vendredi 31 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 51

Un seau d’eau glaciale le fit revenir à lui.
— De quel poison t’es-tu servi ? hurla un orc dont une oreille était déchiquetée.
Comme Cyan ne répondait pas, encore trop étourdi pour cela, l’orc répéta la question tout en le gratifiant d’un nouveau jet d’eau.
Cyan s’efforça d’expliquer que ce n’était pas lui et que par conséquent, il ne savait pas.
— Tu gaspilles ta salive avec tes mensonges !Maudit humain, tu as bien mal repayé la générosité du prince.
Cyan était d’accord avec lui sur ce point. Après tout, c’était sa faute si l’inconnu barbu avait tiré sur Gulrik.
L’orc lui donna plusieurs coups de pied dans le ventre, lui demandant encore et encore la même chose.
Cyan ne put que crier son innocence.
L’orc à l’oreille déchiquetée finit par le laisser.
Cyan, quand il eut recouvré son souffle, découvrit qu’il avait été porté dans un cachot. Les murs et le sol étaient composés de grosses pierres et la porte était constituée d’épais barreaux de fer.
Il n’y avait pas de lumière si ce n’est celle de la torche qui brûlait dans le couloir. Une autre cellule faisait face à la sienne, mais elle était vide.
Cyan se replia en boule sur lui-même. Il était mouillé, il faisait froid, il avait mal et il se faisait du souci pour Gulrik.
Ce n’était pas bon signe que les orcs veulent à tout prix connaître le nom du poison qui avait été utilisé. Ils n’arrivaient peut-être pas à soigner leur prince.
Cyan fut presque content quand son geôlier revint.
— Comment va le prince ? demanda-t-il en se redressant avec peine.
— Tu voudrais savoir si tu as réussi ton coup, hein, cafard ? Je ne te donnerai pas cette joie. Tu ferais mieux de trembler pour ta vie. Il a été décidé que tu serais pendu publiquement à l’aube dans trois jours.
L’annonce de sa mort prochaine troubla moins Cyan que le refus de l’orc de lui révéler l’état de santé de Gulrik.
— Il est encore vivant, n’est-ce pas ?
L’orc tourna les talons sans lui répondre. Cyan aurait préféré une pluie de coups à ce silence.
Plus tard, un autre orc lui apporta une outre d’eau et une miche de pain dure comme du bois, mais ne répondit pas non plus à ses questions sur le prince.

jeudi 30 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 50

L’homme enleva la flèche avec dextérité. La pointe ensanglantée fit frémir Cyan.
— Aide-moi, grogna l’inconnu.
Cyan obéit. Sans cesser de jeter des coups d’œil au barbu, il procéda avec la lenteur et précaution si bien qu’il n’en retira qu’une pendant que l’homme se chargeait des autres.
Le barbu lui arracha la flèche des mains.
— Maintenant, tirons-le ici, déclara l’homme pointant des fourrés.
Sachant que Gulrik était étendu sur de l’herbe, l’installer dans un mélange de fougères et de broussailles n’avait pas de sens... à part s’il voulait dissimuler le corps.
Cyan refusa.
D’un geste rapide et brutal, l’homme l’attrapa, enroulant un bras de sa gorge et serrant.
— Écoute, lui dit-il à l’oreille, quel que soit ton attachement à cet orc puant, tu as intérêt à te montrer coopératif. Ne m’oblige pas à t’éliminer.
Bien que l’homme soit intervenu en croyant le sauver de l’étreinte d’un orc, la menace était claire, il était désormais prêt à tuer Cyan. C’était risible.
Cyan n’avait aucune envie d’obéir docilement. Il n’avait rien demandé. Il songea qu’un bon coup de pied dans le gros orteil d’un humain ferait également son petit effet.
Sa riposte surprise fonctionna et le barbu le lâcha en pestant.
Cyan en profita pour dégainer son poignard et le tint à deux mains devant lui.
Cela ne parut pas perturber l’inconnu. La posture de Cyan trahissait son manque d’expérience.
Cependant, avant que l’inconnu n’essaie de le désarmer, des voix se firent entendre. Des orcs arrivaient.
L’homme barbu jura entre ses dents et prit la fuite à toutes jambes.
Cyan, lui, rangea son poignard et s’agenouilla auprès de Gulrik. Ce dernier respirait toujours, mais de façon saccadée et sa peau était brûlante.
Un instant plus tard, des orcs les encerclaient.
— Écarte-toi de lui, ordonna le plus grand et le plus massif d’entre eux.
Roknok.
Cyan essaya d’expliquer ce qui s’était passé. Nul ne parut vouloir l’écouter. Cyan préféra s’exécuter. L’important était que Gulrik soit soigné au plus vite.
Un orc évalua l’état du prince tandis que Roknok le délestait de son poignard et attachait les pieds et les mains de Cyan.
— Cette vermine d’humain l’a pris en traître et usé de poison, s’indigna l’orc examinant Gulrik.
— Tuons-le ! s’écria un autre membre du petit groupe.
— Non, intervint Roknok, en jetant Cyan sur son épaule. Le roi voudra qu’il soit interrogé et c’est lui qui décidera de son sort.
Les orcs protestèrent, mais se rangèrent à son avis.
Cyan tenta une fois de plus de rapporter les événements tels qu’ils s’étaient produits afin que quelqu’un cherche à capturer le véritable coupable, en vain.
Un brancard de fortune fut fabriqué en deux temps trois mouvements et le groupe s’en retourna à la forteresse à toute allure.
Tête en bas, le sang lui montant à la tête, épuisé et secoué comme un sac de patates, Cyan, en dépit de son inquiétude pour Gulrik et son propre sort, finit par sombrer dans l’inconscience.

mercredi 29 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 49

Cyan s’extirpa non sans difficulté  du grand corps massif de l’orc et il s’apprêtait à examiner les flèches qui dépassaient du dos de Gulrik, quand un homme barbu arriva à pas silencieux, vêtu de façon à se fondre avec le paysage. Il portait un carquois et un arc. Que faisait un humain à Orcania et pourquoi s’en était-il pris à eux ?
La peur au ventre, Cyan se plaça entre l’inconnu et Gulrik.
— Que voulez-vous ? demanda-t-il d’une voix tremblante.
L’homme écarquilla les yeux.
— Il semblerait que j’ai mal jugé la situation, grommela-t-il.
Cyan ne comprit pas.
Comme l’homme se penchait sur Gulrik, Cyan s’interposa.
— Ne le touchez pas !
L’homme se redressa.
— Ne t’énerve pas ! Je croyais que cet orc t’agressait. C’est pour ça que je suis intervenu. Avoue quand même, un humain qui batifole de son plein gré avec un orc, c’est plus que rare. En même temps, le fait que tu sois à Orcania aurait pu me mettre la puce à l’oreille. Ah, la plaie !
L’homme avait donc cru le sauver en intervenant. Voilà qui était aussi terrible qu’absurde. En attendant, ce n’était pas normal que Gulrik soit dans cet état à cause de quelques flèches.
— Pouvez-vous m’aider à le soigner ?
L’inconnu regarda Cyan comme s’il avait perdu la tête.
— Je n’ai pas l’anti-poison sur moi. Le mieux serait encore de l’achever, annonça-t-il. Ah, dans quel guêpier me suis-je fourré à jouer les justiciers !
Cyan en voulut à l’homme de parler tranquillement de la mort de Gulrik sans l’ombre d’un remord.
Mourir vite était certes préférable à une lente agonie, mais la seconde option donnait au moins une chance à Cyan de sauver l’orc dont il était tombé amoureux et qui avait été attaqué par sa faute.
Le barbu soupira.
— Commençons par retirer les flèches.
Cela semblait bien à Cyan, excepté qu’il ne faisait pas confiance à l’homme.
En même temps, il n’avait guère de choix.  Même s’il avait désormais le poignard offert par Gulrik, il n’avait aucune expérience pour se battre avec. Sur ses gardes, il laissa le barbu approcher de l’orc.

mardi 28 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 48

Cyan fut surpris quand Gulrik s’effondra, l’entraînant dans sa chute et l’écrasant de tout son poids.
Il avait peine à comprendre comment ils en étaient arrivés là. Le manque de sommeil n’aidait pas.
Il avait marché toute la nuit sans oser se poser nulle part.
Il avait cru halluciner quand Gulrik était apparu devant lui, mais non, le prince des orcs l’avait bel et bien pourchassé pour lui demander des explications sur son départ précipité.
Cyan n’avait pu se résoudre à lui donner, il avait trop honte pour cela. Chaque fois qu’il repensait à Vaknor, l’humiliation et le dégoût l’envahissaient.
Évidemment, Gulrik avait insisté pour savoir, alors Cyan avait essayé de raconté, mais cela avait été au-delà de ses forces.
Gulrik n’avait pas mis sa parole en doute quand Cyan avait accusé Vaknor et cela lui avait fait plaisir. Cependant, quand l’orc avait suggéré qu’ils rentrent, Cyan n’avait pu accepté. Même si Vaknor était puni, rien ne garantissait que la situation ne se reproduirait pas. Pas nécessairement pour des faveurs sexuelles, mais parce que Cyan était humain et que ce fait seul déplaisait à la plupart des orcs.
Avoir été ramené par le prince ne suffisait pas à garantir la protection de Cyan. Vaknor l’avait prouvé. C’était même en quelque sorte posséder la faveur de Gulrik qui avait eu cette pénible conséquence.
Gulrik l’avait surpris en lui offrant le couteau provenant de Manchor. Mais ce qui l’avait vraiment étonné, c’était le baiser. Les lèvres de Gulrik sur les siennes, sa langue râpeuse fouillant sa bouche avait vidé la tête de Cyan. Il avait eu la sensation de s’envoler et pas seulement de façon figurée quand Gulrik l’avait soulevé de terre.
Entre deux baisers, l’orc lui avait encore demandé de revenir avec lui à la forteresse et Cyan avait cédé. La manière dont Gulrik l’avait embrassé sachant ce que Cyan avait laissé Vaknor faire, lui avait semblé revêtir une signification particulière. Sans aller jusqu’à s’imaginer que l’orc l’aimait, impossible de ne pas y voir une marque d’affection. Ce n’était pas qu’une question de satisfaire leurs désirs sexuels…
Maintenant Gulrik était blessé et avait perdu conscience, et ce n’était plus le moment de songer à tout cela.

lundi 27 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 47

Gulrik brûlait de ravager Cyan, le prendre sans se soucier de qui pourrait les voir.
Les autres orcs pouvaient penser ce qu’ils voulaient. L’humain était à lui, parfait pour lui. Il ne voulait pas que Cyan reparte à Humania.
— Reviens avec moi à la forteresse, déclara-t-il avant de reprendre les lèvres de Cyan.
Ce n’est que plus tard qu’il réalisa qu’il ne lui avait pas laissé le loisir de répondre.
Unir leurs bouches et leurs langues était par trop délicieux.
Il détacha ses lèvres en douceur, le gardant pressé contre lui.
Cyan le fixa de ses yeux bleu cristallin, l’air perdu, une main posée sur le torse de Gulrik, l’autre accrochée à son biceps.
— Reste à Orcania avec moi, intima Gulrik.
Cyan battit des paupières et se mordit la lèvre inférieure.
Gulrik résista au désir de capturer à nouveau la bouche humide de l’humain. Il avait besoin d’entendre sa réponse. Une positive. Si c’était non… Gulrik refusait cette possibilité. Il le ferait changer d’avis. Il ne renoncerait pas. La place de Cyan était à ses côtés, mais il ne voulait pas non plus le forcer.
Il ne pouvait désormais plus nier son attachement à son égard, plus prétendre que c’était quelque chose de temporaire, un effet de nouveauté, que c’était juste du désir. Il souhaitait le posséder dans tous les sens du terme et le protéger.
— Je…
Des bégaiements et bredouillements n’auraient pas dû être aussi adorables.
— D’accord, dit finalement Cyan.
Gulrik ressentit un soulagement intense qui lui fit comprendre à quel point il tenait à l’humain. Hélas, son affection pour Cyan risquait de poser problème sur le long terme. En tant que prince héritier, il était supposé se marier avec une orc de qualité et lui faire des enfants. Les partenaires de même sexe n’étaient bons que pour prendre du plaisir tant qu’on était célibataire. Et si cumuler les conquêtes était une preuve de virilité, une fois les vœux de mariage prononcé la fidélité était attendue. Pour l’heure, tout cela n’avait pas d’importance. Il n’avait pas besoin de se marier tout de suite. Il était encore jeune. Oui, pour le moment, tout ce qui comptait, c’est que Cyan n’allait pas retourner à Humania, qu’il était dans ses bras. Le maintenant d’une main, il caressa de l’autre ses cuisses, puis ses fesses. Il inséra deux doigts dans la raie et sourit face au doux parfum d’excitation de Cyan qui le regardait les yeux voilés de désir.
Soudain, il ressentit une vive douleur dans le dos.
Cyan cria.Ils étaient attaqués. Un autre trait le traversa. Gulrik courut vers un bosquet d’arbres.
Il réussit à esquiver un nouveau projectile d’un bond de côté. Une flèche noire se ficha dans le sol. Deux autres parvinrent hélas à le toucher avant qu’ils n’atteignent le couvert de la végétation.
— Tu n’as pas été blessé ? demanda-t-il.
Cyan secoua la tête.
La vision de Gulrik se troubla, ce qui le surprit. Il avait la peau dure et quelques flèches ne pouvaient suffire à le mettre hors d’état de nuire.
Ses paupières se faisaient pourtant lourdes. Il lutta, cherchant à repérer leur mystérieux ennemi.
En dépit de ses efforts, il sombra et tout devint noir.

vendredi 24 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 46

— Il sera puni. Je te le promets. Rentrons.
— N… Non.
— Pourquoi ?
— Si un autre orc m’en veut pour une raison ou une autre, pas forcément pour ça, je… Je ne suis pas de taille.
— Je peux t’apprendre à te défendre.
C’était le moment ou jamais de lui offrir le poignard. Gulrik ouvrit son sac, récupéra l’arme et la tendit à Cyan.
— Mais c’est… Cela vient de la boutique à Manchor.
— Oui, je suis persuadé que tu en feras bon usage.
— Je ne saurais m’en servir, souffla Cyan.
Gulrik récupéra une cordelette de cuir et attacha le poignard dans son fourreau autour de la taille de l’humain.
— Je t’entraînerai et en attendant, je peux te révéler un point faible des orcs. Nos gros orteils sont très sensibles.
Gulrik n’aurait pas dû révéler cela à un humain, mais il voulait vraiment que Cyan revienne avec lui à la forteresse.
Cyan ne réagit pas, se contentant de se frotter la bouche avec la main.
Nul doute qu’il repensait à l’assaut de Vaknor. Gulrik aurait voulu pouvoir l’annuler en plongeant à son tour dans la chaude cavité, mais c’était mal venu alors que Cyan venait tout juste d’avoir été abusé. L’humain ne voudrait peut-être plus jamais faire de fellation à cause de ce maudit Vaknor.
— Tu as pu te rincer la bouche ?
Cyan acquiesça tristement.
Cela n’avait pas suffi à faire disparaître les odeurs. Celle du vomi comme celle de Vaknor. Gulrik ne pouvait le supporter. Il devait faire quelque chose. Donner encore à boire à Cyan ne suffirait pas. Éjaculer dans bouche était exclu. Massacrer Vaknor serait une consolation, mais ne changerait rien à l’agression qu’avait subie l’humain et que Gulrik n’avait pu prévenir, mais aurait voulu effacer et guérir, à tout prix, de n’importe quelle façon.
Le souvenir de couples humains croisés à Manchor lui revint et il sut ce qu’il devait faire. Il se pencha et pressa ses lèvres contre Cyan, prenant garde à ne pas le blesser avec ses deux dents proéminentes.
Quand Cyan entrouvrit la bouche, signe qu’il appréciait l’acte, Gulrik glissa sa langue à l’intérieur et explora.
Cyan gémit.
Gulrik l’enlaça, puis le souleva de terre – il en avait assez d’être courbé en deux – et le tint contre lui à la bonne hauteur.
Ce qui avait commencé comme une opération de nettoyage prenait une tournure différente. Mêler sa langue à celle d’un autre était un acte étrangement enivrant.

jeudi 23 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 45

Nul n’avait vu Cyan, comme s’il avait disparu par magie.
Une servante put finalement le renseigner. Elle avait aperçu l’humain se diriger vers le chemin de ronde.
Le soleil était complètement levé quand Gulrik apprit enfin de la bouche de l’un des gardes que l’humain avait demandé à partir dans la nuit.
Au début, personne n’avait voulu, pas sans autorisation, et puis quelqu’un avait cédé, lui pointant la direction à prendre pour retourner à Humania.
Bon vent, bon débarras, songea d’abord Gulrik, furieux que l’ingrat humain ait filé sans même un au revoir. Après coup, l’inquiétude l’envahit.
Cyan n’avait aucune moyen de se défendre et sans doute pas ou peu de provisions alors qu’il ne savait même pas chasser. Et sans personne pour le porter, il lui faudrait sûrement près d’une semaine de marche avant d’atteindre la frontière, et encore s’il ne se perdait pas en route.
Gulrik se dépêcha de préparer son sac de voyage dans lequel il mit, en plus du nécessaire, les cadeaux achetés  pour Cyan à Manchor et pas encore donnés et retourna sur le chemin de ronde.
Là, il ordonna aux gardes en place de lui descendre une corde. Il n’écouta rien de leurs objections. Il prit seulement la peine de leur garantir qu’il ne serait pas longtemps absent. Il ne comptait pas accompagner Cyan jusqu’à la frontière, mais il voulait lui dire au revoir et lui donner de quoi manger ainsi que le bracelet et le poignard.

Il retrouva assez vite la piste de Cyan et en marchant à bonne allure, voire courant par moments, il le rattrapa peu avant l’heure du déjeuner.
Il le dépassa et s’arrêta devant lui.  L’humain s’immobilisa également, à deux pas de lui, pâle, les yeux cernés et les lèvres craquelées.
— Pourquoi t’es-tu enfui dans la nuit, comme un voleur ?
— Je… Je… bredouilla Cyan.
Sa mauvaise haleine frappa Gulrik. Il se rappela soudain de l’odeur âcre qu’il avait senti dans la chambre de l’humain.
Il renifla de plus belle. Du vomi. Et autre chose, presque masquée. Un autre orc.
— Que s’est-il passé ?
Si quelqu’un s’en était pris à Cyan, il le payerait cher.
— R… Rien.
Il mentait. Stupide humain.
— D’où ton départ nocturne, répliqua Gulrik en leva un sourcil.
— Il… Il a voulu… J’ai dû…
Cyan leva une main tremblante vers sa bouche.
Il était ridicule à ne pas appeler un chat un chat et en même temps, Gulrik n’avait pas besoin d’un dessin. Même à demi-mots, et grâce à son odorat, Gulrik pouvait deviner qu’un orc avait baisé la bouche de Cyan, l’avait forcé.
— Qui ?
— Vaknor, murmura Cyan, en levant enfin ses yeux bleus vers l’orc.
Gulrik lui ferait regretter d’avoir posé ses sales pattes sur son humain. Il lui infligerait une mort lente.

mercredi 22 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 44

Gulrik se leva avant l’aube en râlant. Ce n’était pas tant ses devoirs princiers qui le mettait en rogne que l’humain.
Il n’en revenait pas de la manière dont Cyan l’avait traité la veille, le plantant là alors qu’ils étaient en train de discuter, juste après avoir refusé de visiter la forteresse en sa compagnie. Sans oublier qu’avant ça, quand il l’avait abordé Cyan avait paru fort distrait. Avait-il des vues sur un des orcs travaillant aux cuisines ? Non. Il avait paru content de voir Gulrik, ce qui rendait d’autant plus étrange sa pitoyable excuse pour ne pas faire un tour avec lui. Il n’était bien sûr pas totalement impossible que le travail que Cyan doive fournir aux cuisines l’épuise et qu’il soit vraiment trop fatigué…
Gulrik aurait dû cesser de se tourmenter avec l’humain. Polnuk lui avait assuré que cela se passait bien et que tout le monde le laissait tranquille.
Malgré ça, Gulrik s’était encore rendu aux cuisines : une première fois pour entendre de la bouche de Cyan qu’il s’y plaisait, une seconde sous prétexte qu’il avait un creux après son combat à mains nues avec Roknok. En vérité, cela ne lui avait pas suffi de l’apercevoir dans la cour les deux jours précédents. Il voulait le sentir et le toucher à nouveau, d’où sa proposition de visiter la forteresse. Il avait escompté lui montrer sa chambre aussi. Il n’avait bizarrement pas eu envie d’en faire profiter quiconque depuis son retour alors même qu’il avait reçu bon nombre d’invitations.
Au fond, son humeur irritable devait être liée à sa frustration sexuelle. Le point gênant dans ce raisonnement étant que personne ne l’obligeait à se contenter de sa main. Il voulait l’humain, seulement lui, encore une fois, au moins.
Gulrik prit le chemin de l’aile où il savait que dormait les travailleurs.
Se renseigner auprès de Polnuk pour savoir laquelle avait été attribuée à Cyan n’avait rien eu de compliqué, même si cela lui avait valu une remarque mordante du vieux.
Gulrik espérait bien qu’en cueillant Cyan à la fin de la nuit, avant que sa journée aux cuisines ne commence, il parviendrait à le convaincre de passer un moment avec lui. L’humain ne pourrait prétexter être épuisé après avoir dormi.
Gulrik trouva la chambre vide, les draps du lit retirés. Cyan était déjà debout. Il repartit aussi sec. Il y avait comme une odeur désagréable dans l’air.
L’humain ne se révéla être ni aux latrines ni aux cuisines, pour ainsi dire encore déserte à l’exception notable de Polnuk qui n’attendit pas que Gulrik l’interroge pour déclarer :
— Non, je n’ai pas vu ton humain.
Gulrik aurait pu prétendre être venu pour une autre raison, dû protester face à l’emploi du possessif, mais il lui plaisait.
Il repartit donc à la recherche de son humain, questionnant les orcs qu’il croisait sur son chemin.

mardi 21 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 43

— Je me demande ce que notre prince te trouve. Ta peau rose marquée par ses tâches fait penser à un porcelet qui s’est roulé dans la boue, un malade vu comment tu es maigre et fragile.
La comparaison n’était pas flatteuse. Elle était en revanche presque comique. Cyan avait cependant trop peur pour esquisser un sourire.
— Si ce n’est pas ton apparence, alors ça doit être quelque chose que tu fais, continua Vaknor. Montre-moi comment tu as séduis le prince, termina-t-il d’un ton impérieux.
Cyan demeura interdit. Il n’avait rien fait, rien dit même. Gulrik avait remarqué son désir et agit.
Vaknor lui attrapa le bas du visage sans ménagement et renouvela sa demande.
Cyan finit par comprendre ce qu’il voulait quand le pouce de Vaknor vint tirer sur sa lèvre inférieure.
Cyan secoua la tête, cherchant à se dégager en vain de l’emprise de l’orc dont les yeux d’or brillaient d’une lueur mauvaise.
— Tu n’as pas une once de force, l’humain. Cela a un côté jouissif.
Vaknor défit son pagne de sa main libre, dévoilant son érection.
Sa verge était grosse, mais certes pas aussi massive que celle de Gulrik.
— Suce, l’humain.
Un non étranglé échappa à Cyan. Il ne voulait pas. Vaknor était un orc au physique séduisant, mais il était déplaisant sur bien trop de plans. Cyan n’éprouvait pas le moindre désir pour lui.
Vaknor lui serra douloureusement les mâchoires et Cyan comprit qu’il aurait beau refuser et se débattre, le résultat serait le même. Il se retrouverait avec le pénis de l’orc en bouche. Tout ce qu’il gagnerait à lutter, ce serait des coups et des bleus.
Vaknor lui lâcha le visage pour l’empoigner par les cheveux et rabattit la tête de Cyan vers son entrejambe.
— Allez, l’humain, dévoile tes talents avant que je ne m’impatiente, dit Vaknor d’une voix menaçante.
Cyan ferma les yeux. Peut-être que s’il s’imaginait que c’était Gulrik, cela serait supportable.
L’odeur n’était pas la même. Elle était répugnante et non délicieusement musquée. Cyan donna quelques coups de langue avec réticence. Le liquide qui s’échappait du pénis de Vaknor avait un goût affreux.
L’orc, las de son manque de coopération, le manœuvra et enfonça brutalement son membre dans la bouche de Cyan, l’étouffant.
Tout s’obscurcit autour de lui. Il crut mourir.
Quand Vaknor, après avoir pris son plaisir, le libéra enfin, Cyan toussa encore et encore.
— C’était bon. Plus qu’à tester ton autre trou.
Cyan qui se sentait déjà malade se mit à vomir, rejetant le sperme de l’orc. Pas sur ce dernier, mais juste à côté, sur la couverture.
Vaknor eut l’air dégoûté.
— Cela pue. Je suppose que ce devra attendre demain, que tu aies nettoyé, déclara-t-il.
Il se leva, rajusta son pagne et quitta la pièce.
Cyan acheva de vider son estomac, recouvra son souffle et décida de partir. C’était la meilleure façon d’échapper à Vaknor et à n’importe quel autre orc qui voudrait s’en prendre à lui. Il pouvait bien sûr reporter l’incident à Polnuk, mais c’était la parole de Vaknor contre la sienne.
Gulrik, s’il était informé, croirait sûrement Cyan, mais d’ici là, il serait à la merci de Vaknor et son désir tordu de découvrir ce que le prince lui trouvait.
Cyan n’avait par ailleurs aucune envie que Gulrik apprenne la manière dont il avait laissé Vaknor l’utiliser.  Il aurait dû se défendre et résister davantage. Il se sentait plus minable que jamais.
Cela le rendait triste de s’éloigner de Gulrik, mais au moins, il n’aurait plus à le voir en séduire d’autres que lui et avoir le cœur brisé encore et encore.
Résider à Orcania aux côtés de Gulrik n’avait été qu’un doux rêve. En tant qu’humain, il n’était pas du bon côté de la frontière.

lundi 20 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 42

— Veux-tu visiter la forteresse ce soir ? demanda soudain Gulrik.
Plus de temps en compagnie de l’orc qui avait volé son cœur ? Cyan brûlait d’accepter. Il était avide de la moindre goutte d’affection, même si son amour était sans espoir.
L’apparition de Vaknor le retint.
— Je suis fatigué en fin de journée, murmura-t-il.
C’était vrai. Il commençait toutefois à s’habituer au rythme de la vie des cuisines. Et même épuisé, il aurait aimé se promener aux côtés de l’orc.
— Même pour un petit tour ?
— Oui. Désolé. Des tâches m’attendent.
Cyan se précipita vers un des bacs de pierre ou de la vaisselle sale s’était accumulée en son absence, sans un regard de plus vers Gulrik, même si cela le démangeait.
Il n’y avait rien entre Gulrik et lui. Il ne devait pas s’imaginer des choses. Et Vaknor non plus, autrement, il lui ferait payer.
C’était mieux ainsi. Passer davantage avec le prince ne ferait que renforcer les sentiments de Cyan à son égard et au bout du compte, ce n’en serait que plus douloureux quand Gulrik oublierait tout de l’humain qu’il avait ramassé et ramené par pitié chez lui.
Mais évidemment, Cyan regrettait de ne pas avoir accepté l’offre de Gulrik. Surtout, qu’avec sa chance, cela ne changerait rien pour Vaknor.
    Le soir venu, Cyan se coucha, mais ne s’endormit pas pour autant. Une part de lui espérait que Gulrik vienne le chercher malgré son refus, une autre s’attendait à ce que Vaknor débarque.
Il commençait à avoir les paupières bien lourdes, quand l’orc aux oreilles percées de multiples anneaux de bronze poussa sa porte et la referma d’un claquement sec. Ses yeux d’orc étincelaient de fureur.
Cyan s’en voulut de ne même pas avoir essayé de bloquer l’accès à sa chambre en déplaçant le lit devant.
— Le prince est encore venu te parler, cracha Vaknor, poings serrés.
— Non. Pas spécifiquement en tout cas. Il bavardait avec une orc, celle qui s’occupe des pains.
— Il ne lui a pas proposé de faire un tour à elle, répliqua Vaknor en s’asseyant sur le matelas de Cyan, juste à côté de lui.
Il avait donc entendu, à moins que quelqu’un ne lui ait rapporté la chose.
— C’est juste parce que je suis nouveau et que je ne connais pas les lieux.
L’orc eut un rire sans joie.
— Ne te moque pas de moi, l’humain. C’était une invite à partager sa couche.
Oh. Oui, sûrement. Cyan avait été naïf sur ce coup et bien bête de refuser.
Il aurait été toujours été temps d’affronter la colère de Vaknor après cela. Et pour un moment dans les bras de Gulrik, cela aurait valu la peine. Mais il avait dit non en espérant justement éviter de se retrouver dans la situation dans laquelle il était à présent.

vendredi 17 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 41

Il poussa la porte des cuisines et entra. Il repéra aussitôt Gulrik qui, un petit pain doré à la main, bavardait joyeusement avec une orc.
Cherchait-il à la charmer dans le but de la mettre dans son lit ? Une vive tristesse s’empara de Cyan. Savoir que l’orc pouvait séduire n’importe qui était une chose, et y assister en était une autre. C’était douloureux.
Il savait bien pourtant qu’il n’était rien pour Gulrik, rien d’autre qu’un des multiples partenaires avec lequel il avait couché. Pour Cyan, c’était différent. Gulrik était son premier. Son seul. Son unique. Et il ne souhaitait personne d’autre.
Il l’aimait, réalisa-t-il.
Gulrik qui en avait apparemment fini avec l’orc boulangère avança droit vers lui.
Cyan, bien que troublé par les sentiments dont il venait de prendre conscience, alla à sa rencontre.
— Tu te portes bien ? demanda l’orc.
Cyan acquiesça, le « oui et vous » restant coincé dans sa gorge nouée.
Il fallait qu’il dise quelque chose, n’importe quoi pour le retenir, ne serait-ce qu’un instant. Excepté que c’était une mauvaise idée. Il avait du travail et Vaknor risquait de revenir l’ennuyer si jamais il les voyaient discuter ensemble.
Il chercha l’inopportun des yeux. La Déesse soit louée, l’orc aux yeux d’or n’était pas en vue.
— Tu as l’air nerveux, commenta Gulrik.
Oh, ça oui, Cyan l’était et pour plein de raisons.
— Je… Je vous ai vu combattre dans la cour.
Cyan avait bégayé et dit la première chose qui lui était passé par la tête, comme si Gulrik en avait quelque chose à faire qu’un humain ait assisté à son entraînement.
— Roknok est un adversaire de taille, mais j’ai eu le dessus, déclara Gukrik, triomphal.
Cyan avait hélas raté cette partie. Il n’osa le préciser.
— Roknok est impressionnant, confirma-t-il, faute d’une meilleure répartie.
Gulrik se renfrogna.
— Cela ne l’a pas empêché de perdre.
Cyan ne connaissait pas assez bien les orcs pour savoir si Gulrik était effectivement meilleur que Roknok ou si le garde avait préféré laisser la victoire à son prince. Ce qu’il savait en revanche, c’est que s’il ne trouvait rien à répliquer, la conversation allait se terminer et Gulrik, partir. En même temps, le retenir avec des mots creux semblait contre-productif.

jeudi 16 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 40

— Qu’as-tu de si spécial, l’humain ? attaqua Vaknor.
— Rien, répondit Cyan, regrettant l’absence de verrou à sa porte.
Lui qui avait été si content d’avoir un lit et un peu d’intimité, de ne pas coucher dans un dortoir...
— Je ne te crois pas. Tu es si bon que ça à baiser ?
Cyan ne savait pas comment Vaknor et le roi avaient deviné que lui et Gulrik avaient eu des rapports sexuels, mais le regard et le ton mauvais de Vaknor ne promettaient rien de bon.
— Non… Il a juste eu pitié de moi.
Cela lui faisait mal de le dire, car ce n’était pas une vérité agréable, mais il espérait bien qu’elle calmerait Vaknor.
— Peut-être, voulut bien admettre l’orc. Oui, cela doit-être cela, ajouta-t-il avec une satisfaction mauvaise qui fit froid dans le dos à Cyan.
Après le départ de Vaknor, il mit longtemps à s’endormir, craignant qu’il ne revienne.
    Une nouvelle journée épuisante s’écoula.
Cyan,  en allant puiser de l’eau, eu la chance d’apercevoir Gulrik qui traversait à la cour. Le prince le repéra aussi et lui adressa un salut de la main.
Cette nuit-là, la Déesse soit louée, Vaknor ne lui rendit pas visite.
    L’aube se leva sur un nouveau jour bien rempli.
Cyan portait avec peine un seau pour les cochons quand il vit Gulrik s’entraîner aux combats à mains nues avec l’orc massif qui gardait la salle du trône lors de son arrivée.
Cyan ne put s’empêcher de ralentir pour admirer les orcs. Il était loin d’être le seul distrait par le spectacle qu’ils offraient. De nombreux orcs s’étaient même assis pour regarder.
Cyan reprit sa marche. Il ne pouvait pas se permettre de paresser. Il était humain.
Quand il repassa dans l’autre sens, le combat était terminé et Gulrik avait disparu de même que son adversaire.
Cyan ravala sa déception.
Il aurait déjà dû être content d’avoir l’opportunité de le voir, ne serait qu’un instant. Il n’aurait peut-être pas cette chance les jours suivants.
Gulrik lui manquait.
Durant le séjour à Manchor, puis pendant le voyage à la forteresse, ils avaient été constamment ensemble, il avait même dormi avec lui.
Cyan avait à présent une conscience aiguë de sa solitude.

mercredi 15 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 39

Cyan n’osait pas ouvrir la bouche non plus. Mieux valait se fondre dans le décor. Il écoutait cependant les conversations des orcs qui l’entouraient.
Ces derniers n’étaient toutefois pas de grands bavards. Leurs échanges, quand ils travaillaient, étaient d’ordre utilitaire et quand ils mangeaient, eh bien, c’est la nourriture qui avait leur attention.
Il était également possible que conscients de la présence de Cyan, les orcs ne se sentent pas libres de discuter. Si c’était le cas, ils finiraient par se détendre.
En attendant, Cyan, lui était nerveux. Il avait peur de ce qui se passerait s’il ne se montrait pas à la hauteur. Il ne pensait pas que Polnuk le frapperait, mais cela restait une possibilité. Le vieux pouvait aussi aller voir Gulrik pour lui faire comprendre que Cyan n’avait pas sa place aux cuisines. Dans ce cas, il serait sûrement renvoyé.
Retourner à Manchor n’avait rien d’une perspective horrible, pourtant l’idée déplaisait à Cyan. Parce qu’alors, il serait loin de Gulrik, sans aucune chance de le revoir. Non pas qu’il ait beaucoup d’opportunité de le croiser aux cuisines, mais…
Cyan leva la tête.
Gulrik était là, à quelques mètres de lui.
Leurs regards se rencontrèrent.
Gulrik lui sourit largement et le cœur de Cyan se mit à battre fort dans sa poitrine. Ses mains cessèrent de s’activer un instant.
Gulrik le rejoignit.
— Tout va bien ?
Sa belle voix gutturale arracha un frisson à Cyan.
— Oui, assura-t-il en s’emparant d’une autre assiette.
Il ne voulait pas que Polnuk qui veillait au grain non loin lui reproche quoi que ce soit.
— Tu te plais ici ?
— Oui.
Cyan se mordit la lèvre. Il aurait dû trouver autre chose à dire. N’importe quoi. Quelque chose de moins laconique. Mais l’air lui manquait et il était troublé autant par la proximité de Gulrik que par le fait qu’il ait pris la peine de s’assurer que Cyan s’était bien intégré.
— Parfait, dit Gulrik.
Il passa brièvement la main dans les cheveux de Cyan avant de partir.
Le geste laissa Cyan interdit.
L’échange n’avait duré rien du tout et Cyan n’aurait pas dû y accorder autant d’importance.
Il se révéla qu’il n’était pas le seul. Vaknor n’avait pas perdu une miette de la scène et il vint confronter Cyan dans sa chambre au début de la nuit.

mardi 14 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 38

Vaknor se montra plutôt avare en explications, mais les tâches demandées à Cyan n’en nécessitaient pas vraiment.
Cyan n’eut plus qu’à se mettre à l’ouvrage sous  les regards curieux des orcs.
Le vieil Polnuk veillait cependant au grain et il rappela tout le monde à l’ordre.
— Ne vous laissez pas distraire par l’humain parmi nous et s’il vous dérange, allez vous plaindre au prince !
Il ne pouvait pas à être sérieux.
Cyan qui avait déjà été de corvée de vaisselle dans son enfance quand il travaillait à l’auberge, n’eut pas de mal à laver choppes, assiettes, louches et couteaux. Il eut en revanche du mal avec certains plats particulièrement lourds.
Vaknor se moqua de sa faiblesse et d’autres orcs rirent face aux efforts que Cyan devait fournir pour les manipuler.
Cela ne dérangea pas vraiment Cyan. Il avait l’habitude. Ce qui comptait, c’était que Polnuk soit satisfait.
Porter des seaux d’épluchures dehors se révéla également une tâche dure, de même que tirer et ramener de l’eau du puits. Cyan ne manquait pas de muscles – il avait longtemps travaillé à la forge – mais sa force était moindre par rapport à celles des orcs.
A la fin de la journée, il n’en pouvait plus. Il avait les mains rouges et douloureuses et des tiraillements dans les bras, mais l’estomac bien plein. Les orcs étaient généreux sur les portions servies. C’était même trop pour Cyan qui en tant qu’humain n’avait pas le même gabarit à nourrir.
Après avoir refermé la porte de la pièce qui lui avait été attribué, il s’allongea et s’endormit sur le champ.

    Un coup à sa porte le réveilla en sursaut à l’aube.
— Debout, l’humain !
Cyan se leva de suite.
Il fit un tour aux latrines, en essayant d’ignorer les orcs qui le fixaient, puis se rendit aux cuisines.
Après un petit déjeuner copieux, Cyan lava, frotta et porta quantité de seaux.
Les orcs qui l’entouraient lui prêtaient déjà moins d’attention que la veille. D’ici quelques jours, ils en viendraient à l’ignorer.
En tout cas, hormis Polnuk et Vaknor, nul ne s’était embêté à lui adresser la parole. Leur curiosité n’allait apparemment pas jusque là. A moins que ce soit parce que personne n’ait envie d’être vu en train de faire ami-ami avec un humain.

lundi 13 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 37

Cyan aurait voulu que la chaleur de la main de Gulrik sur lui ne s’estompe pas. Il se demandait ce qu’il faisait là devant ce vieil orc barbu qui parlait tranquillement de manger des humains.
— Notre prince est bien gentil, mais j’ai d’autres choses à faire que m’occuper de ses chats errants.
Cyan ne commenta pas. Que Gulrik soit du genre à ramasser des animaux blessés ne le surprenait pas.
— Vaknor, viens ! s’exclama Polnuk. Tu as suivi la situation, n’est-ce pas ? Charge-toi de lui, veux-tu.
Un orc aux yeux d’or et aux oreilles percées de plusieurs anneaux de bronze approcha dans son pagne qui ne cachait rien de sa musculature.
— Bien, répondit-il.
— Toi qui est toujours soucieux de plaire au prince, traite-le bien.
Le vieil orc s’éloigna sur ces mots, laissant Cyan aux bons soins de Vaknor qui le jaugea du regard avant de se pencher vers lui, narines frémissantes.
Cyan éprouva un sentiment de gêne profond. A la réflexion, la compagnie de Polnuk semblait préférable.
Une grimace déforma les traits de Vaknor.
— Ne t’y crois pas trop parce que tu as eu la faveur du prince, cracha-t-il.
Cyan rentra la tête dans les épaules. Il n’avait pas besoin qu’on lui dise. Il savait bien à quoi s’en tenir. Gulrik avait eu pitié de lui et s’était amusé avec lui, et à présent, c’était fini. La parenthèse enchantée était close.
Même si Gulrik ne s’était pas révélé être un prince, le résultat aurait été identique. Il aurait peut-être été aussi bien que le roi des orcs décide de renvoyer Cyan à Manchor, mais au moins, il avait du travail.
— Il ne baise guère plus de deux fois avec la même personne, précisa Vaknor.
Deux choses, l’une, soit l’orc aux yeux d’or avait déjà eu le privilège de partager la couche du prince, soit il comptait le faire un jour.
— Compris ? demanda Vaknor.
— Oui.
L’orc se redressa enfin et lui fit visiter les cuisines.
Les cheminées étaient vastes, occupées par des marmites ou des pièces de viandes pour certaines placées sur des tourne-broches maniés par de jeunes orcs.
Sur de grandes tables, des femmes orcs coupaient, épluchaient, pétrissaient ou mélangeaient.
Il y avait de grands bacs de pierre où assiettes, gobelets et plats étaient lavés.
Vaknor le conduisit jusqu’à une porte s’ouvrant sur la cour  où se trouvait le puits et les seaux d’épluchures qui devaient être portés aux cochons, de l’autre côté.
Pour finir, il désigna l’aile où chacun d’entre eux avait une chambre et un lit.

vendredi 10 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 36

— Que penses-tu de mon fils ?
Les joues de Cyan devinrent toutes rouges. Il suffisait à priori de l’embarrasser pour parvenir à ce résultat. Cela donne presque envie de le faire exprès parce que c’était vraiment fascinant.
— Qu’il est généreux, votre majesté. Il m’a offert des chaussures spéciales pour corriger mon boitement.
— Que signifient ses marques sur ton visage ?
Gulrik remarqua que Cyan se raidissait.
— Rien. Elles sont de naissance, votre majesté.
Son père se leva de son trône et attrapa brusquement Cyan pour examiner la paume de ses mains, puis il l’empoignant par le menton sans ménagement, forçant l’humain à ouvrir les lèvres.
Gulrik serra les poings, n’appréciant guère le traitement qu’infligeait son père à Cyan.
— Je vais tolérer sa présence pour le moment, déclara son père en libérant Cyan. Mais pas juste pour chauffer ton lit, ajouta-t-il.
Gulrik aurait mieux fait de se retenir d’utiliser la bouche de Cyan. Excepté que c’était trop bon et qu’il avait envie de recommencer.
— Cela n’a jamais été mon intention.
— J’espère bien ! s’exclama son père avant de les renvoyer d’un geste impérieux de la main.
Un instant plus tard, ils étaient dehors. Gulrik détacha aussitôt Cyan et rendit la lanière à Roknok.
Sur le chemin, il avait eu le temps de réfléchir quel travail pourrait faire Cyan à la forteresse. Ils manquaient toujours de bras aux cuisines. Il y conduisit Cyan et l’introduisit auprès du vieux Polnuk qui régnait sur les lieux.
— Les humains ne sont pas bons à manger, grommela le vieil orc, comme s’il avait eu un jour l’occasion de goûter à la chair humaine.
Il n’était pas assez vieux pour cela. Mais durant la guerre, en période de famine, certains orcs avaient en effet testé.
Cyan, blanc, muet et raide, coula un regard inquiet à Gulrik qui lui adressa un sourire rassurant. Il aurait peut-être dû préparer l’humain au côté pince-sans-rire de Polnuk.
— Je suis certain que tu sauras faire meilleur usage de lui, déclara Gulrik.
— Humpf. Pas envie qu’il m’empoisonne mes plats. Enfin, je suppose qu’il peut nettoyer la vaisselle et évacuer les déchets, répondit Polnuk en tirant sur sa barbe blanche.
— Oui, confirma Cyan.
Ce n’était peut-être pas des tâches attrayantes, mais  il était placé.
Gulrik n’avait plus qu’à laisser l’humain.  Il se sentait étrangement réticent à le faire. Il n’avait néanmoins aucune raison valable de s’attarder. Il pressa l’épaule de Cyan et s’en fut.

jeudi 9 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 35

— Je lui ai promis du travail. Ne compte pas sur moi pour revenir sur ma parole.
— Promis ?!
Son père s’étouffa à moitié sur le mot. Une promesse, c’était quelque chose d’important pour un orc.
Gulrik n’avait dans les faits donnés aucune garantie à Cyan. Il s’en voulut presque de mettre son père dans un état pareil pour un humain. Cependant, Cyan méritait d’avoir une place quelque part et si ce n’était pas chez les humains, pourquoi pas chez les orcs ?
— Fais-le entrer. Mains attachées.
Gulrik, même s’il en avait envie, se retint de protester. Son père allait se rendre compte de lui-même que c’était une précaution aussi vaine que stupide.
Il quitta la salle du trône et transmit les instructions royales.
Cyan, tout pâle, se tenait immobile telle une statue de marbre en face de Roknok. C’est à peine s’il respirait.
Il tendit docilement les poignets pour que Roknok lui attache les mains avec une des multiples lanières de cuir qu’il avait autour de sa taille.
Gulrik serra les mâchoires en voyant Roknok toucher Cyan. Il savait que Roknok ne faisait jamais que son travail, mais Gulrik eut du mal à se contenir. Cyan était à lui. En quelque sorte.  Son instinct possessif et protecteur à son égard avait assurément pris une ampleur déplacée. Fort heureusement, maintenant qu’il était de retour chez lui, il allait pouvoir mettre un peu de distance entre eux et tout allait redevenir normal. Il aurait juste à s’assurer de façon périodique que Cyan s’était bien intégré. Du moins, si son père daignait accepter que l’humain reste.
La porte fut rouverte.
Cyan l’accompagna à l’intérieur, tête basse et une détestable odeur de peur accrochée à lui. Il aurait pourtant dû savoir que Gulrik ne laisserait personne le blesser.
— Présente-toi, humain, ordonna son père d’un ton aussi glacial que royal.
— Je m’appelle Cyan, votre majesté, bredouilla l’humain sans donner aucune précision supplémentaire.
Le silence se prolongea, plein de tension avant que son père n’explose.
— Je le savais déjà, ça ! D’où viens-tu ? Quel âge as-tu ? Qui sont tes parents ?
Cyan répondit d’une voix mal assurée et hésitante :
— J’ai été abandonné à Manchor quand j’étais bébé et élevé au temple durant mes premières années, j’ai ensuite été pris dans une auberge pour faire le ménage. Quand j’ai été remplacé par un autre enfant et j’ai fini par trouver du travail dans une forge jusqu’à la mort de son propriétaire et enfin, votre fils m’a embauché comme guide.
Gulrik ne savait pas s’il devait remercier son père qui en interrogeant l’humain, lui permettait d’en apprendre plus sur ce dernier ou le maudire, parce que l’histoire de Cyan était bien triste.

mercredi 8 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 34

Gulrik avait confiance en Roknok, mais il était tout de même mécontent d’abandonner Cyan derrière lui.
Il remonta la vaste salle jusqu’au massif trône de pierre où était assis son père, royal et indéchiffrable.
— Mon fils, j’ai ouïe dire que tu avais rapporté un humain dans tes bagages.
Gulrik ne s’étonna pas que son père soit déjà au courant. Un orc avait dû courir au devant d’eux pour le prévenir. C’était ridicule. Enfin, celui lui évitait de l’annoncer.
Plutôt que de répondre, il attendit de voir ce que son père en pensait, même s’il en avait une bonne idée.
— Tu ne nies pas, Gulrik ? Comment as-tu osé faire entrer à Orcania pareille vermine et jusque dans mon domaine de surcroît ?
— Nous recevons bien des dignitaires et des messagers humains de temps à autre.
— Contraints et forcés pour maintenir la paix. Cet humain sorti d’on ne sait où a toutes les chances d’être un espion doublé d’un assassin.
Gulrik rit, ce fut plus fort que lui, ce qui ne plut évidemment pas à son père.
— Il n’y a rien de drôle là-dedans, tonna son géniteur en assenant un coup de poing sur l’accoudoir de son trône.
— Cyan est inoffensif.
— Cyan ?
— C’est son nom. Je l’ai pris avec moi parce que les autres humains le maltraitaient.
La discussion fatiguait déjà Gulrik. Il avait été si agréable de ne pas avoir à parler pour rien ces derniers jours en compagnie de Cyan.
— Ce devait être juste une mise en scène. Tu as été trompé. Nous allons le renvoyer à Humania.
Son père allait user de sa royale autorité pour avoir le dernier mot, comme à chaque fois que Gulrik ne se comportait pas de la façon souhaitée.
Obtenir le droit de visiter Manchor avait été dur. Il lui avait fallu négocier pendant une longue année.
— Rencontre-le d’abord. Tu verras par toi-même que tu n’as rien à craindre de lui, que personne ne m’a berné.
Nul comédien n’aurait réussi pareille performance, ce mélange de fragilité et d’humilité, ce désir brut qu’il laissait transparaître pour Gulrik…
— Je n’ai pas de temps à perdre avec tes bêtises. Je ne veux pas qu’un humain séjourne chez moi. Tu es trop naïf de croire qu’il a été placé sur ton chemin par hasard.
Gulrik était plutôt d’avis que c’était le destin, mais il le garda pour lui. C’était trop en dévoiler, lui semblait-il.

mardi 7 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 33

Il se réveilla dans les bras de l’orc qui marchait. Au dessus d’eux, la lune brillait dans un ciel qui s’éclaircissait. La nuit était déjà à priori sur sa fin.
Gulrik l’avait porté pendant qu’il dormait.
— Bonjour, souffla Cyan, désorienté.
Gulrik émit un grognement en guise de réponse. Il n’était définitivement pas d’humeur bavarde ce matin. Il ne l’était jamais, à dire vrai.
Aux premières lueurs de l’aube, l’orc le déposa à terre.
Cyan était bon pour marcher à nouveau. Il était tout courbaturé et cela n’avait rien d’agréable, mais il se ne plaignit pas. Cela ne servait à rien et l’orc l’avait assez pris en charge comme ça. Il avait  sacrifié son sommeil pour rattraper le retard causé par la lenteur de Cyan.
Dans la matinée, une forteresse de pierre apparut en vue. Elle était imposante et intimidante. Cyan espéra que ce n’était pas là leur destination. Il ouvrit à plusieurs reprises la bouche pour demander, mais la referma à chaque fois. Il ne voulait pas ennuyer l’orc. Peut-être n’était-ce qu’une étape de leur voyage, peut-être pas. Il finirait bien par le savoir. De toute façon, maintenant qu’il était embarqué, il n’avait guère le choix.
Ils finirent par arriver devant les hauts murs. Gulrik interpella les orcs casqués qui les gardaient et deux cordes leur furent lancées. Ils furent hissés sur les remparts.
— Nous sommes contents que vous soyez de retour, prince, déclara l’un des orcs qui les avait aidé à monter.
Cyan avait dû mal entendre ou alors c’était un surnom de Gulrik.
— Sa majesté votre père vous attend dans la salle du trône, annonça l’autre.
Cyan cessa de respirer un instant. Non. C’était impossible. Gulrik ne pouvait pas être le fils du roi des orcs.
— L’humain doit-il être conduit en prison ?
— Non, il est avec moi, répondit Gulrik.
— Drôle de souvenir à ramener, marmonna à voix basse l’orc qui avait mentionné le roi.
Gulrik lui adressa un regard sombre qui semblait signifier qu’il se passait de ses commentaires, puis il avança sur le chemin de ronde.
Cyan, encore sous le choc, se dépêcha de le suivre avec un temps de retard. Il valait mieux ne pas apprendre comment les gardes se comporteraient avec lui en l’absence de Gulrik. Leur prince.
Ce devait être un fils cadet, pas l’héritier du trône, autrement, il n’aurait sûrement pas été autorisé à se promener comme ça sans escorte. Même comme ça, se dire que Cyan avait servi un prince, qu’il avait même partagé sa couche, était tout bonnement incroyable. Nul ne le croirait jamais s’il racontait ça, non qu’il en ait l’intention. Les humains n’étaient pas supposés désirer les orcs comme partenaires.
Ils s’engagèrent dans un escalier qui descendait dans la cour qu’ils traversèrent jusqu’à la haute tour centrale.
Tous les orcs qu’ils croisèrent manifestèrent leur joie à revoir Gulrik. Le prince, puisque c’en était un, adressa quelques mots à certains sans cesser de marcher.
Après un dédale de couloirs et un interminable escalier, Gulrik s’arrêta enfin devant une haute de porte à double battant devant laquelle était planté un orc massif.
— L’humain n’entre pas, déclara-t-il.
— Il ne présente aucun danger, répliqua Gulrik.
— Hors de question qu’il soit dans la même pièce que le roi.
Gulrik et l’orc se toisèrent dans un silence chargé de tension.
Cyan attendit sagement que son sort soit décidé. Il aurait préféré rester auprès de Gulrik, mais en même temps, il ne tenait pas à rencontrer le roi des orcs. Il se sentait déjà assez mal à l’aise sans cela.
— Très bien, gronda Gulrik. Il attend là. Et si quelqu’un touche à un de ses cheveux, tu m’en répondras.
Que Gulrik veuille le protéger réchauffa Cyan de l’intérieur. Prince ou pas, l’orc semblait avoir toujours son bien-être à cœur.
— Comme mon prince voudra.
L’orc se décala, ouvrit d’une poussée et dès que Gulrik fut entré, referma.

lundi 6 janvier 2020

L'empreinte de l'orc - 32

Il se réveilla une fois de plus sur l’orc, infiniment plus confortable que le sol.
Gulrik émergea en même temps et lui adressa un sourire qui alla droit au cœur de Cyan.
Il déglutit. Il ne fallait pas qu’il s’imagine des choses. Il était évident qu’une fois que l’orc serait rentré chez lui, il cesserait de prendre du bon temps avec Cyan. S’il couchait avec lui, c’était faute de mieux.
Il ne leur fallut pas longtemps pour être prêts à repartir – un brin de toilettage, un peu d’eau et de biscuits secs sortis du sac de l’orc que Cyan eut du mal à croquer tellement ils étaient durs. Sûrement fallait-il d’épaisses et solides dents d’orc pour les broyer sans peine.
Cyan s’efforça de marcher à bonne allure. Gulrik resta à sa hauteur, son irritation perceptible.
Cyan tenta d’accélérer et serait tombé si l’orc n’avait pas été là pour le retenir.
— Va à ton rythme, intima-t-il en le relâchant.
— Je suis désolé d’être aussi lent.
— Ne t’excuse pas pour cela.
La formule surprit Cyan. L’orc était mystérieux à bien des égards.
Ils étaient en route depuis un petit moment quand Cyan aperçut des orcs au loin.
A mesure que la journée avançait, il en vit de plus en plus. Et bien sûr, pas l’ombre d’un humain, à part lui. Ils étaient vraiment à Orcania.
Certains orcs qu’ils croisèrent saluèrent Gulrik, tout en jetant des regards empreints de curiosité à Cyan.
Ils passèrent également devant de grandes maisons qui se fondaient presque dans le paysage.
En début de soirée, Cyan était si épuisé qu’il peinait à mettre un pied devant l’autre. Le sol était irrégulier avec pentes, bosses et rochers si bien que c’était plus fatiguant que d’arpenter les rues de Manchor.
— Arrêtons-nous, annonça soudain l’orc.
— Il est encore tôt, argua Cyan.
Gulrik, la mine renfrognée, haussa un sourcil.
Cyan se sentit idiot. Il n’aurait pas dû protester, pas alors qu’il n’était plus en état de faire un pas de plus, seulement, il s’en voulait de ralentir l’orc.
Il s’assit par terre en silence.
Gulril le prévint qu’il partait chasser et ne tarda pas à revenir avec deux oiseaux de bonne taille dont Cyan ne connaissait pas le nom de l’espèce.
Ce fut l’occasion pour Cyan d’apprendre à déplumer.
Puis, bien que la nuit soit loin d’être tombée, Gulrik installa la couverture pour qu’ils dorment. Éreinté, Cyan s’allongea avant l’orc et sombra aussitôt dans le sommeil.
Plus tard, il sentit l’orc remuer, mais ses paupières étaient si lourdes qu’il ne parvint pas à les soulever.
— Dors, dit l’orc.
C’était un ordre facile à suivre et Cyan replongea.