inquiéta à voix haute :
– Il a été touché par une balle, n'est-ce pas ? Que va-t-il se passer s'il se transforme ?
C'était une bonne question. Le projectile était peut-être resté à l'intérieur de la jambe et lors de la métamorphose, il risquait de se déplacer, endommageant au passage un organe vital. La perspective était glaçante.
– Par balle ! Je ne sais pas soigner ça ! s'exclama Blacky.
– Moi, j'en suis capable, intervint une voix pâteuse.
C'était Tonoshi, l'épurateur, qui venait de reprendre conscience, mais n'avait pas encore ouvert les yeux. Une tension soudaine s'installa. Quelques soient les circonstances qui l'avaient poussé à épargner Komori six ans plus tôt, il était impossible de savoir comment il allait réagir en se rendant compte qu'il était en présence de cinq andromorphes et d'un garou.

Manga Yaoi en novembre 2011

Mieux vaut tard que jamais, même si là, c'est franchement tard...

Chez Asuka, 3 sorties :
Junjo Romantica 6 (sorti le 10 novembre)
Viewfinder 6 (prévu pour le 17 novembre)
Be x Boy 13 (à priori repoussé début décembre, mais toujours indiqué sur le site de Kazé pour le 24 novembre)



Chez Taïfu, 8 sorties prévues avec une tripotée de tomes "2"  et 2 one-shots :
Acid Town 2 (collection Yaoi Blue ou tout l'inverse du PWP - Plot what Plot?)
Aussi cool que lui 2
Little Butterfly 2
Irrésistible Ivresse 2
Under Grand Hotel 2 (fin)
Ze 7
Romantic Roomate (recueil d'histoires courtes)
Back to Love (lié au one-shot Only Love)



Chez Tonkam, Piyoko Chitose frappe encore avec le one-shot Dévore-moi, le 16 novembre :

4 titres avec sous-entendus entre hommes chez Kazé, Tonkam et Soleil :
Silver Diamond 15 (10 novembre)
07 Ghost 6 (17 novembre)
Gate 1 (2 novembre)
Number 6 (16 novembre)



mercredi 9 novembre 2011

Lykandré - 104

Enfin le taxi arriva à bon port et se gara devant l'immeuble où vivait Blacky. Le chauffeur demanda à être payé, se tournant tout naturellement vers Chveuil qui était assis à côté de lui. L'andromorphe se retourna sur son siège pour jeter un coup d'œil angoissé vers les passagers de la banquette arrière. Ils n'avaient pas d'argent sur eux. Une fouille des poches du mystérieux Tonoshi et la découverte d'un portefeuille leur permit toutefois de ne pas subir les foudres du chauffeur. Les portes du taxi s'ouvrirent automatiquement et ils s'extirpèrent du véhicule non sans soulagement.
Lykandré laissa Komori se débrouiller avec Tonoshi et prit la tête du groupe. Comme d'habitude, et malgré le temps hivernal, la fenêtre de l'appartement de Bryan était ouverte. L'homme loup entra le premier et aida ensuite les autres. Il récupéra Tonoshi qu'il posa sur un des deux fauteuils, puis Méroé qu'il allongea sur le canapé.
– Nous sommes en sécurité maintenant, déclara Lykandré.
– Tu m'as sauvé une fois encore, murmura l'andromorphe aux cheveux de neige d'une voix faible avant de perdre connaissance.
Chveuil, Inuyume et Komori qui avaient également pénétré à l'intérieur, s'approchèrent de Lykandré.
– Où le propriétaire des lieux, loulou ? Tu es sûr que nous sommes les bienvenus ici ?
Blacky serait-il ravi de voir cette invasion de son appartement quand il reviendrait de sa promenade nocturne ? C'était peu probable.
– Il devrait bientôt être de retour, c'est un ami, déclara l'homme loup, esquivant les questions.
– Qu'est-ce qu'on fait pour Méroé et sa blessure ? demanda Inuyume.
Lykandré n'en avait pas la moindre idée et était d'ailleurs bien ennuyé. Il espérait que Blacky saurait quoi faire.
– Hé, vampirou, tu t'y connais en soins ?
Maître Komori qui s'était accroupi près de Tonoshi répondit par un simple non qui agaça Chveuil.
– C'est qui, à la fin, ce type !? s'exclama-t-il.
– Une longue histoire, mais pour faire bref, c'est un épurateur qui m'a laissé partir, il y a six années de cela alors qu'il aurait dû me tuer. Je lui avais promis de ne plus croiser son chemin, mais...
L'homme chauve-souris s'interrompit de lui-même. Toute l'affaire semblait horriblement complexe, ce qui n'empêchait pas que la présence d'un épurateur parmi eux n'avait rien d'une bonne nouvelle. Avant qu'ils ne pussent réagir et poser d'autres questions à maître Komori, une forme noire bondit dans le salon. Blacky avait regagné son logis.
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Pour cause de microbes, prochain épisode lundi 14 novembre

mardi 8 novembre 2011

Lykandré - 103

Quand Lykandré arriva à sa hauteur, il fut soulagé de constater que l'andromorphe aux cheveux de neige n'était pas mort Il avait toutefois été touché et du sang maculait sa jambe de pantalon, expliquant sa chute brutale.
– Mets toa surr moa, grogna le loup.
Méroé, l'air hagard, se redressa, se hissa tant bien que mal sur le dos de Lykandré et referma ses bras autour de son cou. Un projectile passa en sifflant tout près et le loup força l'allure afin de les mettre au plus vite à l'abri.
Une fois arrivés auprès d'Inuyume et Chveuil, il y eut un moment de flottement. Ils ne pouvaient pas rester là, car des épurateurs ou des andromorphes risquaient de venir les y chercher et en même temps, sans maître Komori, la ville était un véritable labyrinthe où ils avaient toutes les chances de s'égarer.
Le retour de l'homme chauve-souris abrégea leur dilemme. Maître Komori, d'une façon ou d'une autre, s'était débrouillé pour quitter la mêlée avec un fardeau sur son épaule - un humain brun qui saignait à la tempe et qui avait perdu connaissance. Personne ne demanda son identité. L'heure n'était pas aux questions. Sans avoir besoin de se concerter, ils s'éloignèrent du combat qui faisait rage.
Deux rues plus loin, dans un coin sombre, Komori prit la parole d'un ton essoufflé :
– Tu ferais mieux de te transformer à nouveau, Lykandré. Comme ça, nous pourrons prendre un taxi et mettre le plus de distance possible entre nous et ses fous furieux. Tu n'auras qu'à enfiler le manteau de Tonoshi pour te protéger du froid et te rendre décent.
Après avoir éclairci le sens du mot taxi, le groupe suivit la suggestion de l'homme chauve-souris. Chveuil aida Méroé à descendre du dos du loup pendant que la femme chien déchirait le bas de sa robe pour panser la blessure de l'andromorphe aux cheveux de neige. Dans la foulée, Lykandré reprit forme humaine et revêtit le manteau que Komori venait tout juste d'ôter au mystérieux Tonoshi. Après cela, Inuyume et Chveuil assistèrent Méroé pour qu'il puisse marcher en s'appuyant sur eux tandis que Lykandré et Komori soutenaient l'homme brun. Cahin-caha, ils avancèrent ainsi jusqu'à ce qu'ils tombent sur un taxi libre qui veuille bien d'eux. Quand le chauffeur aux mains gantés de blanc demanda où ils voulaient aller, ce fut Lykandré qui répondit, donnant l'adresse de Blacky. Il ne voyait pas d'autre refuge possible. Pendant le trajet, ils restèrent tous silencieux. La présence du chauffeur les mettaient mal à l'aise. Chveuil qui s'était résigné à monter à l'avant avait clairement la plus mauvaise place. Lykandré, lui, était coincé entre Méroé et l'énigmatique Tonoshi et il puisait un réconfort certain à sentir contre sa cuisse celle de l'homme mouton. Il était vivant. Le seul vrai souci était que l'odeur de sang qui se dégageait des deux personnes qui l'entouraient, éveillait son appétit. Maître Komori semblait également y être sensible, car il passait sans cesse sa langue sur ses petites dents pointues.

lundi 7 novembre 2011

Lykandré - 102

Enfin, au coin d'une rue, maître Komori s'arrêta et attendit que l'homme loup et ses amis le rejoignent.
– Si mes souvenirs sont bons, une fois que nous aurons tourné, nous serons arrivés, annonça-t-il.
Lykandré voulut s'avancer, mais Komori le retint par le col de son pull.
– Nous ferons mieux de jeter un œil avant de nous montrer.
L'homme loup grogna. Cependant, il se contenta de se pencher en avant pour regarder comment les choses se présentaient. Des bâtiments gris se dressaient vers le ciel noir, éclairés par les lumières mourantes des lampadaires plantés dans le trottoir. Tout était calme. Il n'y avait pas un chat. Cependant, parmi les véhicules garés dans la rue, Lykandré reconnut un des camions du groupe Trott qui avait été utilisé pour se rendre chez M.Ritahoro.
– On dirait que rien n'a commencé. A moins bien sûr que tout ne soit déjà fini, déclara-t-il à ses compagnons.
– Ils attendent sûrement que les épurateurs sortent de leur réunion, répliqua Komori. Peut-être, pourrions-nous...
L'homme chauve-souris ne put terminer sa phrase, un groupe d'une quinzaine de personnes sortit d'un des bâtiments gris. Au même moment, les portières du camion s'ouvrirent avec brusquerie et une bande d'andromorphes armés jusqu'aux dents sautèrent à terre. En un instant, ce fut la pagaille la plus complète. Des cris et des coups de feu fusèrent. Lykandré repéra la tête blanche de Méroé au milieu des andromorphes sous leurs formes humaines. Comme quelques minutes plus tôt, il voulut s'élancer, mais cette fois, ce fut Chveuil qui l'en empêcha en l'attrapant par le bras.
– Loulou, ne sois pas idiot ! Les deux camps risquent de te tirer dessus !
C'était vrai, mais Lykandré  éprouva une intense frustration d'être une fois de plus contrarié dans ses projets. Il voulait intervenir et sauver Méroé en dépit du danger. Levant la tête, il hurla à la lune. Son cri animal venu du fond de son cœur déclencha chez lui une métamorphose incontrôlée qui réduisit ses vêtements en lambeaux. Les deux groupes qui se livraient bataille ne le virent pas, mais malgré le bruit ambiant, ils entendirent son hurlement et pendant un court instant, ils se figèrent. Sans rien demander à personne, Komori  profita de cette trêve temporaire pour foncer vers la zone de combat, croisant Méroé qui la quittait. Cependant, avant d'atteindre la sécurité du coin de la rue où se trouvaient le loup, Chveuil et Inuyume, il s'écroula sur le sol. Lykandré se précipita sur lui, sans plus écouter ce que lui disait le cheval écureuil.

vendredi 4 novembre 2011

Lykandré - 101

Avec ses habits et ses chaussures, courir debout n'était pas encore dans les cordes de Lykandré, mais quand il voulut se mettre à quatre pattes pour aller plus vite, maître Komori l'en dissuada. Dans ce quartier, à cette heure, il devait y avoir des épurateurs et ce comportement étrange ne passerait pas pour une simple excentricité à leurs yeux. L'homme loup se résigna à ce qu'ils se contentent de marcher à grandes enjambées, priant pour qu'ils arrivent malgré tout à temps.
Ce n'était que le début de la soirée et il fallait slalomer entre les nombreux passants, ce qui les ralentissaient un peu plus. Mais en tête, maître Komori avançait sans se décourager.
L'inquiétude de Lykandré allait en grandissant. Qu'est-ce qu'ils feraient s'ils arrivaient trop tard, si Méroé était déjà mort ? Repartiraient-ils dans l'autre sens, comme si l'andromorphe aux cheveux de neige n'avait jamais existé ? Rien que d'y penser donnait l'impression à l'homme loup d'avoir avalé une pierre.
Chveuil qui marchait à côté de lui, le tira de ses sinistres réflexions :
– Tu ne trouves pas ça louche, toi, le comportement du vampirou ?
– Un peu, mais je luis fais tout de même confiance. Après tout, rien ne l'obligeait à nous faire sortir.
– Certes, mais pourquoi veux-il aller s'interposer ?
Lykandré était obligé d'admettre qu'il était curieux pour quelqu'un qui changeait de couleurs quand il était question des épurateurs de foncer droit vers un de leurs lieux de réunions. Mais peut-être maître Komori avait-il sympathisé avec un ou une des andromorphes qui avaient été recrutés de force pour l'opération...
– Qu'elles que soient ses raisons, ce qui compte, c'est que grâce à lui, nous avons une chance de sauver Méroé.
– Toi et moumou, c'est le grand amour décidément ! Pour ma part, je n'ai guère envie d'aller me frotter à ces tueurs d'andromorphes...
– Moi non plus, enchérit Inuyume derrière eux.
– Vous n'y êtes pas obligés, vous pouvez attendre là, rétorqua Lykandré, tout en songeant que l'andromorphe cheval écureuil se trompait, que ce n'était pas par amour qu'il fonçait à la rescousse de Méroé, car il aurait agi de la même façon pour lui, Blacky, Inuyume, Colibri, Bang et Emmeline.
Ni Chveuil ni Inuyume ne répliquèrent. Ils continuèrent à marcher. Au fond, rester seuls dans la rue devait leur paraître tout aussi effrayant que de se frotter aux mystérieux épurateurs. Ils n'avaient après tout ni l'un ni l'autre jamais véritablement vécus à l'extérieur. Lykandré, lui, même s'il n'était pas familier avec la ville, avait au moins l'expérience de la vie en plein air.

jeudi 3 novembre 2011

Lykandré - 100

Lykandré s'apprêtait à lui rappeler qu'à part lui, ils ne volaient pas quand l'homme chauve-souris expliqua qu'il y avait un escalier de secours en cas d'incendie. Sans tarder Chveuil passa à son tour la fenêtre, Lykandré suivit et Inuyume, sans enthousiasme, les imita. Ils descendirent rapidement - l'homme loup était désormais familier avec les escaliers - et enfin maître Komori, tout en s'éloignant de l'immeuble du groupe Trott, raconta ce qu'il avait entendu.
– Je ne sais pas au juste ce qu'ils ont raconté aux andromorphes qu'ils ont arrachés à mon cours, mais d'après la conversation que j'ai surprise, il y a une demi-heure environ, ils les ont emmenés pour attaquer et massacrer des épurateurs, en commençant par le lieu de réunion le plus proche de l'immeuble du groupe Trott.
C'était pire que ce qu'avait pu imaginer Lykandré. Il avait toujours cru que M.Trott les enverraient tous au combat, mais il s'était bercé d'illusions. Le lion andromorphe était plus subtil que ça. Il préférait diviser ses forces, se garder des troupes fraîches tout en se débarrassant des plus faibles.
– Moumou fait parti de ceux qui ont été embrigadés, c'est ça ? Je me disais bien aussi que c'était bizarre que tu veuilles quitter l'immeuble sans lui, déclara Chveuil.
– Oui et  j'aurai dû me douter que c'est comme ça que cela se passerait quand M.Trott a exposé son fameux plan, répondit Lykandré.
Tout le monde se mit à parler en même temps, Chveuil et Inuyume s'offusquant qu'il ait gardé pour lui pareille information, maître Komori essayant de calmer le jeu. Lykandré, lui, se défendit à peine, car il se sentait coupable. Finalement, Chveuil reporta son énervement du loup à l'homme chauve-souris :
– Mais, vous le vampirou, de quoi vous mêlez-vous au juste ? Pourquoi nous faire sortir ? La pure bonté d'âme, ça n'existe pas !
– Je ne nie pas que je suis intéressé dans l'affaire. Mais mes motifs ne vous concernent pas. En tout les cas, nous ferions mieux d'accélérer le pas si nous voulons avoir une toute petite chance d'arriver avant que le massacre ait commencé.
– Mais qu'est-ce que nous pourrons y faire de toute manière ? intervint Inuyume d'une voix angoissée.
– Porter secours à Méroé ! s'exclama Lykandré.
Maître Komori avait l'air de savoir où aller. Quant à lui, il se rappelait des différentes options d'attaques des épurateurs. Explosifs, armes feu... Il ne restait plus qu'à espérer que la possibilité d'une mission suicide ait été écartée. En combinant leurs connaissances, ils pourraient peut-être réussir à éviter le désastre.
– Tu es vraiment trop attaché à ton casse-croûte, loulou, glissa Chveuil.
Cette remarque fit prendre conscience à Lykandré que s'il trouvait incompréhensible que Méroé puisse l'aimer, il était tout aussi absurde pour les autres qu'un loup veuille sauver la vie d'un mouton. La seule explication qu'il avait à donner, c'était qu'il ne considérait pas l'andromorphe aux cheveux de neige comme un morceau de viande sur pattes, mais comme un ami.

mercredi 2 novembre 2011

Lykandré - 99

Il hésitait à aller à la table d'Inuyume et Chveuil pour savoir si par hasard, ils n'auraient pas une idée de l'endroit où se trouvait Méroé quand maître Komori le rejoignit. L'homme chauve-souris était habillé, chose extrêmement rare puisqu'il passait ses journées à passer d'une forme à l'autre pour les besoins de son cours.
– Je te cherchais. Plusieurs de mes élèves ont été emmenés dans l'après-midi sans qu'on daigne m'expliquer pourquoi. Cependant, je viens de surprendre une conversation pour le moins éclairante à l'accueil... Bref, je suis désormais prêt à t'accompagner à l'extérieur.
L'attitude de maître Komori était étrange. Pourquoi venait-il lui raconter cela et lui faire cette proposition ? Un instant, Lykandré se demanda si c'était un genre de test, puis il décida que cela lui était égal.
– Est-ce qu'un mouton faisait parti de ceux qui ont été embarqués ?
– Oui. Maintenant, réponds-moi. Est-ce que tu veux aller dehors avec moi ou pas ? Sinon, j'irai seul.
La nervosité de maître Komori était palpable.
– Et votre promesse de rester enfermé ?
– Ce n'est pas exactement ça. Mais la question n'est pas là.
Lykandré comprit qu'il devait prendre une décision et vite. Maître Komori devait avoir appris quelque chose sur la disparition de Méroé et des autres et pour le savoir, être loin des caméras semblait préférable ou l'homme chauve-souris aurait déjà parlé. C'était par ailleurs l'occasion de quitter l'immeuble Trott.
– Est-ce que deux de mes amis peuvent venir avec nous ?
– Oui, mais qu'ils s'habillent et qu'ils fassent vite. Retrouvez-moi au premier étage devant l'ascenseur principal d'ici un quart d'heure.
Il n'y avait pas de temps à perdre. Lykandré fila  vers la table où Inuyume et Chveuil se restauraient.
– Maître Komori est prêt à nous amener dehors, mais on doit se dépêcher, car je crois bien que c'est maintenant ou jamais.
Sa déclaration de but en blanc obtint une réaction plus que mitigée. Lykandré dut batailler avec eux. Inuyume ne voulait pas sortir et risquer s'attirer les foudres des dirigeants du groupe. Quant à Chveuil, il faisait toujours la tête et ne voyait pas pourquoi il devait accompagner quelqu'un en qui il n'avait plus confiance. Néanmoins, il fut le premier à céder et à accepter. Il avait trop envie de sortir. Quant à Inuyume, elle suivit le mouvement sans trop de conviction.
Ils se séparèrent pour aller s'habiller, et gagnèrent ensuite le point de rendez-vous indiqué par Maître Komori.
L'homme chauve-souris était toujours très agité.  Il ne répondit ni aux questions de Chveuil ni à celles d'Inuyume, leur faisant juste signe de le suivre. Lykandré qui avait pensé qu'ils passeraient par la grande porte de l'accueil fut surpris de voir que ce n'était pas au programme. Ils montèrent jusqu'au dernier étage de l'immeuble, et là, maître Komori utilisa une clef pour ouvrir une des fenêtres qu'il enjamba.

mardi 1 novembre 2011

Lykandré - 98

L'andromorphe aux cheveux de neige tomba de tout son long sur le sol, le visage contre terre. Avec embarras, Lykandré constata que Méroé avait perdu connaissance sous la violence du choc. Il le retourna non sans une certaine rudesse et lui lécha le visage pour  lui faire reprendre ses esprits. Son ventre était plein, le mouton était sous sa forme humaine, mais l'odeur et le goût lui parurent alléchantes. Heureusement, l'homme mouton revint vite à lui et Lykandré put arrêter de lui donner des coups de langue.
– Tu ne mesures vraiment pas ta force, gémit Méroé en papillonnant des paupières.
– Désolé, mais tu allais encore t'enfuir sans me laisser dire le fond de ma pensée. Je ne suis pas du tout heureux de cette histoire d'accouplement forcé. Je veux choisir moi-même ma compagne...
– Tu veux bien ne pas rester comme ça au-dessus de moi, s'il-te-plaît, le coupa l'homme mouton d'une voix altérée.
Sa température corporelle avait augmentée et un rapide coup d'œil sur son entrejambe apprit à Lykandré que Méroé était excité. Il se déplaça.
– Je ferais vraiment mieux de te laisser.
Cette fois, Lykandré ne le retint pas. Il avait besoin de réfléchir. Il appréciait Méroé, mais l'aimer, ça, il ne savait pas. D'ailleurs, il n'avait jamais ressenti ce sentiment et il est vrai que jusqu'à il n'y a pas si longtemps ça, il n'aurait jamais pensé à prendre comme partenaire quelqu'un qui n'était pas de son espèce, et encore moins quelqu'un de sexe masculin. Mais depuis cette nuit fatidique où il avait surpris Danno en train de posséder Jun, tout avait changé. Il avait été arraché à son île et il avait découvert qu'il existait d'autres créatures comme lui, mais aussi des humains qui se transformaient en animaux, comme Blacky. Et petit à petit, il était obligé de réaliser que la sexualité, une chose qui lui avait toujours parue simple et naturelle, liée à une saison particulière, était une affaire complexe. Les humains ne s'accouplaient pas que dans un but reproductif. A tout moment, les andromorphes semblaient en mesure de coucher entre eux ou avec des humains et étaient même capables d'avoir des enfants. Chveuil en était la preuve vivante. Jun, aussi. Ainsi, la recherche du plaisir ou l'amour pouvaient pousser les êtres à s'unir au-delà de toute logique. Méroé n'aurait clairement pas dû avoir envie de s'accoupler avec quelqu'un comme lui qui l'aurait volontiers mangé s'il n'avait eu autre chose à se mettre sous la dent. Demain, il lui demanderait comment il pouvait être aussi certain de ce qu'il ressentait. Il voulait comprendre.
Seulement, après une journée peu passionnante à articuler péniblement des mots sous la tutelle de maître Maolo, Lykandré ne retrouva pas Méroé au réfectoire. Dans un premier temps, cela ne l'inquiéta pas. Après ce qui s'était passé hier soir, il n'était pas anormal que le mouton l'évite. Puis, il s'aperçut que la salle n'était aussi pleine que d'habitude et il commença à s'interroger sur l'absence de l'andromorphe aux cheveux de neige.