jeudi 30 juin 2011

Lykandré - 27

Bryan reprit :
– Bon, si tu n'as pas envie, c'est moi qui vais parler. Tu te rappelles que quand je suis arrivé pour vous sauver, j'ai exprimé... une certaine déception, pour être franc, si je me suis porté volontaire pour m'occuper de la mission de sauvetage, c'est parce que je pensais que le loup enfermé dans ce laboratoire était un garou du nom de Koro. Il a disparu il y a cinq mois et cinq jours et je suis à sa recherche depuis. Est-ce que par hasard, tu ne l'aurais pas vu ou entendu parler de lui ? C'est un loup blanc aux yeux noirs.
– Désolé, mais non. J'ai été capturé sur mon île et amené directement au laboratoire.
Bryan jura et donna un coup de poing dans le cousin du fauteuil dans lequel il s'était installé.
– Excuse-moi... Je suppose que maintenant je ferais mieux de localiser rapidement ton île. Toutefois, même si je la trouve vite, ce qui n'est pas garanti, je ne pourrais pas t'y ramener de suite car demain, je travaille. Oh, et promis, je t'achèterai de la viande en quantité astronomique dès demain.
Acheter ? Encore un concept étranger. Comme à son habitude, Lykandré ne releva pas. Cependant, il ne put retenir un accès de curiosité envers le loup au pelage blanc.
– Qui est Koro ?
Bryan se gratta l'arrière du crâne et se racla la gorge avant de répondre d'un ton gêné :
– Koro est mon compagnon. Nous vivions ensemble depuis trois ans avant sa mystérieuse disparition.
– J'espère que tu le retrouveras.
Lykandré était sincère en formulant ce souhait. Au cours de ses vingt années de vie, il avait assisté au chagrin d'un grand nombre de loups qui avait perdu leur moitié et ce spectacle l'avait toujours peiné.
– Cela ne te choque pas plus que ça que mon compagnon soit un homme ? Enfin, peut-être que comme tu es un loup, tu ne vois pas ce que ce que je veux dire...
Lykandré se souvint de Danno et Jun, revoyant le costaud pénétrer avec fièvre le corps du brun.
– Si, je comprends. Les humains sont bizarres, ils s'accouplent toute l'année sans souci reproductif.
Loin de se vexer de ce jugement, Bryan eut un petit rire amusé.
– Ce qui est sûr, c'est que si tu n'étais pas un andromorphe, tu ne continuerais pas à te balader les fesses nues devant moi sachant que je suis attiré par les hommes.
– Pourquoi ?
– Parce que c'est une incitation à, comme tu dis, « l'accouplement » !
Lykandré flaira l'air. Quoiqu'il en dise, le barbu n'était pas excité.
– Les humains ne sont pas fidèles au partenaire qu'ils se sont choisis ?
– Pas toujours, non.
Les créatures à deux pattes étaient déplorables, trancha Lykandré.

mercredi 29 juin 2011

Lykandré - 26

Quand Lykandré s'éveilla, il était encore sous sa forme humaine. En revanche, ce n'était plus un loup qui dormait à ses côtés, mais un homme barbu. Il avait une odeur différente de Blacky, mais pas complètement. A travers les volets, la lumière du soleil éclairait la pièce. Lykandré voulut se lever, mais en essayant de se dépêtrer de la couverture, il provoqua le réveil du barbu. Bryan Schwartz dit Blacky bailla à s'en décrocher la mâchoire, s'étira, le salua, puis se mit debout. C'était un homme grand, musclé et très poilu, mais à côté de la taille qu'il faisait quand il était un loup, il n'était pas très impressionnant. Tranquillement, comme s'il l'avait l'habitude de partager son lit, Bryan attrapa un paquet de vêtements sur une chaise, annonça qu'il allait prendre une douche et quitta la chambre.
Lykandré grogna. Au laboratoire, il avait eu le droit à deux douches et avait trouvé ça horrible. Il espéra que Blacky ne le forcerait pas à prendre une. Il sortit du lit, et à quatre pattes, fit un rapide tour de son nouvel environnement, se gardant bien sûr d'approcher de la pièce d'où provenait le bruit d'eau. Les murs étaient blancs comme au laboratoire, mais les meubles et objets qui remplissaient l'espace ressemblait à l'intérieur de la cabane du vieil Atsuhiro en plus désordonné : des livres, des disques, des sièges, des tables de hauteurs différentes et tout un tas de choses dont Lykandré aurait été bien en peine de savoir à quoi cela servait au juste.
– Tu visites tout seul ?
Lykandré fit volte-face. Le barbu avait enfilé un t-shirt et un jeans. Sa tignasse noir était humide.
– Oui.
– Tu veux te doucher, toi aussi ?
– Non, s'écria vivement Lykandré.
– Tu ne sens pas la rose pourtant. Cela te ferait du bien. Je te passerai des habits. Même s'il ne fait pas froid dans l'appartement, c'est dérangeant de te voir te balader à poils toute la journée. C'est déjà assez perturbant comme ça que tu te promènes à quatre pattes.
– Je n'en ai pas besoin. Je ne vais pas rester sous cette forme.
Bryan soupira, mais ne se fâcha pas contre l'homme loup. Lykandré fut agréablement surpris. Il s'était attendu à ce qu'il ne lui donne pas le choix, comme au laboratoire.
– Manger, ça te dit ?
– Oui.
Dans la pièce qui s'appelait cuisine, il y eut de nouveaux problèmes. Bryan voulut qu'il s'assoit à table, mais Lykandré refusa. Le barbu posa donc par terre un bol plein de liquide blanc avec des morceaux bruns qui flottaient dedans, mais l'homme loup après en avoir lapé un peu, le repoussa, trouvant ça peu appétissant. Bryan, après quelques autres propositions qui n'eurent pas plus de succès, finit par lui donner des tranches de jambon que Lykandré avala goulument.
Le repas finit, ils quittèrent la cuisine pour le salon où Bryan déclara :
– J'aurais une ou deux questions à te poser...
Lykandré fronça les sourcils et grogna. Il en avait assez de devoir répondre à des interrogatoires. Il avait eu sa dose au laboratoire.

mardi 28 juin 2011

Lykandré - 25

Pyjama ? Sofa ? Lykandré ne savait pas exactement à quoi cela correspondait au juste. En revanche, il avait déjà vu un lit chez le vieil Atsuhiro et il trouvait de toute façon plus réconfortant de rester près de l'énorme loup dont la senteur ne lui était pas étrangère.
– Le lit, c'est bien.
– Très bon choix... déclara Blacky en se dirigeant vers une porte blanche entrebâillée.
A mi-parcours, il s'arrêta brusquement.
– Même si je garde la visite pour demain, je ferais mieux de t'indiquer où sont les toilettes au cas où tu aurais besoin de soulager ta vessie.
Blacky le conduisit à une minuscule pièce carrelée dans laquelle il y avait un drôle de siège percé.
Lykandré n'avait jamais vu ça et il se voyait mal faire ses besoins là-dedans. Les humains étaient vraiment compliqués.
– Tu sais t'en servir, n'est-ce pas ? demanda Blacky.
– Non.
– C'est pas vrai ! Comment vous faisiez au laboratoire !?... Non, ne me dis pas. Je ne veux pas savoir. Bon, je t'expliquerai en détails le fonctionnement demain. En attendant, si t'as des besoins pressants, c'est ici. Compris ?
Lykandré acquiesça et Blacky en grommelant, le guida cette fois dans la chambre où trônait un lit immense. Le loup noir tira avec ses dents sur ce qui le recouvrait, puis sauta sur le matelas sur lequel il s'allongea confortablement. D'un bond, Lykandré le rejoignit et vint se pelotonner contre lui pour récupérer un peu de sa chaleur.
– Qu'est-ce tu fais ? gronda Blacky. Rabats donc la couette au lieu de jouer à collé-serré.
Ne comprenant une fois de plus pas tout à ce que disait son interlocuteur, Lykandré s'éloigna et se roula en boule. Il avait hâte de reprendre sa forme originelle et d'être à nouveau en territoire connu, dans son île.
Blacky pesta et l'homme loup sentit quelque chose tomber sur lui. Inquiet, il se redressa, mais se rasséréna en constatant que Blacky était également sous l'étrange matière molletonnée.
– Tu n'en as jamais vu ? demanda Blacky avec étonnement. C'est une couverture pour ne pas avoir froid quand on dort, expliqua-t-il avant de fermer les paupières.

Lykandré garda encore un moment ses yeux orangés fixés sur le grand loup noir, malaxant le bord de la couette entre ses mains, puis trouva le sommeil à son tour.

lundi 27 juin 2011

Lykandré - 24

L'air féroce qu'il prit en prononçant ses mots intimida leur interlocutrice.
– Très bien. Faîtes comme vous voulez, déclara-t-elle. Mais ne revenez pas ici, si vous avez un problème, ajouta-t-elle d'une voix aigüe.
– C'est noté, répondit Blacky.
Il se tourna ensuite vers Emmeline qui était enveloppée dans les ailes de Colibri pour lui demander si elle était d'accord pour les déposer chez lui.
– Bien sûr. Plus rien ne nous retient ici, si ce n'est que Colibri voulait s'assurer que ses camarades étaient dans de bonnes mains avant de partir.
– Elle n'est pas très aimable, commenta alors l'homme perroquet en penchant la tête sur le côté pour désigner la femme qui s'occupait du refuge.
Cette dernière devint rouge de colère et se redressant de toute sa hauteur, elle s'écria :
– Un peu de gratitude pour les gens qui vous ont sauvé, cela vous étoufferait ?!
– C'est Bryan et ma maîtresse qui nous ont libéré, objecta tranquillement Colibri.
Bang aboya pour approuver. Emmeline s'empressa d'arranger la situation qui s'envenimait à vue d'œil.
– Écoute, elle est fatiguée, alors sois gentil. Il est près de quatre heures du matin. Elle a veillé toute la nuit, se faisant d'un sang d'encre pour vous.
Une transformation intempestive évita Colibri d'avoir à répondre. Une fois sa forme animale retrouvée, faisant comme si de rien n'était, il se posa sur l'épaule d'Emmeline et caqueta :
– On rentre à la maison maintenant ?
Sa maîtresse secoua la tête devant l'impolitesse du perroquet, puis adressa un sourire d'excuse à la femme du refuge avant de déclarer :
– Bien sûr. Mais je te rappelle que c'est toi qui a voulu rester pour vérifier.
– J'ai cru comprendre que tu lui faisais confiance, alors moi aussi, piailla Colibri.
Après avoir dit au revoir aux andromorphes qui restaient au refuge, Lykandré, Colibri, Emmeline et Blacky prirent le chemin de la sortie. Dans leurs dos, ils entendirent Bang aboyer tristement. Lykandré se retourna, jetant un dernier regard au labrador au poil doré. Il espérait sincèrement que la femme du refuge les traiterait bien lui et Inuyume.
Une fois dehors, Emmeline les guida vers un engin à quatre roues de plus petite taille que celui dans lequel elle les avait emmenés au refuge. Comme s'il avait deviné la perplexité de Lykandré, Blacky expliqua que la camionnette de tout à l'heure appartenait au refuge et qu'il s'agissait de la voiture personnelle de la jeune femme. Blacky grimpa sur la banquette arrière tandis que conseillé par Colibri, Lykandré s'installait à l'avant, à côté d'Emmeline.
L'homme loup refusa toutefois de mettre la ceinture comme lui recommandait le perroquet. Cela lui faisait trop penser au fauteuil à lanières sur laquelle on l'avait souvent obligé à s'asseoir au laboratoire. Le perroquet n'insista pas et sa maîtresse qui venait s'enclencher sa propre ceinture, fit démarrer le véhicule.
Durant le trajet, Lykandré regarda avec fascination les habitations humaines défiler devant ses yeux, indifférent aux bavardages de Colibri et aux indications que donnaient Blacky à Emmeline.
Il fut presque déçu quand le véhicule s'arrêta devant un immense immeuble. Emmeline fit descendre Lykandré qui ne savait pas comment sortir de l'engin, puis ouvrit à Blacky qui aurait eu dû mal à ouvrir la portière avec ses pattes. Ensuite, le perroquet et sa maîtresse repartirent, laissant Lykandré et Blacky sur le trottoir.
– Suis-moi. Il faut faire le tour. Je laisse la fenêtre qui donne sur le jardinet ouverte, comme ça, je peux rentrer tranquillement sans clef et sans galérer avec les codes et les poignées de portes.
Des clefs, des codes ? Qu'est-ce que c'était donc encore ? Lykandré frissonna, regrettant l'absence de sa fourrure et accompagna Blacky. Cependant, quand il bondit pour passer par la fenêtre, gêné par sa forme humaine, il atterrit moins gracieusement que le loup noir.
– Je te ferai visiter demain. Pour l'heure, je meurs d'envie de dormir.
Lykandré n'était pas fatigué, juste désorienté. Le logement de Blacky ne ressemblait à aucun des trois intérieurs humains dans lequel il avait été. Pas d'éclairage artificiel, juste la clarté de la lune. Pas d'odeur agressive, mais un arôme agréable, pas de sol froid et râpeux contre les mains et les genoux, mais une surface douce et moelleuse comme de la mousse.
– Même quand tu peux parler, tu n'es pas bavard, commenta Blacky.
– Je n'ai rien à dire, répondit Lykandré, tout en continuant à flairer l'air.
– Pour dormir, j'ai un lit à deux places qu'on peut partager, mais si tu préfères, tu peux t'installer sur le sofa. Je te passerai une couverture et même un pyjama, si tu veux. Quoique avec ta queue touffue qui dépasse, ça risque de ne pas être possible...

vendredi 24 juin 2011

Lykandré - 23

Lykandré l'ignora et continua à avancer. Blacky le dépassa alors et lui barra le chemin. Les poils de Lykandré se hérissèrent. Si Blacky l'empêchait de partir, alors il le combattrait, et ce, même si son instinct lui disait qu'il ne pouvait pas l'emporter contre l'énorme loup.
– J'aimerai discuter avec toi. Je ne cherche pas la bagarre. Si tu ne veux pas rester au refuge, que dirais-tu de venir chez moi ?
Lykandré continua de grogner d'un ton menaçant, mais sa queue s'abaissa. Il avait beau savoir que Blacky était en réalité un homme, il était facile de le considérer comme un de ses congénères et il devait bien avouer qu'il ne savait pas où aller. Les constructions humaines en béton, les engins sur roues, les odeurs désagréables... Tout autour de lui, lui était étranger. Même le ciel étoilé au-dessus de se tête était différent de celui qu'il connaissait. Il avait beau être dehors, la nature était absente.
– Si tu es d'accord, viens, je vais négocier ça avec la miss ronchon.
Alors que Lykandré hésitait, ses poils tombèrent d'un coup comme soufflés par le vent et son museau se mit à diminuer. En un instant, il fut humain, gardant toutefois sa queue touffue et ses oreilles pointues.
– Tu es vraiment un andromorphe... Alors, que penses-tu de ma proposition ?
– Pourquoi m'invites-tu ?
Les yeux verts de Blacky pétillèrent.
– Question légitime. Disons que c'est parce que l'on se ressemble.
– Je préfèrerais rentrer chez moi, dans l'île Inukotou.
– Je comprends, mais comme je l'ai déjà dit dans la camionnette, cela me semble de la folie. Toutefois, si tu insistes, je t'aiderai à y retourner. Il faudrait juste faire des recherches afin de la localiser.
– Dans ces conditions, je suis d'accord.
Blacky agita joyeusement la queue.
– Parfait. Par contre, ne dis pas surtout pas à la bonne femme de tout à l'heure que j'ai promis de te ramener dans ton île, car elle ne te laisserait jamais partir.
Lykandré acquiesça. Blacky prit alors le chemin refuge, l'homme loup à ses côtés. 
Durant leur échange, les autres étaient entrés à l'intérieur. Cependant, les rejoindre fut l'affaire d'un instant. La femme qui avait disputé Blacky était en train d'expliquer le fonctionnement du refuge. En les voyant, elle interrompit ses explications pour leur faire des reproches :
– Pour quelle raison traîniez-vous ? Je n'ai pas que ça à faire de répéter les règles du centre.
– Pas de soucis, tu peux continuer sans lui, je l'emmène chez moi, répliqua Blacky sans broncher.
– Quoi ?! Mais tu ne peux pas. Pas comme ça. Je dois établir sa fiche d'identité et tu es dans l'obligation de remplir un dossier de famille d'accueil.
L'attitude de la femme déplut à Lykandré. Elle faisait comme s'il n'était pas là.
– Je ne vois pas pourquoi quiconque est forcé à quoique ce soit. J'ai décidé que j'irai chez Blacky, intervint-il.

jeudi 23 juin 2011

Lykandré - 22

Des hommes prenant des formes animales... Depuis qu'il avait été arraché à son île, Lykandré avait pris conscience qu'un grand nombre de choses qui lui étaient inconnues, mais l'information le choqua. Et pourtant, puisqu'il existait des animaux qui prenaient le visage des humains, pourquoi l'inverse aurait été du domaine de l'impossible ? A sa surprise, se mêla de la déception. Il avait jusque là espéré que le grand loup noir aux yeux verts soit un loup andromorphe, comme lui.
Durant le trajet jusqu'au refuge, Blacky répondit aux questions des andromorphes, les rassurant sur ce qui les attendaient. Cependant, même en sachant qu'ils jouiraient au refuge d'une liberté relative et qu'ils ne subiraient aucun test ou examen d'aucune sorte, Lykandré n'était pas satisfait. Il souhaitait regagner son île et reprendre le fil de sa vie sans histoire. A l'arrière de la camionnette, Colibri était le plus joyeux. Il était finalement réuni avec sa maîtresse. D'après Blacky, cette dernière s'était impliquée dans l'association de protection envers les animaux dans l'unique but de récupérer le perroquet qui lui avait été enlevé. Hélas, il avait été très difficile de retrouver sa trace. Et ensuite, il avait fallu mettre en place toute l'opération de libération, ce qui avait été non sans mal. Avoir des informations sur la structure des lieux avait été très délicat. La fumée qu'ils avaient vu et senti avait été produite dans un but de diversion. Il n'y avait en fait jamais eu le plus petit début d'incendie au laboratoire. Tout avait été orchestré avec soin et la mission avait été couronné de succès. Toutefois, Lykandré sentait que Blacky n'en éprouvait pas de plaisir particulier.
Quand enfin ils purent descendre de la camionnette, ils furent accueillis par Emmeline ainsi qu'une autre femme. Colibri s'empressa d'envelopper sa maîtresse dans ses ailes, donnant libre cours à son bonheur.
– Blacky, tu as sauvé tous les animaux ? demanda la femme inconnue.
– Seulement ceux qui ont bien voulu me suivre.
– Quoi ! Et pourquoi ça ? Tu aurais dû les obliger à venir avec toi !
– Oui, et comme ça, le temps de les convaincre, nous serions tous restés prisonniers.
– Tu aurais pu faire un effort tout de même. Avec ce que cela nous a coûté...
– Et si tu t'occupais d'eux au lieu de me couvrir de reproches ?
Lykandré, peu inspiré par le bâtiment gris qui se dressait devant eux, commença alors à s'éloigner. Immédiatement, le loup noir l'interpella :
– Où vas-tu ?

mercredi 22 juin 2011

Lykandré - 21

Sans discuter, ladite Emmeline ouvrit les portes arrière de l'engin et le loup noir les incita à grimper dedans. Cela ne disait rien à Lykandré, mais désireux de s'éloigner le plus possible du laboratoire, il sauta à l'intérieur, juste derrière l'énorme loup. Quand tout le monde fut à bord, la maîtresse de Colibri referma les portières. Il y eut un silence, puis un grondement et enfin un ronronnement. Lykandré reconnut que c'était le même type d'engin qui l'avait amené au laboratoire et il en conçut une vive inquiétude. Il grogna.
– J'ai peur, gémit Inuyume, comme en écho à la plainte de Lykandré.
Bang aboya. Lui non plus n'aimait pas ça. Il était entré dans la camionnette avec réticence.
– Ne vous inquiétez pas, c'est ma maîtresse qui conduit, déclara Colibri.
Zack qui était resté muet jusque là malgré sa transformation, intervint  alors d'un ton froid :
– Vous ne pensez pas qu'il serait temps de vous présenter et de nous donner quelques explications ?
Les yeux verts du grand loup noir dans l'obscurité de l'arrière de la camionnette étincelèrent.
– Exact. Surtout que le voyage jusqu'au refuge va durer trois heures... Mais je mets la charrue avant les bœufs. Je m'appelle Bryan Schwartz, dit Blacky. Désolé de vous enfermer si tôt après vous avoir libéré, mais il n'y a pas trente six manières de voyager discrètement.
– Le refuge ? répéta Inuyume d'une voix interrogatrice.
– C'est une place tenue par des garous. Il s'agit d'un centre de protection des animaux. Vous serez accueillis là-bas le temps qu'on retrouve vos maîtres ou que vous soyez adoptés.
– Je veux juste retrouver ma liberté, protesta Zack.
Moi aussi, songea Lykandré, déçu de la tournure que prenait la situation.
– On ne peut pas vous lâcher dans la nature comme ça, il y a toutes les chances que vous vous fassiez capturer à nouveau, surtout si on vous ramène à l'endroit où vous avez été attrapé la première fois, expliqua Blacky.
– Mais... commença Zack.
– C'est quoi, des garous ? l'interrompit Colibri.
– Il n'y en a pas parmi vous ?! Je pensais que votre ami loup ici présent en était un. Mais à la réflexion, il est vrai qu'il n'a pas dit un mot depuis notre rencontre... Bref, je m'égare. Les garous sont des hommes qui se transforment en animaux sous l'influence de la lune. Je suis un loup-garou et les gens qui gèrent le refuge sont des rat-garous. Vous serez bien traités là-bas, vous verrez.

mardi 21 juin 2011

Lykandré - 20

Il hésitait à poursuivre sa fuite dans les égouts, quand le grand loup noir réapparut,  dégringolant l'échelle.
– Tu n'y arrives pas ? Ressaie, je vais t'aider.
Lykandré tenta à nouveau sa chance, et glissa lamentablement. Le loup noir lui montra une fois de plus comment faire, puis se plaça juste derrière lui, l'empêchant de retomber quand il dérapait. Péniblement, ils atteignirent le haut de l'échelle et se retrouvèrent dehors dans une allée sombre qui ne sentait guère meilleure que les égouts, mais au moins, ils étaient à l'air libre. La vue de la lune entre deux bâtiments remplit Kykandré de joie. Il était enfin dehors.
Leurs compagnons les attendaient. Colibri avait pris sa forme humaine. Cependant, en guise de bras, il avait deux grandes ailes bleues. Zack s'était également transformé, et ayant gardé sa capacité à changer de couleur, il se fondait dans le décor. Inuyume, toujours en femme, s'était accroupie et se collait à Bang.
– Que fait-on maintenant ? souffla-t-elle d'un ton effrayée.
– On a un petite trotte à faire pour arriver à la camionnette qui nous mènera en lieu sûr. J'ai laissé ici quelques affaires. Normalement, à cette heure-ci, on ne devrait croiser personne, mais mieux vaut être prudent.
En disant ses mots, le loup noir renversa une poubelle sur le sol et récupéra dans les ordures un sac plastique qui ne payait pas de mine qu'il envoya en direction de Inuyume. La femme chien l'ouvrit timidement et en sortit un manteau, deux capes et trois laisses.
– Je ne savais pas exactement combien vous seriez et sous quelles formes. Avec ça, on devrait tout de même pouvoir faire illusion.
Sur les directives du grand loup, Inuyume enfila le manteau, drapa Colibri dans une des capes et mit les deux loups et Bang en laisse. Cette entrave déplaisait à Lykandré, mais il s'y résigna, comprenant que cela ne serait que très temporaire.
Ainsi équipés, ils quittèrent l'allée et s'engagèrent dans la rue éclairée par des lampadaires. Comme l'avait prévu le loup noir, elle était déserte. En silence, leurs pieds nus et leurs pattes ne faisant pas de bruit sur le trottoir en béton, ils avancèrent d'un pas rapide. Le loup noir forçait leur allure en tirant sur la laisse que tenait Inuyume qui marchait debout non sans difficulté.
Finalement, leur guide gratta à la portière d'un des engins montés sur roues. Une femme aux longs cheveux châtains en descendit et Colibri poussa un cri étranglé.
– Maîtresse !
Ses ailes s'ouvrirent en grand et sa cape glissa sur le trottoir. La femme lui adressa un éblouissant sourire.
– Mon joli Colibri, murmura-t-elle.
– Emmeline, on a pas le temps pour les effusions. Fais nous monter, coupa le loup noir.

lundi 20 juin 2011

Lykandré - 19

– Qui es-tu ? demanda Inuyume.
– Pas le temps pour les présentations ! Sachez juste que je suis là pour vous libérer, répliqua le loup noir.
Là-dessus, il s'attaqua successivement aux systèmes de fermeture des différentes cages tandis que l'alarme stridente continuait de sonner et que la fumée s'épaississait.
Il venait tout juste d'ouvrir les cages de Bang et Colibri quand deux hommes en blouses arrivèrent. D'un puissant coup de pattes, avec une aisance incroyable, l'énorme loup les mit hors d'état de nuire. Après cette interruption, il reprit immédiatement son travail de libération, massacrant les portes grillagées les unes après les autres avec rapidité et efficacité.
Puis, les invitant à le suivre, le loup noir quitta ensuite le dortoir par la grande porte. Si Lykandré, Bang et Colibri n'hésitèrent pas, Koki, Hana et Zéro préfèrent partir par la trappe qui menaient à la chambre des tests. Inuyume et Zack, avec un temps de retard, choisirent de faire confiance au grand loup noir.
Le couloir était également rempli de fumée et il était difficile de respirer. C'était désagréable, mais pour quitter le laboratoire, Lykandré était prêt à tout.
Toujours sur les traces du mystérieux loup noir, ils descendirent des escaliers, et finirent par déboucher dans des égouts où la fumée avait perdu sa densité. L'odeur était en revanche pestilentielle et Colibri dont l'odorat n'était pourtant pas le plus développé s'en plaignit. Inuyume, elle, demanda où est-ce qu'ils étaient amenés, mais le loup noir se contenta de leur dire d'avancer plus vite s'ils ne voulaient pas être rattrapés par les gars du laboratoire.
Près d'une heure après être descendus dans les égouts, leur guide s'arrêta devant une échelle métallique qui remontait à la surface.
– Essayez de m'imiter pour grimper, déclara-t-il.
Se dressant sur ses larges pattes, il commença à monter avec lenteur. Inuyume avantagée par ses mains humaines fut la première à le suivre. Colibri, lui, le devança en s'envolant vers le haut. Zack se mit à sauter de barreaux en barreaux. Bang, après une ou deux tentatives maladroites, réussit à prendre le coup de main. Lykandré, lui, même en s'y reprenant à plusieurs reprises, ne parvint pas à dépasser le deuxième barreau. Avec envie, il regarda ses compagnons disparaître les uns après les autres.

vendredi 17 juin 2011

Lykandré - 18

– Cela ne t'excite pas quand tu vois ses seins nus et ses courbes féminines ?
– Non.
– Et les fesses de Bang, qu'en penses-tu ?
– Rien.
– Ni l'un ni l'autre n'éveille ton désir ?
– Non.
Cependant, à choisir, il préférait Bang à Inuyume. Il trouvait la chienne trop timorée. Et, en même temps, le labrador était pénible à toujours parler de son maître. A l'entendre, il n'y avait pas personne plus belle, plus aimable et plus gentille dans le monde. 
– Et Colibri, est-ce qu'il t'attire ?
– Non.
Qu'est-ce que Goëric cherchait à savoir avec ses questions ? Cela dépassait l'entendement de Lykandré. A dire vrai, tout les tests qu'on lui faisait passer, étaient pour lui ridicules. Ne pouvait-on pas les laisser vivre en paix ? Chasser, manger, dormir, jouer, ça, c'était la vraie vie.
L'interrogatoire dut se terminer là, car Lykandré se mit à reprendre sa forme animale.
– Nous continuerons la prochaine fois, annonça Goëric, en lui indiquant de prendre le chemin du dortoir.
Le loup regagna sa cage en trainant les pattes. Il se sentait dépérir dans cette univers confiné. Il mâchonna sans enthousiasme le quartier de viande froide qui avait été placé dans sa cage et se coucha.
Désormais habitué aux allées et venues dans le dortoir, il ne réagissait plus à ces dernières, restant paisiblement allongé.
Cependant, alors qu'il sommeillait depuis  quelques heures, une alarme stridente le força à se réveiller. Il se redressa, tous les sens en alerte. Dans leurs cages, les autres animaux s'agitèrent également.
– Qu'est-ce que c'est que ça ? Un nouveau test ?  criailla Colibri en remuant furieusement les ailes.
Inuyume qui venait de se métamorphoser, lui répondit :
– Non, c'est l'alarme à incendie. On devrait venir nous ouvrir.
Cependant, de la fumée s'engouffra dans la pièce, sans qu'aucun laborantin ne débarque. Bang se mit à aboyer furieusement, se jetant contre le grillage de sa prison, dans un effort désespéré d'en sortir. Alors que Lykandré s'apprêtait à faire de même, un énorme loup noir aux yeux verts déboula dans le dortoir par la porte utilisée en temps habituel par les hommes en blouse. Leurs regards se croisèrent et Lykandré se figea. 
– Zut ! grogna le loup noir.
– Oh ! Un animal qui peut parler comme moi ! caqueta Colibri.

jeudi 16 juin 2011

Lykandré - 17

Deux semaines après son arrivée au laboratoire, Lykandré ne parvenait toujours pas à s'acclimater à sa nouvelle vie. Le jardin, malgré ses manquements, lui apportait un peu de réconfort et il trouvait les brefs séquences en salles de classe pas inintéressantes, mais les tests et sa cage au dortoir lui pesaient. Son île lui manquait. Il avait beau être bien nourri, il aurait préféré chasser sa pitance, sentir le vent quand il courait, voir le ciel ensoleillé au-dessus de sa tête au lieu de ses ampoules qui diffusaient une lumière détestable.
Il s'était lié d'amitié avec Colibri, le perroquet bavard, Bang, le rebelle et la douce Inuyume, mais n'avait que peu d'échanges avec les autres. Koki était trop proche des hommes et ses couinements l'insupportait. Zack et Zéro étaient tout simplement trop différents de lui. La fourmi était particulièrement étrange. Privée de ses congénères, elle semblait devenue à moitié folle. Quant à Hana, la chatte, elle le snobait.
Du côté des laborantins, Goëric était sa bête noire. Durant les tests, l'homme blond à lunettes prenait un malin plaisir à le pousser à faire des faux pas.  D'ailleurs, Lykandré avait remarqué que Goëric se portait toujours volontaire pour administrer les corrections aux andromorphes désobéissants. Deux jours plus tôt, alors que Lykandré avait frappé un laborantin qui lui avait tiré sur la queue d'un coup sec, sans prévenir, c'était Goëric qui s'était chargé d'emmener l'homme loup en la salle des punitions, lui faisant goûter à nouveau au supplice de la boîte. Cependant, même après plusieurs heures d'enfermement, il n'y avait cette fois pas eu de métamorphose et Goëric avait fini par le libérer et le ramener dans la chambre des tests.
Il ne semblait pas y avoir de fins aux expériences que les hommes voulaient pratiquer sur eux. Des tests d'intelligence, des exercices physiques, des examens corporels, des questions à n'en plus finir... Chaque jour se déroulait de façon différente et pourtant identique.
– Il est regrettable que tu aies encore fait des tiennes aujourd'hui. Je suppose que ce sera Bang qui profitera de la période de chaleur de Inuyume qui devrait bientôt commencer. A l'origine, nous n'avions guère de questions à nous poser, mais ta venue nous donne du choix... Ceci dit, avec ton attitude déplorable, tu viens peut-être de laisser passer une chance unique de découvrir enfin les joies de l'accouplement, car d'après ce que tu m'as rapporté, comme tu n'as jamais été alpha sur ton île, tu es toujours puceau. N'es-tu pas déçu ?
Puceau... Le sens de certains mots employés par les humains échappait à Lykandré, mais il gardait ses interrogations pour lui. Cela lui déplaisait d'afficher son ignorance et il n'avait pas envie de se faire rabrouer. Toujours est-il que cela lui était égal de s'accoupler ou non avec Inuyume. Pour lui, la saison des amours était passée.
– Réponds à la question, reprit Goëric d'un ton impérieux.
– Je m'en moque, grommela Lykandré.

mercredi 15 juin 2011

Lykandré - 16

Dans les jours qui suivirent, le loup fut sage. Il se laissa tâter sous toutes les coutures et fit tout ce qu'on lui demandait sans poser de questions, supportant tout en serrant les dents pour se retenir de mordre les laborantins. Sa bonne volonté fut récompensée par une autorisation à se rendre au jardin où il put enfin faire mieux connaissance avec les autres andromorphes. Ils étaient en effet tous présents, majoritairement sous leur forme humaine, ce qui n'avait pas l'air d'être un hasard.  En effet, leurs interactions comme tout ce qu'ils faisaient, semblaient être un sujet d'étude pour les humains du laboratoire.
Lors de cette première séance au jardin, Lykandré apprit non sans étonnement que tous ses compagnons d'infortunes n'avaient pas été trouvés et capturés comme lui. Seuls Zack le caméléon et Zéro la fourmi étaient dans ce cas. Inuyume et Koki avaient été pour leur part vendus en bonne et due forme tandis que Bang et Colibri avaient été arrachés à leurs propriétaires respectifs qui avaient refusés les offres d'achat.
Bang était un chien d'aveugle, un labrador fidèle qui était malheureux d'avoir été séparé de son maître. Il se révoltait fréquemment contre ses geôliers, ce qui lui avait valu de nombreux coups et de multiples séjours dans salle des punitions. Colibri était également triste sans sa maîtresse, mais il était prisonnier au laboratoire depuis bientôt un an et s'était résigné à sa situation. L'affection que le labrador et le perroquet ressentaient pour des humains qui prétendaient les posséder, dépassait Lykandré. Il ne voyait pas en quoi c'était si différent des hommes du laboratoire. Colibri et Bang furent indignés qu'il puisse trouver cela comparable et s'efforcèrent chacun de lui expliquer en quoi il se trompait.
– Il a besoin de moi. Je suis ses yeux. Il m'aime, affirma Bang.
– Elle me laissait libre dans sa maison et je pouvais faire ce que je voulais au lieu de subir des tests idiots, piailla Colibri.
Ils argumentèrent tant et si bien que Lykandré finit par leur accorder gain de cause : peut-être que leurs propriétaires étaient des cas à part... En tout cas, la maîtresse d'Inuyume s'était débarrassée d'elle sans état d'âme, quand elle était encore une enfant. La chienne était d'ailleurs la plus ancienne résidente du laboratoire. En tant que telle, elle put donner quelques éléments de réponses quant aux raisons des différents tests qu'on leur faisait subir. Les humains voulaient savoir pourquoi et comment des animaux étaient capables de prendre leur forme et jusqu'à quel point allait leur humanité.

mardi 14 juin 2011

Lykandré - 15

– Mets-toi plus droit ! Allez !
Un grondement s'échappa du fond de la gorge de Lykandré et le laborantin eut un léger mouvement de recul qui fit plaisir au loup. Hélas, cette modeste joie s'évapora vite, déjà l'homme revenait à la charge. Il lui fit tomber un bout de bois sur la tête, nota quelque chose sur un carnet, puis attrapa un ruban jaune qu'il lui enroula autour de la taille. Lykandré trouva cela désagréable, mais sans plus. En revanche, quand le laborantin toucha ses parties génitales, les cheveux de Lykandré se hérissèrent et il montra les dents.
– Laisse-moi terminer mes mesures, veux-tu !
Lykandré se jeta sur le laborantin, le renversant au sol. La scène ne passa pas inaperçue et l'un des deux hommes en blouse qui faisait passer un test à Hana, se porta au secours de son collègue. Il s'ensuivit une course-poursuite dans la chambre des tests qui s'acheva par une nouvelle défaite cuisante de Lykandré. Son corps encore secoué par les violentes décharges électriques qu'il avait reçu, il fut traîné à la salle des punitions. C'était une pièce plus sombre que les autres, remplie d'objets métalliques. Les deux types qui l'y avaient conduit le contraignirent à entrer dans une étroite boîte où il était impossible de remuer le petit doigt, puis rabattirent le couvercle. Lykandré qui n'avait pas conservé sa vision nocturne, se retrouva plongé dans l'obscurité la plus complète. Déjà oppressé, il paniqua quand, quelques instants plus tard, il se mit à se transformer dans l'espace restreint. Son nez qui prenait de l'ampleur pour devenir museau se cogna avec brutalité contre le fond de la boîte et ses épaules qui s'élargissaient s'enfoncèrent dans les parois. Lykandré hurla de douleur et pour la première fois de sa vie, il lutta pour garder sa forme humaine. Il étouffait. Il hurla. La métamorphose s'arrêta.
Il lui sembla qu'une éternité s'écoulait, puis finalement, il entendit la voix de Goëric.
– On m'a dit que tu n'avais pas été sage...
Le couvercle de la boîte s'ouvrit et le visage de l'homme blond à lunettes apparut.
– Ma parole, tu ressembles à un véritable monstre ! s'exclama-t-il. C'est tout à fait fascinant, ajouta-t-il avec son éternel sourire.
Lykandré voulut répliquer, mais de sa gorge ne s'échappèrent que des sons inarticulés.
– Sors que je puisse mieux te regarder !
L'homme loup s'extirpa péniblement de la boîte. Cependant, dès qu'il fut à l'air libre, la transformation interrompue à mi-chemin s'acheva dans la douleur.
– Quelle dommage, soupira Goëric. J'aurais bien aimé procéder à quelques tests... En attendant, suis-moi. Je te raccompagne au dortoir.
Trop éprouvé pour se rebeller d'une quelconque manière, Lykandré obéit.

lundi 13 juin 2011

Lykandré - 14

L'interrogatoire se prolongea longtemps. Goëric voulait tout savoir : quand le loup était né, si ses parents étaient andromorphes également, qui avait-il rencontré sur son île, que savait-il des humains... Les questions n'en finissaient pas et si Lykandré tardait trop à répondre, Goëric, le sourire aux lèvres, donnait une décharge électrique à l'homme loup. La métamorphose fut une délivrance. Lykandré, tremblant sur ses pattes, regagna le dortoir.
Dans leurs cages grillagées, Inuyume et Bang aboyèrent. Ils compatissaient. Colibri qui était également de retour, des plumes en moins à sa queue, piailla :
– Toi, tu ne t'es pas montré coopératif !
Lykandré se surprit à presque regretter ne pas pouvoir parler humain sous sa forme animale. Cela aurait été plus simple pour communiquer aussi bien avec Colibri que les deux chiens. Il comprenait bien sûr les aboiements de Bang et Inuyume, mais sans contact physique, leur sens manquait de précision.
Dans sa prison, Lykandré trouva de l'eau et un morceau de viande qu'il ignora. Colibri qui pouvait le voir de sa cage, commenta :
– Cela ne sert à rien d'essayer de te laisser mourir de faim. Ici, si tu ne manges rien pendant une trop longue durée, on te gave ou l'on te fait des injections.
Le perroquet s'étant révélé une source d'information fiable,  le loup se résigna à boire et à manger, puis s'allongea et ferma les yeux. Combien de temps allait-il devoir vivre ainsi dans cet endroit où il n'y avait ni soleil ni vent, où il n'avait pas le droit de faire autre chose que ce qu'un autre lui ordonnait ?
Le sommeil de Lykandré fut perturbé par le retour de Koki le singe suivi du départ d'Hana la chatte. Au laboratoire, les allées et venues  semblaient ne jamais cesser et la lumière artificielle restait en permanence allumée comme si le jour et la nuit n'existaient plus. C'était épuisant.
Quand Lykandré se transforma à nouveau, un homme en blouse qu'il ne connaissait pas encore, vint lui ouvrir, exigeant qu'il se rende dans la chambre des tests. Lykandré prit son temps pour y aller, mais obéit. C'était déjà un soulagement que cela ne soit pas Goëric.
– Grimpe sur la balance ! ordonna le laborantin en désignant la chose du doigt.
L'homme loup s'exécuta.
– Descends et mets toi debout, maintenant. Ensuite, colle-toi à ce mur, je vais te mesurer.
Le vieil Akihito s'était efforcé d'apprendre à Lykandré à se tenir sur ses deux pieds, mais le loup avait toujours trouvé la position inconfortable. Avec quelques difficultés, il se redressa et d'un pas mal assuré, se mit contre le mur. Le laborantin eut un petit rire en le regardant faire et Lykandré résista à l'envie de le mordre. L'homme en blouse pouvait se moquer, il ne se serait pas forcément bien débrouillé s'il avait dû marcher à quatre pattes
!

vendredi 10 juin 2011

Lykandré - 13

Durant les heures qui suivirent, Lykandré eut l'occasion de vérifier que Colibri le perroquet n'avait pas raconté n'importe quoi. Des hommes en blouses vinrent libérer Koki le singe et Zack le caméléon une fois qu'ils eurent cessé d'être des animaux et Hana la chatte regagna seule le dortoir en miaulant.
Quand Lykandré sentit son corps se métamorphoser, il lutta. Cependant, c'était inutile. Pas plus que sur son île, il ne put arrêter la transformation. Dès qu'il eut pris une apparence humaine - il ne lui restait du loup que ses oreilles pointues et son odorat développé - Goëric lui-même débarqua pour le faire sortir du dortoir. Il devait en avoir fini avec Colibri.
– Rejoins-moi dans la chambre des tests, exigea-t-il.
Sans enthousiasme, Lykandré emprunta la trappe qui y conduisait et y retrouva l'homme blond.
– Alors mon beau, maintenant que tu n'es plus paralysé et que tu sais ce qui t'attend si tu te montres désobéissant, si nous discutions ?
En disant ces mots, Goëric lui fit signe de s'asseoir sur une chaise, mais Lykandré l'ignora, préférant rester assis par terre. Comme cela  faisait longtemps qu'il n'avait pas parlé « humain », il s'éclaircit la gorge avant de déclarer d'un ton rocailleux :
– Je veux retourner sur mon île.
– Impossible. As-tu un nom ?
– Pourquoi je ne peux pas rentrer chez moi ?
– Je crois que tu n'as pas bien compris les règles du laboratoire. Ici, c'est moi qui pose les questions. Contentes-toi d'y répondre.
Le sourire éblouissant qui ponctua ses propos donna envie à Lykandré de le mordre, ce qu'il fit. Goëric poussa un cri de douleur en se tenant la main. De suite, deux hommes en blouse intervinrent et l'un deux réussit à toucher le dos de Lykandré avec un étrange objet rectangulaire. Une douloureuse secousse traversa le corps de l'homme loup et il se recroquevilla sur le sol en frissonnant.
Goëric s'approcha de lui en frottant sa main blessée.
– J'espère que tu as aimé cette première décharge électrique, car je compte bien te faire payer ton coup de dents... Je te le demande encore une fois : comment t'appelles-tu ?
– Lykandré.
Goëric qui avait pris l'objet des mains de son collègue, sembla presque déçu de ne pas avoir à s'en servir.
– Qui commande ici ?
– Vous.
Lykandré était peiné de l'admettre, mais il ne faisait pas le poids face aux humains et leurs outils. Rien ne l'avait préparé à ce qu'il lui arrivait, pas même ses échanges avec le vieil Akihito.

jeudi 9 juin 2011

Lykandré - 12

Cela faisait mal. Lykandré considéra que c'était le signal pour attaquer et il se jeta sur l'homme à lunettes. Un autre coup du « serpent » l'empêcha d'atteindre sa cible.
– Va au dortoir où tu continueras à goûter de mon fouet ! ordonna Goëric.
Et sans se départir de son sourire, il frappa encore deux fois le loup. Lykandré, ignorant la morsure du fouet, bondit à nouveau, mais fut une fois de plus coupé dans son élan. Le manège dura encore un moment avant que le loup n'admette sa défaite. Toutefois, il ne présenta pas son ventre en signe de soumission, il se contenta de quitter le jardin, le corps endolori et le cœur meurtri.
Quand il revint au dortoir, il n'y avait plus que deux cages occupées. Inuyume la femme chien lui indiqua laquelle était la sienne. Sans un regard pour le singe et le caméléon, Lykandré y entra, la mort dans l'âme. Derrière lui, la porte se referma toute seule. Comme il n'y avait rien d'autre à faire et qu'il était fatigué, le loup se mit à sommeiller.
Ce furent des aboiements qui le réveillèrent. Un grand chien au poil jaune d'or était ramené par deux hommes en blouse.  Ce devait être le fameux Bang.
– Ça ne t'a pas suffit trente coups de bâtons, tu en veux plus? grommela l'un des deux gars en filant une tape sur le derrière du chien qui rechignait à regagner sa cage.
Bang grogna, mais fut obligé de réintégrer sa prison. Dans la cage voisine, Inuyume qui avait retrouvé sa forme animale, poussa de petits jappements compréhensifs auquel Bang ne répondit pas.  Koki le singe couina en réaction,  les deux types partirent, puis le silence retomba.
Lykandré allait refermer les yeux quand il y eut à nouveau du remue-ménage. Le perroquet bleu au cou jaune aperçu au début de sa visite du laboratoire, venait d'émerger par d'une des trappes.
– Je t'en ficherai moi des casse-têtes, caquetait-il en se dandinant.
Repérant le loup, il voleta jusqu'à lui.
– Bienvenue le nouveau ! Je n'ai pas eu le temps de te saluer tout à l'heure. Au fait, petite mise en garde, dans le jardin, comme partout ici, nous sommes espionnés. Alors, attention à ce que tu dis !
A peine l'oiseau avait-il piaillé ces mots que la voix furieuse de Goëric retentit :
– Colibri, puisque tu ne sais pas tenir ta langue, tu seras puni ! J'y veillerai personnellement.
L'oiseau ignora l'interruption et continua à l'intention de Lykandré:
– Je suis le seul andromorphe qui peut parler même sous sa forme animale et c'est pourquoi on me laisse rarement la paix, mais sinon, sache que tant que t'es un simple loup, on te laissera tranquille dans ta cage. Par contre, dès que tu te transformes, c'est la valse des tests. Te voilà prévenu.
L'arrivée de Goëric interrompit le caquetage de Colibri.
– Perche-toi sur mon épaule, nous allons en salle des punitions.
Le perroquet s'exécuta docilement. Il ne tenait sans doute pas à aggraver son cas.

Manga Yaoi en juin 2011

Pas mal de sorties pour ce mois-ci... 

Chez Taïfu Comics, le 9/23 juin :
Le Labyrinthe des sentiments de Kou Yoneda (Extrait à lire sur le site de Taïfu)
Visages Inconnus de Hidaka Shoko
Recueil d'histoires courtes avec ping pong, coiffeur et dentiste...
Pure Heart Tome 2 sur 3 de Fujiyama Hyouta
Le volume 2 n'étant jamais paru aux Etats-Unis, c'est avec bonheur que je lirai enfin la suite de Pure Heart. J'espère que le seme va se réveiller enfin sur ses sentiments pour le uke !
Ze Tome 5 sur 11 de Yuki Shimizu
Plus j'avance dans cette série, plus je suis déçue, je n'arrive pas à m'attacher véritablement aux personnages comme c'était le cas pour la précédente série de l'auteur, Love Mode. Enfin, je dis ça, mais ça reste agréablement érotique, et c'est même émouvant par moment...


 Chez Asuka :
Yebisu Celebrities Vol.4 sur 5 de Fuwa Shinri ( 9 juin)
School of the muse Vol.3 sur 4 de Makoto Tateno (16 juin)
Ce que j'en ai lu dans le dernier Be x Boy me convainc plus que jamais que ce n'est pas un titre pour moi...
My demon and me Vol.3 de Tsuta Suzuki (23 juin)
Avec ce volume, j'abandonne la version américaine pour la version française. Je suis trop curieuse de lire la suite...et aux Etats-Unis, ce volume ne sortira qu'en septembre !
Junjou Romantica Vol.4 de Shungiku Nakamura (23 juin)



Chez Soleil : Professor Strange Love Tome 2 de Chie Sasahara (22 juin)
Vous pouvez lire ici mon avis sur le tome 1

Sinon, également chez Soleil, RH+ Tome 1 de Ayako Suwa (22 juin) est classé comme shonen-ai manga sur certains sites... Et n'oublions pas, chez Pika, le shonen ai Uragiri Tome 1 de Hotaru Ogari qui est sorti le 1er juin.

mercredi 8 juin 2011

Lykandré - 11

Ils débouchèrent assez rapidement dans une autre pièce dans laquelle se trouvaient huit cages de tailles différentes. Quatre d'entre elles étaient occupées par des animaux et se rappelant ce qu'avait dit Goëric, le loup eut la désagréable certitude que l'une de ses cages lui étaient destinées.
– C'est notre dortoir et salle d'attente. Voici Colibri le perroquet, Koki le singe, Zack le caméléon et Hana la chatte, annonça Inuyume en désignant respectivement chaque cage.
Elle emprunta ensuite une nouvelle trappe qui conduisait cette fois directement dans une pièce circulaire pleine de choses inconnues à Lykandré. Deux hommes en blouse encadrait un siège où était attaché un adolescent qui avait des antennes sur la tête.
– Nous sommes dans la chambre des tests. Celui sur le fauteuil, c'est Zéro. Originellement, c'est  une fourmi.
A nouveau, Inuyume utilisa une trappe et ils arrivèrent dans une salle où étaient alignées des tables et des chaises en face d'écrans noirs.
– Là, on nous fait la classe.
La femme chien ne s'attarda pas et ils passèrent à la pièce suivante.
– Pour finir, voici l'ère de jeux.
Le sol était constitué d'herbe avec un coin sableux tandis que les murs étaient bleu ciel avec des nuages. Au centre, se trouvait un unique arbre, un érable de taille modeste. Le tout formait un piètre substitut de nature.
– Nous n'avons pas accès au reste. L'andromorphe que tu n'as pas vu, Bang, un chien qui n'est parmi nous que depuis deux mois, est en salle des punitions.
La visite semblait terminée et Lykandré s'allongea sur la pelouse.
– Il faut que nous retournions en salle d'attente, annonça alors Inuyume.
Elle quitta le jardin, mais Lykandré resta là où il était. C'était l'endroit le plus acceptable parmi ceux qui lui avait été montré. Elle revint le chercher, lui répétant ce qu'elle lui avait déjà dit, le prévenant qu'il s'exposait à des représailles s'il n'obéissait pas, mais il persista. Il n'était pas un toutou. Inuyume insista encore, puis repartit la queue basse.
Quelques instants après son départ, Goëric entra par une porte cachée dans le bleu du ciel. A la main, il tenait comme un serpent enroulé.
– Rends-toi au dortoir ! Je suis sûr que tu me comprends très bien. J'ai l'habitude des andromorphes et je l'ai lu dans tes yeux.
Lykandré se remit aussitôt sur ses pattes dans une attitude menaçante. Ce n'était pas lui qui roulerait sur le sol en geignant! Goëric déplia alors l'espèce de serpent et le fit claquer sur le museau du loup.

mardi 7 juin 2011

Lykandré - 10

Il sortit de la cage en métal et explora la pièce. Le sol était lisse et froid sous ses pattes. Au niveau du plafond, aux quatre coins, étaient fixés de drôles de choses noires qui lui firent penser à l'appareil photo du vieil Akihito. Les murs étaient nus. Indépendamment de la porte derrière laquelle avait disparu Goëric, il n'y avait qu'un seul autre passage, une trappe située au bas du mur. Aucunes des deux ne s'ouvraient, évidemment. Cette pièce n'était rien d'autre qu'une prison plus spacieuse. Lykandré choisit un coin, leva la patte et pissa, puis n'ayant rien d'autre à faire, il finit par s'asseoir à côté de sa précédente cage. Qu'espérait l'inquiétant Goëric en l'enfermant ici ? Le faire mourir de soif ?
Au bout de quelques minutes, la trappe s'ouvrit et une femme à la peau noire et aux longues oreilles tombantes pénétra dans la pièce à quatre pattes, poussant devant elle un plateau sur lequel était posé un appétissant morceau de viande et un bol d'eau. Le loup commença par renifler la femme. Elle sentait un mélange d'animal et d'humain qui lui rappela ses propres métamorphoses. Comme elle roulait sur le dos, lui présentant son ventre, il décida qu'elle était inoffensive et alla se sustenter.
Il venait à peine de finir qu'un ordre bref et impérieux retentit :
– Présente-toi !
Bien que la voix soit légèrement déformée, le loup reconnut Goëric. Il le chercha, mais il n'était nulle part. 
– Je m'appelle Inuyume. Je suis une chienne andromorphe, déclara la femme à la peau noire. Ici, si tu es obéissant, tu seras bien traité, mais si tu mords ou que tu te montres violent, alors tu seras puni.
Inuyume frissonna et sa peau exhala une odeur de peur.
Ici, nous sommes des sujets d'expérience, continua-t-elle. Nous sommes sous écoute et filmés en permanence par les caméras que tu vois là-haut, ajouta-t-elle en lui montrant du doigts les choses noires que le loup avait repéré quelques instants plus tôt.
Tout cela restait un peu abstrait pour Lykandré. Ce qu'il voulait savoir, c'était quand est-ce qu'il reverrait la lumière du jour et quand est-ce  qu'il pourrait retourner vivre avec ses congénères.
– Si tu acceptes de me suivre, je te ferai visiter les lieux.
Sans attendre de réponse, la femme chienne se glissa dans l'ouverture par laquelle elle était arrivée. Lykandré s'engouffra à sa suite.

lundi 6 juin 2011

Lykandré - 9

– Ainsi, c'était vraiment un loup andromorphe. Il est splendide. Vous avez bien mérité votre argent, déclara l'homme en sortant de la poche de sa blouse deux épaisses liasses de papiers verts.
Kinsue les prit et compta les billets avec une satisfaction évidente.
– N'hésitez pas à refaire appel à nos services, déclara-t-il finalement, en rangeant les liasses dans sa veste.
Sans quitter des yeux le loup à forme humaine, l'homme blond acquiesça et fit signe à l'équipe de Kinsue de débarrasser le plancher. Ils avaient été payés et n'avaient plus rien à faire ici.
Le départ de ceux qui l'avaient capturé troubla Lykandré. A défaut de lui être sympathiques, les cinq hommes constituaient sa dernière attache avec son île. Il était désormais privé de tout point de repère. Dans la pièce où il avait été amené, il n'y avait pas de soleil, juste une lumière orangée artificielle et la végétation était absente.
– Les gêneurs sont partis, mon tout beau. J'espère que tu te plairas ici. Nous avons actuellement sept autres andromorphes au laboratoire, et très bientôt tu feras leur connaissance... Mais je néglige à tous mes devoirs en oubliant de me présenter. Je suis l'assistant en chef du docteur Nakahira,  Goëric Anton.
Contrairement aux autres hommes, il semblait convaincu que Lykandré comprenait ce qu'il disait. Et il avait raison.
Goëric Anton, toujours en souriant, ouvrit la porte de la prison et vint toucher les oreilles de loup qui pointaient au milieu des cheveux châtains de Lykandré.
– C'est drôle comme la majorité des andromorphes n'ont pas une transformation complète, trahissant leur véritable origine.
Rongé par l'envie de se soustraire à ce contact, Lykandré essaya de toutes ses forces de rejeter sa tête en arrière, mais il perdit une fois de plus contre le paralysant. Néanmoins, Goëric dut sentir l'effort qu'avait fourni le loup, car il déclara :
– Je ferais mieux de partir avant que tu n'aies récupéré ta mobilité.
Après une dernière caresse, il se leva et laissant  la cage ouverte, il se dirigea vers une porte à peine visible dans le mur.
– Ne t'en fais pas, je ne serai pas loin et je te garde à l'œil, annonça-t-il avant de sortir.
Lykandré ne trouva pas du tout cela rassurant. Pendant un temps qu'il lui sembla interminable, il n'eut d'autre loisir que de regarder le mur. Et quand enfin il put bouger, il dut subir une métamorphose brutale et douloureuse. Il l'accueillit cependant avec joie, soulagé de retrouver enfin sa forme animale. Il lui était pénible de ressembler à ces créatures qui marchaient debout et qui croyaient avoir le droit de priver les autres de leur liberté.

jeudi 2 juin 2011

Lykandré - 8

Quand Lykandré reprit ses esprits, la première chose qu'il vit à travers les barreaux de sa cage, fut la mer qui s'étendait à l'infini. Il frissonna. Sans sa fourrure, le vent du large était froid. Spontanément, il voulut se rouler en boule pour se tenir chaud et constata qu'il était enfin capable de bouger. Il s'accroupit et tourna la tête. Ceux qui l'avaient capturés se tenaient sur le pont du bateau. Le plus proche de sa prison était Goro. Leurs regards se croisèrent et Lykandré montra les dents dans une tentative d'intimidation qui ne parut faire ni chaud ni froid à son gardien. Il grogna d'un ton menaçant sans plus de réaction. Il caressait l'idée de lui adresser la parole quand l'homme trapu partit voir son alpha qui était occupé à diriger le bateau. Lykandré vit Goro bouger rapidement les mains, puis entendit Kinsue lui ordonner de renvoyer « le petit loup » faire dodo. Goro revint vers lui, l'arme au poing. Lykandré, limité dans ses mouvements dans la cage, ne put éviter le tir. Son corps devint à nouveau immobile, le contraignant au rôle de spectateur.
Cependant, même ça lui fit retiré : peu de temps après que Goro l'ait paralysé, Jun et Danno vinrent rabattre un drap noir au-dessus sa cage.  Lykandré dut se contenter de son ouïe et de son flair pour continuer à percevoir ce qui se passait.
– Qu'est-ce qui t'arrive Jun ? T'es jamais très jouasse quand on livre les andromorphes, mais là, t'es si chagrin...
– Je sais pas, coupa Jun.
Le reste de la discussion lui échappa, les deux hommes ayant dû s'éloigner.
Pendant un long moment, il n'y eut plus que le bruit des vagues et du vent, puis, des sons inconnus frappèrent les oreilles de Lykandré. Après cela, il sentit qu'on le déplaçait à nouveau et des odeurs désagréables agressèrent ses narines. Sa cage fut reposée. Un claquement violent se fit entendre, puis une sorte de ronronnement envahit l'espace sonore. Au fur et à mesure que le temps passait, l'anxiété de Lykandré allait croissant, mais il ne pouvait rien faire d'autre que prendre son mal en patience. Finalement, il y eut un crissement, un silence, la voix des hommes qui l'avaient attrapé et il fut une fois de plus transporté.
– Faites attention ! Ce n'est pas une vulgaire marchandise ! cria soudain une voix que le loup n'avait encore jamais entendue.
– Vous avez entendu le doc, les gars, déclara Kinsue.
Seule une légère secousse signala cette fois à Lykandré que sa cage était placée à terre. Le drap fut enlevé d'un coup sec et un homme blond à lunettes, tout sourire, apparut. Il déplut instinctivement à Lykandré.

Prochain épisode : lundi 6 juin

mercredi 1 juin 2011

Lykandré - 7

– Et voilà, ça t'avance bien, hein ! s'exclama Chomei. Allez, admets que tu t'inquiètes de son sort, car il t'a tapé dans l'œil avec sa queue touffue et sa petite bite rouge, continua-t-il d'un air entendu en passant familièrement un bras par dessus l'épaule de Jun. Faut croire que l'engin de Danno ne te satisfait plus et que t'as envie de verser dans la bestialité... ajouta-t-il pour finir.
Le brun lui attrapa la main, se pencha en avant et le fit basculer, le projetant à terre. Avant que Chomei n'ait pu se relever, Danno se précipita sur lui et lui donna un violent coup de poing dans la mâchoire, l'envoyant à nouveau au sol. Le frère jumeau de Chomei, Goro voulut s'emmêler, mais Kinsue lui interdit d'un geste.
– Suffit ! cria-t-il. On a pas le temps pour vos gamineries. On a un andromorphe à livrer.
De mauvaise grâce, Danno s'éloigna de Chomei qui se remit debout, en secouant le sable qui collait à son treillis.
– Vous me le payerez, grommela-t-il entre ses dents.
– N'y compte pas trop. Tu le méritais, intervint Kinsue. T'es un sacré fouteur de merde ! Je te jure si ton frère acceptait de pister pour nous sans toi, ça fait longtemps que je t'aurais viré de l'équipe...  
– C'est pas moi qui suce des bites, répliqua Chomei.
Le balafré n'apprécia pas l'interruption. D'un ton coupant, il rétorqua :
– Ouais. Et toi t'adores les femmes à talons. Chacun son truc. Comme tu l'as dit toi-même, on est dans ce business pour le blé, pas pour juger les gens. Et il y a des sacrés numéros dans nos clients. Fin de la discussion. Maintenant, tout le monde prend la cage et la porte jusqu'au bateau. Pas la peine qu'on moisisse ici plus longtemps.
Joignant le geste à la parole, Kinsue empoigna résolument deux barreaux de la cage. Avec un temps de retard, ses quatre équipiers lui obéirent : Goro, en premier, le visage impénétrable, puis Jun, les muscles tendus, suivi par Danno qui trainait un peu la jambe et enfin, Chomei, l'air mauvais. Lykandré qui avait assisté à toute la bagarre en espérant vaguement que cela aiderait la situation dans laquelle il se trouvait, se sentit soulevé et tout son monde se mit à tanguer. La prison n'étant pas toujours maintenue droite, son corps glissa et sa tête vint se cogner contre les barreaux, ce qui l'étourdit. Une nouvelle secousse, un autre choc et cette fois, il perdit conscience.