jeudi 16 juin 2016

Pause

Je sais, ça ne fait pas longtemps depuis la dernière pause, mais je suis fatiguée et déprimée. Le danger de continuer dans ses conditions serait de bâcler l'histoire, le prochain épisode sera donc posté le vendredi 1er juillet. Désolée pour ceux et celles qui ont hâte de lire la suite.

Cœur de fantôme - 68

— Je n'avais pas songé à tout ce que cela impliquait, avoua Zack.
— C'est bien que Kazuya se montre respectueux de la vie du policier, mais résultat, il nous laisse sur le banc de touche !
— En même temps, tu dois bien admettre que mener une enquête criminelle n'était pas de notre ressort.
— Après tout ce que les fantômes m'ont amené à faire ces dernières années, je n'étais pas à ça près.
— Cela ne t'aurait pas dérangé que cette femme reste en toi des jours et des jours ?
Nino soupira et fut bien obligé de reconnaître que si, toute sympathique qu'elle soit. Mais il se sentait coupable de la situation. Au final, il n'était pas capable d'aider les fantômes à passer de l'autre côté, c'était Kazuya qui s'appuyait tout le boulot grâce à un pauvre gars qui n'avait rien demandé à personne.
Zack essaya de le consoler en parlant de son manque de courage. Il avait été terriblement soulagé que Kazuya s'empare du problème. Coller le train à un tueur, très peu pour lui !
Nino prit sa défense :
— Tu n'es pas un lâche pour autant. Face à Kazuya, la première fois, tu n'as pas pris la fuite.
Zack opina :
— Heureusement, car j'aurais eu beaucoup à regretter !
— Même si je t'embarque dans de drôles d'histoires ?
— Au moins, je ne m'ennuie jamais.

    Une semaine s'écoula sans que Kazuya ne donne le plus petit signe de vie - logique pour un  fantôme ! - mais cela leur pesa à tout les deux. Il leur manquait. Ensemble, ils n'arrêtaient pas de parler de lui. Qu'il joue la comédie à une étrangère déplaisait autant à Nino qu'à Zack. Certes, ce n'était pas vraiment lui, mais l'homme qu'il possédait, mais cela demeurait troublant et mettait en lumière un certain déséquilibre dans leur trio. Quoi qu'ils fassent, ils avaient deux corps pour trois. Kazuya avait beau les embrasser à sa manière, ce n'était jamais vraiment lui que Zack et Nino caressaient, mais leurs peaux respectives. En un sens, il leur échappait toujours. Nino était convaincu que Kazuya en souffrait, mais hélas il n'y avait pas de solution. Cela faisait longtemps que le corps de Kazuya était redevenu poussière et s'emparer de l'enveloppe charnelle de quelqu'un revenait à lui voler son existence. Même les personnes dans le coma – apparentes coquilles vides – ne méritaient pas ça et de toute façon, ce ne serait pas lui.

mercredi 15 juin 2016

Cœur de fantôme - 67

Après un instant d'hésitation, Nino acquiesça et vacilla. La femme fantôme s'en était allée.
— Nous rentrons, annonça Kazuya-Zack.
— Mais on ne peut pas laisser tomber ! s'écria aussitôt Nino.
— Ce n'est pas mon intention. Cependant, il est impossible de faire incarcérer le meurtrier avec le témoignage d'un fantôme. Zack a un travail, toi aussi. Le mieux est que je possède un policier pour m'occuper de trouver des preuves de sa culpabilité. Il suffira de téléphoner pour signaler la présence d'un squatteur rue des Sycomores pour en faire venir un.
Cette implication d'une tierce personne gênait Nino. Elle arrangeait Zack qui ne tenait pas à approcher un criminel, même s'il plaignait le policier qui serait temporairement le pantin de Kazuya. Nino finit par s'incliner et ils reprirent le train dans le sens inverse.
Une fois de retour, ils envoyèrent un mail à l'étudiant pour l'informer que suite à des évènements indépendants de leur volonté, ils ne pourraient le débarrasser du fantôme qui hantait les lieux que plus tard. En post scriptum, ils lui recommandèrent d'utiliser un casque pendant qu'il visionnait ses vidéos pornos.
Ils passèrent ensuite le coup de fil à la police. Zack comme Nino auraient aimé être dans le coin pour voir comment les choses se déroulaient, mais Kazuya le leur interdit. Il ne fallait pas risquer qu'ils se fassent interpeller bêtement. Il les appellerait pour leur indiquer que « l'infiltration » avait réussi.
Kazuya quitta le corps de Zack qui resta en tête à tête avec Nino dans l'appartement. Comme ils étaient dans l'expectative, ils n'étaient d'humeur à rien faire. Zack finit par lancer une comédie romantique pour se distraire et Nino le joignit.
Le film terminé, ils étaient toujours sans nouvelles. Ils sortirent faire des courses. Le mobile de Zack sonna, mais ce n'était que sa mère, il abrégea la conversation.
Ils avaient rangé leurs achats depuis déjà une bonne heure quand une voix inconnue retentit dans l'appareil :
— C'est moi, Kazuya. Première partie de la mission accomplie. Ne vous étonnez pas si je ne vous donne pas de nouvelles durant plusieurs jours. Je ne veux pas trop perturbé la vie de l'homme que j'occupe. Il est marié et a trois enfants.
Nino qui écoutait à côté voulu s'emparer du téléphone. Zack le lui passa volontiers. Il avait besoin de digérer que Kazuya allait mener la vie d'un autre – jouer le père et le mari. C'était une forme de trahison et d'infidélité pour le moins étrange.
— Tu ne peux pas faire ça... Il y a sûrement une autre solution... Oui, je savais bien que tu ne serais pas libre d'agir exactement comme tu voudrais une fois que tu aurais endossé l'identité de ce policier inconnu, mais... Non, Kazuya, ne raccroche pas... Et merde !

mardi 14 juin 2016

Cœur de fantôme - 66

« D'après nos renseignements, il ne s'en prend qu'aux femmes. »
Ça ne rassurait pas plus que cela Zack. Il fallait être un monstre pour tuer.
« La peur est saine, car elle implique la prudence. Mais il ne faut pas qu'elle paralyse non plus. »
Zack avait choisi de travailler dans un centre sportif, pas une carrière dans la police.
— Je suis certaine qu'il ne m'a pas menti. Il était trop content de se vanter que lui resterait dans l'histoire comme Paul Adchmidi, le violeur et tueur aux appartements, alors que moi je sombrerai dans l'oubli, anonyme victime.
C'était bien qu'ils aient un nom, mais ce n'était pas comme s'ils avaient des preuves tangibles de la culpabilité du type.
« Chaque chose en son temps » le morigéna gentiment Kazuya.
— Il demeurera peut-être dans les mémoires, mais pas impuni, comme certains.
— Je partirai tranquille quand il aura été condamné sachant qu'il ne peut plus nuire.
— Vous ne voulez pas retourner à l'appartement pendant que nous découvrons où habite à l'heure actuelle ce  Paul Adchmidi ?
Zack aurait voulu laisser la police s'en charger. Hélas, ils ne pouvaient décemment se présenter au poste et annoncer qu'ils tenaient de source sûre – une de ses victimes décédées ! – que  Paul Adchmidi était un tueur.
— Je préfèrerai vous accompagner. J'en ai assez d'être enfermée entre quatre murs.
Kazuya, même s'il tenait à ce que Nino soit libre d'être à nouveau lui-même, n'insista pas.
Sur une suggestion mentale de Zack, ils se rendirent dans un internet café pour consulter les pages jaunes. Par chance, l'horrible Paul était dedans et il y en avait qu'un seul. Par contre, il vivait dans une autre ville, ce qui nécessitait de reprendre le train. Comment allaient-ils faire avec l'étudiant ? Pourraient-ils boucler l'enquête  rapidement ? La femme, à l'intérieur de Nino, n'était pas pénible, mais tout de même...
Zack était en panique et Kazuya l'exhorta au calme.
« Je vais me charger de tout. »
Une nouvelle multitude de questions envahit l'esprit de Zack, mais Kazuya, plutôt que d'y répondre, s'adressa à la femme :
— Il faut que vous sortiez de ce corps. Ce qui va suivre est un travail de longue haleine. Je vous promets que nous viendrons vous informer.
— Je ne sais pas si je peux vous faire confiance. La dernière fois, ça m'a coûté la vie !
— L'ayant perdu, vous ne risquez plus grand chose, si ?
S'il avait pu, Zack aurait applaudi cette répartie.

dimanche 12 juin 2016

Cœur de fantôme - 65

— Une fois que vous nous aurez dit tout ce que vous savez sur votre assassin, seriez-vous d'accord pour réintégrer l'appartement le temps que nous le trouvions ?
Nino pencha la tête sur le côté et chercha à enrouler une mèche de cheveux autour de son doigt, chose impossible vu qu'il les portait court, ce qui ne devait pas être le cas de la femme de son vivant.
— Est-ce vous pourriez convaincre celui qu'y habite d'arrêter de regarder ces affreuses vidéos ?
— Non. Mais vous n'êtes pas obligée de rester devant...
Exactement la pensée de Zack ! Une vidéo porno de temps en temps, ça ne faisait de mal à personne.
— Mais je les entends toujours ces jeunes femmes qui se font violer, même si c'est pour de faux... Ça me rappelle ma fin et ça me met en rage, je n'y peux rien. C'est nouveau pour moi d'être en mesure de manifester ma présence. Jusque là, je n'avais jamais été remarquée... et j'ai essayé, croyez-moi !
Zack comprit mieux la répulsion du fantôme vis-à-vis des fameuses vidéos. A chacun ses fantasmes, mais après ce qu'elle avait vécu, c'était plus que compréhensible qu'elle ne le supporte pas.
— Après seulement quinze ans à hanter, c'est impressionnant que vous arriviez à faire cela.
Zack trouva amusant Kazuya la complimente sur ses talents de fantôme.
— Vous vous y connaissez bien, dirait-on...
— Oui, moi aussi je suis un fantôme et je possède cet homme avec son accord.
— Intéressant. Et celui que j'occupe, c'est votre petit ami, c'est ça ?
Sur ce coup, Nino n'avait pas l'air d'avoir réussi  à protéger ses pensées intimes du fantôme. Zack éprouva de l'embarras, mais Kazuya demeura de marbre.
— En effet.
— De mon vivant, j'aurais adoré sortir avec un homme séduisant comme vous...
Voir Nino triste, même si ce chagrin ne lui appartenait pas, peina Zack.
— Nous allons tout faire pour que votre assassin paye son crime.
— Merci.
— Après, nous ne pouvons pas vous garantir que nous allons réussir.
— Même si vous n'êtes pas des enquêteurs professionnels, vous devriez pouvoir y parvenir. Je connais son nom.
La nouvelle était surprenante.
— C'était quelqu'un qui faisait partir de votre entourage ?
— Non.
— Alors, comment pouvez-vous êtes sûre de son identité ? Il a pu vous en fournir une fausse.
Zack était impressionné par la manière dont Kazuya raisonnait, gardant un sang-froid remarquable. Lui était mal à l'aise à l'idée de devoir mettre la main sur un tueur.

vendredi 10 juin 2016

Cœur de fantôme - 64

— Bonjour, nous venons pour le fantôme, déclara Kazuya-Zack.
L'étudiant regarda à droite et à gauche, vérifiant qu'aucun de ses voisins de pallier n'était là pour entendre et les fit entrer.
La pièce à vivre était en bazar, pleine de cartons à moitié déballés. Une étagère était montée et quasi-vide, l'autre encore au sol. Nino trébucha presque immédiatement, mais le désordre n'y était pour rien, Zack en aurait mis sa main à couper.
Kazuya-Zack interrompit le jeune homme fatigué qui leur expliquait à nouveau les phénomènes étranges auxquels il avait assisté depuis son emménagement.
— Vous n'êtes pas fou. Il y a bien un fantôme. Nous reviendrons demain.
— Hein ? Quoi ? Mais ça ne fait pas trois minutes que vous êtes arrivés !?
Kazuya-Zack entraîna Nino et le fantôme qui avait dû s'introduire en lui par le bras vers la sortie sans tarder.
Pour l'étudiant, leur comportement était bizarre et inexplicable. Zack avait suggéré que la discussion avec le fantôme se déroule en sa présence, mais Nino et Kazuya avaient jugé qu'il était préférable que cela se fasse en dehors de lui. Croire aux fantômes et accepter le phénomène de possession étaient selon eux deux choses différentes.
— Mais c'est n'importe quoi ! s'écria l'étudiant.
— Il nous faut le matériel adéquat à ce type de fantôme, répliqua Kazuya-Zack sans un regard en arrière pour le jeune homme dégingandé.
Celui qui occupait Nino ne protesta pas. Il les suivit en bas gentiment, l'étudiant aussi. Ce dernier s'arrêta cependant à la porte de l'immeuble, car dans la précipitation, il était parti sans son manteau.
— Vous ne serez pas payé si vous ne revenez pas !
— A demain ! assura Kazuya-Zack sans se retourner, en accélérant le pas et obligeant Nino à faire de même.
Ils s'arrêtèrent dans la rue, au premier banc venu, le long d'une route où les voitures vrombissaient. Zack maugréa intérieurement : ils étaient encore bon pour se les geler et cette fois le cadre n'avait rien pour lui.
— Pouvez-vous nous dire pourquoi vous dérangez ce jeune homme ? demanda Kazuya-Zack.
— Je n'avais jamais fait ça, mais il aime regarder des vidéos pornos violentes et je ne peux le supporter. Quant à votre ami, j'ai senti qu'il pouvait m'aider. Et c'est ce qu'il a l'air de souhaiter. Je voudrais que l'homme qui m'a condamné à hanter cet appartement soit mis derrière les barreaux afin qu'il ne puisse plus nuire à personne.
Cette femme fantôme voulait justice. C'était une bonne nouvelle, excepté que réussir à capturer ce meurtrier qui sévissait depuis quinze ans risquait d'être fort long, voire impossible.

jeudi 9 juin 2016

Cœur de fantôme - 63

— Et si on achevait de se réconcilier sur l'oreiller ? lança Kazuya.
A son air coquin, Zack se demanda si ce n'était pas exprès pour cela que, fâché, il était parti... Enfin, la vérité était sûrement ailleurs. Il n'y avait après tout qu'au 7 de la rue des Sycomores que Kazuya pouvait parler sans intermédiaire, en étant simplement lui-même.
Nino acquiesça sans rosir. Il commençait à devenir à l'aise sur le sujet. Zack le prit par la taille et ils grimpèrent ainsi collés les escaliers tandis que Kazuya passait par le plafond.
Ils prirent le temps d'allumer le feu dans la cheminée avant de se glisser sous la couette sous le regard du fantôme.
Il n'y avait que dans cette maison que Kazuya pouvait les embrasser successivement, possédant l'un puis l'autre dans la foulée.
Zack aimait quand Kazuya-Nino le prenait, quand Nino habité par le fantôme plongeait en lui, mais aussi quand Kazuya en lui, il pénétrait Nino ou encore quand il les enlaçait tout les deux. Chaque combinaison était parfaite, mais parfois il aspirait au contact de Kazuya. Il aurait voulu que ce dernier ait un corps à caresser. Kazuya, s'il avait vu en lui cette envie, ne l'avait pas commenté. Zack était convaincu que Nino partageait le même désir secret. Il y a peu cela lui aurait donné l'impression d'être de trop, mais depuis la conversation après son week-end chez ses parents, il était pleinement rassuré.
Leurs cœurs et leurs corps se mêlèrent, Kazuya passant de Zack à Nino, embrassant goulument et caressant avec ardeur, les laissant tour à tour libre de se procurer du plaisir à leur façon.

    De retour à l'appartement, ils répondirent à la requête de l'étudiant. Ils échangèrent plusieurs mails pour obtenir des détails sur le meurtre et fixer le rendez-vous. Ils prirent soin de se renseigner en parallèle. Le meurtrier n'avait jamais été attrapé. Plusieurs crimes semblables avaient eu lieu dans différentes villes ces dernières années : un appartement vide, une femme jeune violée et battue à mort.
Comme ce n'était pas la porte d'à côté, Nino et Zack posèrent un jour de congé pour se rendre là-bas. Six heures de train et vingt minutes de bus plus tard, ils étaient au pied d'un immeuble à la façade défraîchie. Nino était bien décidé à aller jusqu'au bout, mais il était tendu. Zack aussi était stressé et Kazuya qui le possédait n'était guère causant.
Ils tapèrent le code d'entrée donné par l'étudiant, gravirent les six étages et sonnèrent à la porte au paillasson en forme de poisson comme il leur avait indiqué. Un jeune homme brun dégingandé aux yeux lourdement cernés et à la peau pâle leur ouvrit.

mercredi 8 juin 2016

Cœur de fantôme - 62

Kazuya les attendait dans l'entrée. Il attaqua sans tarder.
— Prendre des risques est une chose, se montrer imprudent en est une autre. Tu ne dois pas laisser ce fantôme te posséder. Zack est d'accord sur ce point.
Nino leur lança un regard sombre à tout les deux. 
Zack fit la grimace et tenta de se justifier, rappelant au jeune homme ce qu'il avait dû faire, contraint et forcé par un fantôme vengeur.
Nino explosa :
— Parce que tu croies que j'ai oublié qu'à cause de moi trois personnes sont mortes dont une innocente petite fille ?!
Zack se sentit très bête et se tourna vers Kazuya, désemparé. Le fantôme avait accès aux pensées intimes du jeune homme, lui. Certes, pas à l'instant, mais il le connaissait en profondeur.
Kazuya intervint :
— Et c'est parce que tu veux réparer à tout prix  cet acte que tu as commis que tu te moques du danger, n'est-ce pas ? Tu es certes coupable, mais pas responsable.
Nino se mit à trembler :
— Je sais, mais malgré tout...
Zack saisit enfin ce qui lui avait échappé jusqu'alors. Nino voulait faire le bien pas seulement par altruisme, mais aussi pour atténuer le mal qu'il avait causé involontairement.
Kazuya ne lui avait pas révélé cela, peut-être parce qu'il avait jugé que c'était à Nino de l'expliquer en direct ou plus probablement parce que le jeune homme ne se l'était pas vraiment avoué à lui-même.
— La petite-fille, est-ce qu'elle est devenue un fantôme ? demanda-t-il, espérant qu'il ne blesserait pas davantage Nino en l'interrogeant sur ce point.
— Non. Mais quel rapport ?
Kazuya s'emmêla et formula ce qui n'était pas encore clair pour Zack, mais qui était à l'origine de sa question :
— Peu importe la façon dont les gens meurent. Il est impossible de savoir ce qui les retient au final.
— Oui, c'est ça. S'il y a une chance que ce fantôme, s'il existe, veuille autre chose que tordre le cou à celui qui a mis fin à sa vie, tu as raison de vouloir la saisir, compléta Zack.
— Comme c'est ma haine et ma rage envers mon assassin qui m'ont gardé parmi les vivants, j'ai de la peine à envisager une victime de meurtre pacifiste. Mais au fond, c'est peut-être le regret d'une chose inaccomplie qui est à l'origine de ce fantôme. Chacun est différent, reconnut Kazuya.
Nino sourit. L'orage était passé et ils étaient à nouveau sur la même longueur d'ondes.

mardi 7 juin 2016

Cœur de fantôme - 61

Kazuya laissa Albert agir comme il l'entendait et ils se gelèrent encore deux bonnes heures avant que le pêcheur ne s'éclipse sans même les remercier.
Zack espéra qu'après cette expérience désagréable Nino renoncerait – il n'y avait rien de glorieux à pêcher en plein hiver pour faire plaisir à un vieux pêcheur homophobe qui n'aurait guère souffert à attendre des poissons pour le reste de l'éternité – mais cela ne fit que calmer l'impatience du jeune homme. Il n'était en effet peut-être pas la peine de rechercher d'eux-mêmes des fantômes à aider, surtout que cela pouvait engendrer des frais.
Que diable allaient-ils faire d'une canne à pêche ? Après discussion, ils la ramenèrent au magasin où ils négocièrent pour être remboursé. Et, une fois chez eux, ils se réchauffèrent en faisant l'amour.

    Quatre jours plus tard, ils reçurent une première requête via le formulaire de contact du site mis en place par Zack. Elle provenait d'un étudiant qui louait un appartement où il se passait des trucs bizarres. Il avait appris qu'un meurtre s'y était produit quinze ans plus tôt. Ce n'était peut-être qu'un effet de son imagination que ses courants d'airs même fenêtres et volets fermés, mais il n'en pouvait plus et n'avait pas les moyens de déménager sitôt après s'être installé.
— Oriente-le vers l'exorciste que Zack avait repéré, déclara Kazuya-Zack.
— Hein ? Pourquoi ?
— S'il y a bien un fantôme, ce ne peut être que celui de la victime en quête de vengeance. C'est trop dangereux.
— On ne peut pas en être sûr, objecta Nino.
Cela dégénéra en dispute en quelques minutes à peine. Zack tenta d'apaiser Kazuya, puis de le retenir quand il sentit qu'il allait le déposséder, mais échoua. Il faut dire que lui-même comprenait mal Nino. Le dernier fantôme vengeur qui l'avait possédé lui avait fait trafiqué le moteur d'une voiture, provoquant un accident mortel pour ses passagers. Ce premier cas présentait trop de risques.
Zack annonça que Kazuya était automatiquement retourné au 7 rue des Sycomores.
— Merde ! Lui et sa manie de prendre la fuite ! s'écria Nino.
— Tu veux qu'on aille le retrouver ? Peut-être que face à face...
Nino acquiesça, puis demanda :
— Et toi, qu'en penses-tu ? Tu es aussi d'avis que je ne devrais pas accepter et me défausser sur un authentique exorciste ?
Zack biaisa, n'ayant aucune envie que Nino ne se fâche également contre lui :
— Ça ne coûte pas grand chose de s'assurer qu'il y a vraiment un fantôme.

lundi 6 juin 2016

Cœur de fantôme - 60

— Allons nous procurer le matériel nécessaire, déclara Kazuya-Zack.
Albert-Nino se réjouit de sa bonne fortune :
— Vous êtes bien aimables.
Il protesta cependant quand Kazuya-Zack lui prit la main.
— C'est ridicule ! Nous sommes deux hommes adultes, ça fait pédé !
Pour être exact, ils étaient quatre, même si deux d'entre eux étaient emboîtés dans les autres, façon poupée russe. S'il avait su pour Nino, Kazuya et lui, ce vieux con d'Albert en aurait eu une apoplexie. Enfin vu qu'il était déjà mort, ça ne risquait pas. A priori, Nino avait réussi à protéger son intimité, ce qui était une bonne nouvelle.
— Que cela vous pose problème ou pas, c'est la même chose.
— Je n'ai pas l'intention de vous fausser compagnie.
— Tant mieux, mais je ne compte pas vous laisser libre de tout mouvement pour autant.
Albert-Nino bougonna et pesta : non, vraiment, ils ressemblaient à un de ces fichus couples contre-natures.
Zack aurait adoré le planter là. Le truc, c'est qu'il était à l'intérieur de Nino et il était hors de question de le laisser à la merci de ce vieux bourré de préjugés stupides.
— Vous pouvez aussi rester éternellement ici, ça m'est égal.
Albert râla encore, puis se fit une raison. C'était étrangement inconfortable de tenir la main de Nino sans entremêler ses doigts aux siens. Heureusement Kazuya était là, à priori pas dérangé par l'homophobie d'Albert.
« J'ai eu moi-même une vision étriquée du monde de mon vivant avant de me rendre compte que toutes ces histoires de sexualité, couleurs de peau et religion étaient absurdes. Il y a du bon et du mauvais dans chaque humain indépendamment de cela. »
Le vieil Albert n'en était hélas pas encore arrivé à cette conclusion.
« C'est un jeune fantôme. »
Kazuya avait raison. Ainsi Albert-Nino n'était pas perturbé par ce qui l'entourait et la boutique d'articles de pêches qu'il connaissait existait toujours.
Il fut moins que ravi de devoir se rabattre sur du matériel bas de gamme, mais Kazuya-Zack se montra intransigeant.
Équipés comme il se doit, ils regagnèrent le bord de l'eau pour pêcher.
Ce fut mortellement long et ennuyeux. Ce n'était vraiment pas une activité pour Zack que de rester ainsi immobile à attendre, surtout par ce froid.
Albert-Nino lui s'énerva juste que le corps de son hôte soit aussi maladroit. Il ne réussit pas à remonter sa première touche, mais finit par en ferrer un. Le calvaire se poursuivit malgré tout : il fallait à Albert un poisson digne de ce nom avant de s'estimer satisfait.

vendredi 3 juin 2016

Cœur de fantôme - 59

C'était presque comme si Nino cherchait les problèmes.
« Non, ce n'est pas ça » contra Kazuya.
« C'est parce qu'il veut se servir de sa vue spéciale plutôt que la subir? »
« Pas seulement. C'est aussi son côté altruiste. »
Au fond, chacun à leur manière, ils étaient tous les trois de braves types...
« Vous deux sûrement, mais pas moi.. »
Zack n'était pas d'accord.
« Je ne peux certes pas t'empêcher de le penser. »
Un trajet en moto plus tard – Kazuya se montrait de plus en plus à l'aise pour la manœuvrer – ils furent de retour près du pêcheur fantôme. Du moins, Zack le supposait. Kazuya lui fit prendre Nino par les épaules tandis que le jeune homme, d'une main mal assurée, retirait le talisman.
Son regard vairon se troubla.
— Bah ça alors ! s'exclama-t-il.
— Comment vous appelez-vous ? demanda aussitôt Kazuya-Zack.
— Albert. Et le petit jeune qui veut m'aider à passer de l'autre côté, c'est Nino. Je savais même pas que j'étais mort. Mais je me disais bien que ça faisait longtemps quand même, que cela ne mordait pas...
Zack se rappela que la femme sur le parking du supermarché avait également paru ne pas réaliser qu'elle était décédée.
« Tout dépend de l'âge du fantôme et de la façon dont il ou elle a trouvé la mort » lui expliqua Kazuya.
— Qu'est-ce qui vous retient ici ?
— A ce propos, vous seriez bien aimable de me lâcher, jeune homme... déclara Albert-Nino en tentant de soustraire à leurs mains.
Kazuya-Zack ne le laissa pas s'échapper et raffermit son emprise.
— Vous n'irez nulle part sans moi avec le corps de mon ami. Je vous le redemande, que regrettez-vous de ne pas avoir fait avant de mourir ? A moins que vous ne souhaitiez vous venger de quelqu'un ?
Nino, pensif, se gratta la tête, chose qu'il ne faisait jamais. Pas de doute, c'était Albert aux commandes.
— Je ne regrette rien et je ne ferai pas de mal à une mouche. Enfin, façon de parler, car c'est un bon appât pour certains poissons. La pêche, c'est toute ma vie.
Mais alors pourquoi était-il devenu un fantôme ?  songea Zack.
Kazuya lui avait la réponse.
— Et c'est pour ça que vous êtes resté. Sauf que dans votre état, vous ne pouvez plus rien attraper.
— Plus jamais ? Et de l'autre côté, alors ?
— Ça, c'est à vous de le découvrir.
— Je m'en pêcherai bien un dernier avant de partir, au cas où...
Zack s'inquiéta en son for intérieur du prix d'une canne à pêche et de la saison.
« On peut pêcher même en hiver. On en achètera une pas trop cher, que cela plaise à Albert ou non » le rassura Kazuya.
Et si le vieux pêcheur mentait ? S'il ne voulait pas rendre à Nino son corps après cela...
« Si c'est le cas, je m'arrangerai pour l'y obliger. »
Kazuya était catégorique, toujours est-il qu'il avait préféré que Zack emmène Nino et le petit garçon fantôme qui l'habitait au zoo plutôt que de l'expulser de force.
Zack ne se sentirait tranquille qu'une fois que Nino serait à nouveau lui-même.

jeudi 2 juin 2016

Cœur de fantôme - 58

Dès le lendemain, Zack, pressé par Nino, mit en ligne une page sur internet. Cependant, plusieurs jours s'écoulèrent sans que personne ne les contacte au grand dam du jeune homme.
— C'est peut-être un problème de référencement, dit Zack à Kazuya-Nino.
— Il faut être patient.
Après cette déclaration, il y eut un silence et Zack supposa que Kazuya tentait d'apaiser mentalement Nino qui sans nul doute devait protester.
— Il veut se lancer, même gratuitement, annonça Kazuya-Nino.
— C'est vrai que l'argent n'a jamais été sa motivation première.
— Certes, mais il serait content de quitter son job de plonge où il ne cesse de se faire houspiller pour un rien. C'est toi qui lui a redonné confiance dans les êtres vivants... Ah et maintenant il me reproche de ne pas savoir tenir ma langue.
Leur dialogue à trois alors que Nino ou lui devait passer par l'intermédiaire de Kazuya pour parler ne manquait jamais de sel.
— Cela fait plaisir à entendre alors je suis content de ton indiscrétion.
Ils se sourirent, largement pour Zack, un brin moqueur pour Kazuya-Nino.
— C'est plutôt une bonne idée de tester sans pression et sans souci de résultat, ajouta Zack.
— Tout ça est synonyme d'ennuis et je préfèrerai ne rien faire du tout.
Même en sachant que c'était Kazuya qui s'exprimait, il y avait un côté amusant à voir Nino si peu enthousiaste alors que quand le fantôme n'était pas en lui, il s'animait à la perspective d'utiliser sa vue paranormale de manière contrôlée.
Kazuya-Nino reprit :
— On pourrait commencer par le pêcheur que vous aviez croisé au bord de l'eau lors de votre première promenade.

Ils attendirent le week-end pour y aller. On était à la mi-novembre et il faisait glacé. L'hiver approchait à grand pas. Certains avaient déjà sorti des décorations de Noël.
Zack portait une doudoune noire, de même que Kazuya-Nino qui avait également un bonnet assorti enfoncé sur la tête.
Il confirma que le pêcheur fantôme était toujours là à attendre des poissons qu'il ne pourrait plus jamais attraper.
— Bonjour ! lança-t-il.
Pour Zack, il s'adressait aux saules pleureurs.
— Vous m'entendez ? répéta-t-il avec insistance.
Zack se mit en retrait. La scène était trop inconfortable pour lui, car il ne voyait personne.
Kazuya-Nino se tourna finalement vers lui, la mine sombre et maugréa :
— Nous sommes bons pour la possession. Repassons à la maison rue des Sycomores, si tu veux bien.
Zack acquiesça, également déçu que la solution qui présentait le moins de risque ne fonctionne pas. Il aurait bien aimé que Nino fasse machine-arrière, mais ce n'était pas au programme.
En effet, dès Kazuya fut en Zack, le jeune homme les enjoignit à retourner au bord de l'eau. Il était loin le temps où il avait fallu le convaincre d'aller se balader...

mercredi 1 juin 2016

Cœur de fantôme - 57

De retour à l'appartement, ils se pelotonnèrent sur le canapé. Kazuya-Zack commença par s'emparer des lèvres de Nino, chose qu'ils désiraient autant tous les deux. Si le jeune homme répondit au baiser, il les empêcha d'aller plus loin. Il brûlait de savoir pour l'exorcisme.
Kazuya-Zack exposa donc comment il comptait aider Nino. Soit il était capable de converser en direct avec les fantômes quand il occupait le corps de Nino – il n'avait jamais eu l'occasion de tester – soit il ne l'était pas et dans ce cas, il exigeait être présent via Zack quand Nino retirait son talisman permettant ainsi à n'importe quel fantôme de s'introduire en lui. Il s'agitait alors de maîtriser celui qui l'aurait possédé et l'obliger à le libérer s'il se révélait que ses regrets et désirs ne pouvaient être satisfaits ou nécessitaient que Nino fasse quoi que ce soit de dangereux ou douteux.
Zack, même s'il n'avait aucun rôle à jouer dans le premier cas, le préférait car il évitait que Nino se retrouve à la merci de fantômes sans scrupules.
« Quoiqu'il arrive, c'est à toi que revient la création d'un site internet pour faire la publicité des services d'exorcisme de Nino. »
Il répercuta à haute voix l'information au jeune homme qui voulut de suite qu'ils réfléchissent ensemble à un texte de présentation. Ils débattirent ensuite combien il fallait faire payer les gens. C'était compliqué car ils ne pouvaient garantir débarrasser les lieux du fantôme qui les hantait. Il y avait aussi toujours la possibilité qu'ils soient contactés par des gens paranoïaques qui s'imaginaient persécutés par des êtres invisibles alors qu'en réalité, il n'y avait pas le plus petit spectre.
Ce n'est que tard dans la soirée qu'ils s'entendirent sur un double tarif : un de simple consultation – le prix du déplacement étant à la charge du client  –  et un pour l'exorcisme.
Nino se colla alors à Kazuya-Zack et proposa de reprendre là où ils s'étaient arrêtés. Une offre pareille ne se refusait pas. Kazuya-Zack dévora le jeune homme de baisers tandis qu'ils se déshabillaient. Leurs mains glissèrent sur leurs peaux fiévreuses. Nino s'agenouilla pour prendre le pénis de Zack en bouche, le suçant vigoureusement.
Kazuya comme Zack étaient d'avis qu'il n'était pas encore au point côté fellation, mais le plaisir était de toute façon au rendez-vous, car c'était lui.
Ils finirent par l'interrompre pour prendre du lubrifiant et le préparèrent avant de le pénétrer, lui arrachant de doux gémissements.