mercredi 28 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 36

— Tu as du succès, grommela Tim.
Il était jaloux, pas de l'attention dont il avait été l'objet, mais qu'elle ait osé se montrer si familière.
— Cela m'a bien arrangé que cette ribaude me protège de la pluie avec son curieux tissu pliable sur bâton. Que signifie donc téléphoner ?
L'explication du moyen par laquelle la voix voyageait alors que les personnes n'étaient pas en présence l'un de l'autre les occupa durant tout le trajet du retour. Le sujet passionna si bien Percival que la fille à l'origine de la conversation fut oubliée.
Une fois qu'ils furent au chaud et au sec, Tim proposa une collation au chevalier qui ne la refusa pas, mais manifesta ensuite son désir de l'entraîner.
Tim n'était vraiment pas en état après avoir servi de punching-ball au trio et il le dit, ce qui n'eut pas l'heure de plaire à Percival.
— Tu affirmes vouloir devenir fort, mais ce ne sont apparemment que des mots.
Tim protesta faiblement. C'est vrai qu'il ne faisait peut-être pas assez d'efforts, mais il souffrait. Cependant, cela l'ennuyait bien que le chevalier ait une mauvaise opinion de lui.
Ne lui avait-il pourtant pas déjà prouvé sa motivation au Moyen-Âge en parant ses coups et en grimpant à son échelle ?
— On commencera demain, d'accord ? Ce soir, il y a tes habits neufs à laver et se renseigner pour vendre tes pièces.
— Et s'ils t'attrapent et te frappent encore le jour qui vient, ce sera une bonne excuse pour repousser le moment de t'entraîner.
Son ton accusateur était empli de mépris et le pire, c'est qu'il avait raison. Tim eut l'impression que son cœur se brisait : jamais il ne gagnerait l'amour de Percival.
— Couchons ensemble, déclara-t-il.
— Si ce n'est point saillir du coq à l'âne… Je refuse.
Les larmes montèrent aux yeux de Tim qui les contint à grand peine, en battant furieusement des cils.
— Pourquoi ? demanda-t-il, la gorge serrée. C'était pourtant tout ce qui t'intéressait initialement, ajouta-t-il, amer.
— Et toi, tu prétendais ne pas vouloir de sexe sans sentiments.
— Tu n'as pas remarqué que j'étais tombé amoureux de toi, peut-être ! s'exclama Tim, désespéré.
L'air sombre et sévère qu'avait pris le chevalier depuis que l'adolescent avait suggéré de patienter jusqu'au lendemain, se dissipa et ses traits s'adoucirent.
— Oui, je me suis interrogé.

mardi 27 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 35

Ils durent aller dans une autre boutique pour les chaussures. Dénicher une paire que le chevalier supporte fut plus long que prévu et Tim réalisa qu'ils n'auraient pas le temps de manger. Il en fut désolé et voulut confier ses dernières pièces à Percival pour qu'il s'achète un sandwich, mais ce dernier refusa. Il ne voulut pas non plus partager la barre chocolatée qui traînait dans le sac de l'adolescent. Tim la dévora. Lui avait l'estomac dans les talons à la différence de Percival qui jugeait apparemment que le petit déjeuner qu'il avait eu été suffisant compte tenu du peu d'effort physique accompli.
Pendant le cours de physique chimie qui s'étalait sur trois longues heures – une bizarrerie d'emploi du temps avec laquelle il fallait composer chaque semaine – des nuages gris s'accumulèrent dans le ciel. Inquiet pour Percival qui n'avait rien pour se protéger de la pluie, Tim espéra qu'il ne pleuvrait pas. A la récréation, tout le monde put s'égayer dans la cour, sauf Tim qui préféra s'enfermer dans des toilettes pour échapper au trio. L'odeur n'y était pas formidable et s'ils découvraient sa cachette, ils leur seraient facile de lui plonger le visage dans la cuvette, mais c'était une tactique pour tromper l'ennemi qui fonctionnait bien quand il était assez rapide à la sortie de la classe.
Harvey, Côme et Lisle durent se contenter de le bousculer et de l'insulter à la reprise du cours, moment où l'averse éclata. Tim, impuissant, regarda la pluie mouiller les carreaux, tout en écoutant le professeur. Percival s'était-il mis à l'abri ? Et si oui, comment le retrouverait-il ?
N'en déplaise à l'enseignant, Tim rangea son classeur, son livre et sa trousse avant la sonnerie et fila plus vite que l'éclair quand elle retentit, sa veste et son sac à la main. C'était moins pour échapper au trio que pour Percival. Toujours est-il qu'il battuT un record de rapidité ce jour-là.
En sortant sur le perron de l'entrée principale, il eut la surprise d'apercevoir le chevalier non pas trempé comme une soupe, mais abrité par un parapluie qu'une fille tenait au-dessus de sa tête.
Capuche relevée, il franchit la distance qui les séparait du duo, le cœur lourd. Pendant qu'il se faisait du souci pour lui, le chevalier comptait fleurette… Il était gay pourtant. C'était elle qui devait être en train de le draguer, mais cela l'irritait quand même.
— Mon ami est arrivé, annonça Percival à la blonde adolescente dès que Tim fut devant eux.
La fille les accompagna jusqu'à l'arrêt de bus, bavardant avec Percival tout en ignorant Tim avant de les laisser enfin, non sans avoir touché l'avant-bras de Percival et l'avoir enjoint à téléphoner.

lundi 26 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 34

— Allez, ils ne méritent pas qu'on parle d'eux. Dis-moi plutôt ce que tu as fait pendant que j'étais en cours.
— Je me suis promené alentours et j'ai observé le passage des charrettes de fer qui se meuvent sans chevaux.
Cela n'étonna pas Tim qu'il se soit bravement aventuré à l'inconnu. Heureusement qu'il ne s'était pas fait écraser...
— Tu as faim ?
— Point du tout.
— Alors, commençons par t'acheter des habits.
Tim savait que toutes ses maigres économies y passeraient, mais c'était une dépense nécessaire.  Il n'était pas envisageable que Percival continue à se balader en costume du XIVème siècle. Ce n'était même pas tant pour les étrangers dans la rue que pour sa mère. Et puis bon, une seule tenue à porter, ce n'était pas suffisant.
Percival lui emboîta le pas et ils marchèrent jusqu'à ce qu'une boutique de vêtements bon marché qui n'était pas loin.
Tim se chargea de choisir pour lui pull, t-shirt, jeans et caleçons avant de le pousser dans une cabine d'essayage.
Bien que tenté de regarder par l'interstice du rideau qu'il n'avait pas pu refermer parfaitement – comme toujours dans les magasins de vêtements – Tim n'en fit rien, même quand il commença à trouver le temps long.
— Tout se passe bien ? Ne t'acharne pas, si tu n'arrives pas à entrer dans le pantalon ou autre, je me suis peut-être trompé dans les tailles. Je peux aller en chercher de plus grandes.
Percival sortit à cet instant, vêtu d'un pull bleu uni et d'un jean assorti, les pieds nus. Tim avait oublié les chaussettes et les chaussures.
C'était bizarre de voir le chevalier habillé comme tout le monde. Sans savoir exactement en quoi, il semblait à Tim que quelque chose le distinguait encore des gens du XXIème siècle. Ce n'était pas sa coupe mi-longue ou son ombre de barbe, alors quoi ? Peut-être sa posture très droite… ou simplement le fait qu'il le trouvait craquant, quels que soient les vêtements qu'il avait sur le dos.
— Tu es confortable dedans ?
— Point vraiment, mais je pense que je pourrais m'habituer.
— Du moment que tu n'es pas trop serré…
Il renvoya Percival se déshabiller : il fallait qu'ils passent à la caisse et il était préférable que les habits neufs soit lavés avant que le chevalier les porte pour de bon.

vendredi 23 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 33

Tim mit longtemps à se relever. La cloche marquant la reprise des cours se fit entendre, mais il n'était pas en état de courir. Du sang gouttait de sa blessure rouverte comme autant de larmes rouges.
Il n'y avait pas d'infirmière au lycée, mais il passa au bureau de la conseillère d'éducation où il savait qu'il pourrait se faire soigner en plus de récupérer un mot de retard.
Il était rare qu'il ait besoin d'y recourir, mais ce n'était ni la première, ni sûrement la dernière fois qu'il s'y rendait.
Comme d'habitude, là-bas, personne ne s'inquiéta vraiment pour lui. Il récolta un pansement, des recommandations de prudence, et fut renvoyé en cours.
La professeur d'anglais lui fit les gros yeux, mécontente que son arrivée tardive ne l'interrompe dans ses propos. Tim tâcha de faire le moins de bruit possible en s'installant au premier rang, juste sous son nez, à la table laissée vide par ses camarades.
Même s'il n'avait pas à rougir de son accent, il  ne participa que contraint et forcé à l'exercice oral, et à la fin de seconde heure, il se dépêcha de ranger ses affaires dans son sac afin d'être le premier à partir. C'était une pierre deux coups : il évitait le trio et rejoignait plus vite Percival.
Il fut soulagé en l'apercevant qui l'attendait appuyé à un arbre, juste en face de la haute porte. Il courut vers lui et la tête lui tourna. Harvey, Côme et Lisle n'y avaient vraiment pas été de main morte.
— Tu es tout pâle, constata le chevalier.
Tim hésita, puis raconta le traitement qu'il avait subi.
— Quelle félonie ! s'écria Percival, indigné. Je les passerai volontiers au fil de mon épée, ajouta-t-il, menaçant.
Tim, comprenant qu'il était sérieux, le calma. Ce n'était pas nécessaire d'en arriver là. Tout ce que le chevalier avait à faire, c'était de l'aider à devenir fort, de façon à ce qu'il puisse lui-même les remettre à leur place.
— Même si je ne les pourfends pas, je pourrais leur infliger une correction dont ils se souviendront, argua encore Percival.
Toute tentante que l'idée soit, Tim ne pensait pas que ce soit la solution. Malgré tout, c'était bien agréable d'avoir quelqu'un prêt à le défendre, quelqu'un pour l'écouter… et quelqu'un à aimer, même s'il n'était pas payé de retour.

jeudi 22 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 32

Arrivés au lycée, Tim s'attarda jusqu'à la dernière minute aux côtes de Percival. Cela lui était égal de se payer l'affiche en étant avec le chevalier en chausses.
— Tu es certain de vouloir rester là ? Non, parce que le fond de l'air est frais et tu n'as que ta cape… Et puis, tu vas t'ennuyer, non ?
— Ne te tracasse point de mon sort.
Tim soupira et finit par franchir les grilles, presque à reculons.
Avant de s'engouffrer à l'intérieur de l'imposant bâtiment, il lança un dernier regard à la silhouette solitaire de Percival, puis comme la cloche sonnait, il se dépêcha de rejoindre sa classe. La professeur de mathématiques détestait les retardataires. 
Les deux premières heures de la matinée passèrent lentement, Tim se concentrant avec peine sur la leçon.
Il pensait tellement au chevalier qu'il en oublia Harvey, Côme et Lisle qui n'eurent aucun de mal à le coincer à la sortie de la salle de classe pour l'entraîner dans des toilettes reculées et peu fréquentées.
— Tu as fait ton malin, hein, hier, avec ton copain en collants ?
— Tu ne croyais tout de même pas nous échapper !
— T'as besoin qu'on te rafraîchisse les idées…
Et voilà, c'était reparti pour qu'ils lui fourrent la tête dans les toilettes et tirent la chasse d'eau.
Ils manquaient cruellement d'imagination. C'était toujours les mêmes brimades. Une fois, Tim avait failli ne pas lutter et plonger le visage de lui-même dans la cuvette, rien que pour les couper dans leur élan, mais n'en avait finalement rien fait, d'une parce que c'était plus que désagréable et deux, de peur qu'ils leurs viennent l'idée de pire, comme lui faire boire leur pisse ou autres horreurs.
Il eut le malheur de sourire en repensant à la perplexité du chevalier face à l'expression désormais inadaptée pour les chasses d'eau.
— Cela t'amuse, pauvre tâche ! s'écria Harvey en lui filant un coup de poing dans le plexus, coupant le souffle à Tim et lui mettant les larmes aux yeux.
Côme lui écrasa le pied et Lisle lui pressa son doigt pansé, le faisant hurler de douleur. Ils étaient comme un monstre à trois têtes.
— Tu fais moins le fier, hein ?
Tim n'était pas en état de répliquer quoique ce soit. Il avait trop mal. Ils s'amusèrent encore un moment à le frapper, puis l'abandonnèrent comme une merde sur le sol.

mercredi 21 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 31

L'adolescent s'étira et s'arracha à la chaleur de la couette. Il se retrouvait une fois de plus dans la problématique de devoir se changer devant Percival. Il décida qu'il était temps d'arrêter de s'en préoccuper. Il se choisit des habits dans le placard, retira son pyjama en coton gris et s'habilla, trop conscient que le chevalier ne perdait pas une miette du spectacle. Ce dernier cependant ne fit aucun commentaire et son visage ne trahit rien de ce que cela lui inspirait. C'était toujours mieux que son expression dégoûtée en découvrant sa peau couverte de bleus au XIVème siècle, mais Tim regretta son absence totale de réaction.
— Bon, plus qu'à petit déjeuner, lança-t-il.
Percival fronça les sourcils.
— Je ne suis point malade, et toi non plus, ce me semble.
— Eh bien, au XXIème siècle, figure-toi que ce premier repas de la journée est considéré comme essentiel et indispensable. Il faut dire qu'après, c'est seulement entre midi et treize heure qu'on mange.
Le chevalier le suivit dans la cuisine où la mère de Tim avait laissé en vrac sur le comptoir tasse, bouteille de lait, pain et pots de confitures. Elle avait même oublié de ranger le beurre au réfrigérateur, preuve qu'elle avait dû filer en vitesse pour le boulot. Elle avait un long trajet et devait donc partir tôt.
Tim leur prépara des tartines à la fraise et deux bols de chocolat chaud. Percival goûta le breuvage avec une circonspection amusante.
Quand il eut fini, une moustache chocolatée ornait le dessus de ses lèvres. Tim le lui signala et faillit s'étrangler sur son pain en le voyant sortir une langue sensuelle pour la lécher.
— Puis-je t'accompagner là où tu te rends ? s'enquit le chevalier.
— Seulement jusqu'à la grille, après c'est réservé aux élèves. Il vaut mieux que tu m'attendes à l'appartement, surtout tant que nous ne t'avons pas acheté de vêtements. Tu attires un peu trop l'attention avec ceux-ci.
Les rôles étaient inversés. Au Moyen-Âge, c'était Percival qui avait pointé son jeans et ses baskets du doigt.
— Cela ne me dérange point de patienter à l'extérieur.
Tim argumenta avec lui un moment, puis céda. Depuis que Harvey, Côme et Lisle l'avaient dans le collimateur, il préférait de toute façon des sandwichs qu'il pleuve ou vente hors de l'enceinte du lycée à la cantine et cela lui plaisait beaucoup de passer la pause de midi avec lui.

mardi 20 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 30

Il se détourna brusquement. S'il se déshabillait en quatrième vitesse et entrait aussitôt dans la cabine aux parois opaques, Percival n'aurait pas le temps de voir grand-chose.
— Je pars me coucher, annonça le chevalier dans son dos alors que Tim, nerveux, bataillait avec la fermeture de sa braguette.
L'adolescent se retourna pour le voir sortir, la serviette ceint autour de sa taille. Il rabaissa le loquet de la porte, ôta ses vêtements et s'introduisit dans la douche. Une fois mouillé, il se savonna et ce faisant, ne résista pas à l'envie de se caresser, tout en songeant à Percival. Il avait tellement accumulé au cours des derniers jours qu'il jouit presque immédiatement.
Il se rinça, se sécha et enfila son pyjama, puis prit le temps de désinfecter son doigt blessé avant de traverser le salon, de souhaiter bonne nuit à sa mère toujours devant la télévision et  de pénétrer dans sa chambre plongée dans le noir.
Ne voulant éveiller Percival si jamais il était déjà endormi, Tim progressa à tâtons jusqu'au lit et se glissa dedans, n'ayant d'autre choix que de se coller au chevalier allongé de côté.
Bien qu'il se soit masturbé, la proximité physique l'excita. Il se tortilla, tentant de créer un espace entre eux, mais ses efforts produisirent l'effet inverse et le sexe dur et brûlant de Percival se pressa contre ses fesses.
— Arrête de t'agiter, grommela le chevalier, le bloquant en refermant ses bras sur les siens.
— Pardon, souffla Tim.
Il s'immobilisa, à l'exception de son cœur dansant la sarabande dans sa poitrine.
Cependant, Percival ne suggéra pas qu'ils se donnent du plaisir ou quoique ce soit d'autre, à la grande déception de l'adolescent. Peut-être attendait-il désormais que ce soit Tim qui fasse le premier pas.
En dépit de l'étrange situation et de leurs érections respectives, le sommeil finit par l'emporter et Tim dormit comme un bébé jusqu'à ce que retentisse l'alarme de son réveil.
Percival bondit hors du lit et en un éclair récupéra son épée. Pour lui, le bruit strident, loin d'être familier représentait une menace. Il était beau, nu, son arme levée, son membre à moitié dressé, mais Tim éteignit vite l'appareil, expliquant ce dont il s'agissait entre deux bâillements.
— C'est pour que je me prépare à partir au lycée.
Percival quitta sa posture défensive, rangea son épée, et commença à se vêtir. Tim se demanda alors ce que le chevalier ferait pendant qu'il était obligé de se rendre en classe.

lundi 19 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 29

— Pouvons-nous en servir ensemble ? s'enquit Percival.
Tim eut la troublante impression qu'il avait lu en lui. C'était impossible, bien sûr. Peut-être n'était-ce là que le côté obsédé du chevalier qui ressortait…
— Oui, répondit-il. Mais ce n'est pas fait pour, précisa-t-il.
— D'accord, je te laisse l'honneur, alors, dit Percival, mais sans faire mine de quitter la salle d'eau.
— Non, vas-y en premier. C'est toi l'invité, répliqua Tim peu désireux d'exhiber ses bleus une fois de plus.
— Je ne suis pas certain de réussir à me débrouiller avec ces "robinets."
Ce n'était donc pas pour le voir nu qu'il avait émis cette proposition.
— Je reste à côté  pour t'aider.
Percival se déshabilla juste sous le nez de Tim sans paraître se rendre compte du trouble qu'il faisait naître en lui, puis entra dans la cabine.
Comme il n'y parvenait pas, l'adolescent dut faire coulisser les portes pour lui. Il eut cependant également du mal, fasciné qu'il était par les bijoux de famille de Percival qu'il n'avait encore jamais eu l'occasion d'admirer d'aussi près. Il l'avait vu une fois en érection et une, au repos, mais de loin.
— Mordiable ! s'écria le chevalier à plus d'une reprise, luttant sans doute pour avoir de l'eau à la bonne température.
De la vapeur ne tarda pas envahir la pièce accompagnée d'une odeur de savon à la lavande.
— Je n'arrive point à couper ces maudites choses !
Avec les mains glissantes, les robinets se montraient parfois capricieux, se rappela Tim. Il entrouvrit le panneau coulissant pour voler à sa rescousse et réussit à refermer les deux récalcitrants non sans tremper sa manche.
Percival était splendide, ruisselant d'eau et son air inhabituellement vulnérable était juste adorable.
Tim aurait voulu être une des gouttes pour pouvoir glisser sur son corps musclé. S'humectant les lèvres, il lui tendit une des serviettes.
Le chevalier reprit contenance, ses traits ne reflétant plus qu'une tranquille placidité.
Tim le regarda s'essuyer, rêvant cette fois être le tissu qui frottait sa peau. Il avait chaud et son pénis palpitait douloureusement dans son pantalon.

vendredi 16 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 28

Le repas terminé, Tim aida à débarrasser et mettre au lave-vaisselle tout ce qui pouvait l'être. Ce n'était certes pas une tâche familière au chevalier, mais il le seconda, manipulant les assiettes avec précaution.
D'une courtoise sans faille, il remercia la mère de Tim pour sa généreuse hospitalité d'une telle façon que cette dernière en resta comme deux ronds de flanc.
Tout ayant été rangé et nettoyé, elle quitta le côté cuisine pour le salon où elle alluma le poste de télévision. Les yeux de Percival s'écarquillèrent face à ses images qui prenaient vie à l'écran.
Alors qu'il s'approchait, comme envoûté par le programme pourtant débile qui passait, Tim le prit par le bras et l'attira dans sa chambre.
— Quelle est encore cette diablerie ?
Tim s'empêtra dans son exposé des chaînes télés. Sa brillante idée d'allumer un ordinateur pour trouver une définition exacte acheva de plonger le chevalier dans la confusion.
Tim réalisa alors qu'il était sans doute plus facile de se passer des inventions modernes que d'apprendre brutalement leur existence, surtout que Percival avait déjà résisté vaillamment à beaucoup.
Tim ne savait hélas comment l'aider à s'acclimater à toutes ses choses nouvelles. Bien qu'il ait dormi une bonne partie de la journée – la nuit s'il avait encore été au Moyen-Âge – il était encore fatigué et prêt à se coucher à nouveau, une fois qu'il se serait douché, car il se sentait sale comme un pou.
— Je vais me laver.
— Je ne serais point contre un bain moi aussi.
Cela n'avait jamais manqué à Tim de ne pas avoir de baignoire, mais il regretta brusquement qu'ils n'en aient pas, car cela aurait été plus simple pour le chevalier.
L'adolescent récupéra deux serviettes éponges.
— Viens, je vais te montrer.
Ils traversèrent le salon où sa mère, absorbée par l'émission qu'elle regardait ne leur accorda pas même un coup d'œil, ce qui était aussi bien parce qu'elle aurait pu s'étonner qu'ils se rendent en même temps dans la salle de bains.
Tim ferma le loquet derrière eux. Les toilettes étant à part, la pièce ne contenait qu'une douche, un lavabo surmonté d'un petit placard orné d'une glace et une machine à laver.
Il ouvrit la cabine de douche et indiqua à Percival les robinets d'eau chaude et d'eau froide. Il décrocha ensuite le pommeau dont il fit couler un filet. Une véritable démonstration eût été sûrement plus efficace.
Il s'imagina en train de partager la cabine avec lui, mais repoussa aussitôt l'idée. Oui, il lui éviterait de s'ébouillanter ou l'inverse, mais il n'était plus épuisé au point de demeurer de marbre s'ils se tenaient debout dans le plus simple appareil dans un espace restreint. Rien que la perspective suffisait à son pénis pour durcir.

jeudi 15 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 27

Elle poussa un long soupir, signe qu'elle n'était pas loin de céder.
— Je ne vois tout de même pas pourquoi ce serait à nous de l'accueillir. Il doit exister des associations qui s'occupent de cas comme ça.
— Maman, s'il-te-plaît.
— C'est moi qui doit être folle en fin de compte… C'est d'accord, mais pas question de nourrit à l'œil par dessus le marché.
Tim embrassa sa mère sur les deux joues.
— Merci !
— N'oubliez pas d'utiliser des préservatifs en toutes circonstances.
Tim qui partait déjà annoncer la bonne nouvelle à Percival se figea un instant, gêné qu'elle évoque ainsi sa vie sexuelle. Il acquiesça néanmoins avant de filer.
Il rapporta au chevalier la conversation qu'il avait eu avec elle, à l'exception bien sûr, de la partie embarrassante.
— Je n'apprécie guère que tu me fasses passer pour un saltimbanque et je ne veux point abuser de votre hospitalité, protesta Percival.
Il détacha de sa ceinture une petite bourse que l'adolescent n'avait pas remarqué jusqu'alors. Elle était pleine de pièces de monnaies qui n'étaient certes plus utilisées au XXIème siècle, mais qui étaient susceptibles d'intéresser des collectionneurs et de rapporter de l'argent. Encore fallait-il trouver à qui s'adresser.
Tim l'expliqua au chevalier.
— Je m'en remets à ton jugement. Je crains de ne point être dans mon élément dans ce monde où les lumières ne sont pas des flammes vives et s'allument à distance, comme par magie.
Tim tenta de lui décrire le fonctionnement de l'électricité, puis lui fit découvrir les toilettes.
Percival fut ébloui par l'eau courante et apprécia la blancheur des latrines, mais tiqua sur l'expression "tirer la chasse d'eau" alors qu'il s'agissait d'appuyer sur un bouton. Tim qui n'avait jamais prêté attention à cette bizarrerie sémantique trouva lui-même la raison et s'efforça de faire comprendre au chevalier que cela venait d'une évolution des chasses d'eau qui fonctionnaient autrefois par le biais d'une tirette.
Pendant qu'il lui montrait les lieux, sa mère avait préparé le repas et ils n'eurent plus qu'à se mettre les pieds sous la table. C'était souvent Tim qui s'en chargeait, aussi s'en voulut-il. Il se promit d'assurer le lendemain.
La mère de l'adolescent hallucina en voyant Percival prier avant de manger, mais ne commenta pas. En revanche, elle le cuisina à sa façon. L'adolescent répondit systématiquement à la place du chevalier, accumulant les mensonges.
— Tu pourrais laisser ton nouvel ami parler, le réprimanda finalement sa mère.
Tim lui aurait volontiers laisser la parole, si Percival avait été capable de broder de façon adaptée sur son prétendu goût du théâtre et ses affreux parents.
— Je ne suis point bavard, madame. Cela ne me dérange point, intervint Percival.

mercredi 14 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 26

Il déverrouilla la porte en s'essuyant machinalement les pieds sur le paillasson, et ils pénètrent dans l'étroit vestibule.
Il n'avait pas encore la moindre idée comment il pourrait convaincre sa mère de laisser Percival séjourner avec eux. Il faudrait aussi lui dénicher des vêtements modernes, parce que bien qu'ils n'aient pas une grande différence de taille, ils n'avaient pas du tout le même gabarit, ah ça, non…
Cependant, le plus urgent, c'était le couchage. Il n'avait que le canapé à lui proposer, à moins qu'il ne lui cède son propre lit, car il doutait qu'ils puissent tenir à deux dedans.
Il exposa son souci à Percival.
— Je peux m'allonger sur ce tapis bleu qui recouvre le sol de ta chambre. Je préfère demeurer dans la même pièce que toi, si cela ne te dérange point.
L'adolescent devina que ce n'était pas tant par attachement pour lui que parce que Percival n'était pas à son aise entouré de toutes ses choses qu'il ne connaissait pas.
Comme il se refusait de le laisser dormir sur la moquette, il suggéra qu'ils tentent de se caser dans le lit pour une personne. Ils y réussirent en se mettant en cuillère, étroitement collés l'un à l'autre. Tim était toutefois trop épuisé pour être excité et à priori, Percival aussi. Ils s'endormirent presque sur le champ.

La mère de Tim, les découvrit dans cette position quand elle rentra de son travail le soir venu.
L'exclamation qu'elle poussa les réveilla tous les deux en sursaut. C'était embarrassant d'être surpris dans son lit avec un inconnu, même s'ils n'y avaient fait rien de répréhensible.
L'adolescent se redressa, se forçant à sortir de sa torpeur.
— Salut, maman, je te présente Percival, je l'ai rencontré au musée aujourd'hui. Il m'a aidé quand je me suis blessé.
Bon, cela n'expliquait pas tout, mais c'était un début.
Tim se leva, son esprit fonctionnant à tout allure.
Percival l'imita et se courba :
— Mes hommages, madame.
Avant qu'il ne lui fit un baise-main ou Dieu sait quoi, l'adolescent préféra entraîner sa mère dans la cuisine ouverte sur le salon, faisant signe au chevalier d'attendre.
— Il est en galère. Il est gay comme moi, et ses parents l'ont mis à la porte quand ils l'ont découvert et il n'a nulle part où aller.
Sa mère croisa les bras sous sa poitrine.
— Il m'a surtout l'air d'avoir un grain… Et tu voudrais que nous l'hébergions, parce que tu as eu le coup de foudre, c'est ça ?
Même s'il lui avait plu de suite, Tim n'était pas tombé amoureux au premier regard, mais ce n'était certes pas le moment d'en débattre.
— Il est étudiant en arts dramatiques et en ce moment, il a un rôle de chevalier et ses parents l'ont mis à la porte dans son costume.
Percival avait peut-être raison d'affirmer qu'il aurait fait un bon ménestrel vu la facilité avec laquelle il inventait des histoires. Il n'était pourtant pas partisan du mensonge, mais nécessité fait loi, et la vérité était trop incroyable.

mardi 13 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 25

Ils parvinrent, non sans quelques détours inutiles, jusqu'au parking où retrouver le car ne fut pas évident.
Ils eurent la chance toutefois que le conducteur ne soit pas parti en balade et soit en train de bouquiner derrière son volant.
Percival monta avec lui dans la "charrette de fer" et Tim n'eut pas qu'à débiter sensiblement la même histoire qu'il avait servie à ses professeurs, utilisant une fois de plus son doigt abîmé comme argument.
Le chauffeur qui avait une trousse de premier soins dans le car lui mit un coup de spray et lui colla un authentique pansement avant d'ouvrir bravement la soute du car pour y récupérer le sac à dos de l'adolescent qui, pendant ce temps, renfila sa veste.
Ce fut Percival qui passa une des sangles du sac sur son épaule et ils s'en furent prendre le métro.
Tim dut s'arrêter un bon moment devant le plan des lignes afin de repérer le plus court chemin jusqu'à l'appartement où il vivait avec sa mère, puis il acheta leurs tickets à une machine.
— Je ne suis point à mon aise, avoua Percival, en le voyant tapoter l'écran.
Tim expliqua et montra au chevalier comment passer les tourniquets.
Percival réussit du premier coup, comme s'il avait fait ça toute sa vie.
Il se contenta de grimacer au bruit affreux que le train fit en arrivant à quai et le suivit dans l'un des wagons.
— Ses portes sont comme les mâchoires broyeuses d'un monstre, murmura Percival quand elles se refermaient derrière eux avec un claquement sinistre.
Tim lui épargna les strapontins.
A une des stations, un petit garçon tira sur la cape de Percival et la mère s'excusa pour lui.

— Il n'y a point de mal, madame, assura le chevalier courtoisement.
Tim lui trouva une classe folle.
Ils changèrent de trains par deux fois avant de remonter à la surface.
La gare se trouvant à quinze bonnes minutes à pieds de l'appartement, l'adolescent opta pour le bus. Il avait hâte d'être enfin chez lui.
Sa carte de transport couvrait cette zone, mais il dut acheter un ticket pour Percival, achevant de vider son porte-monnaie.
Un court trajet plus tard et quelques minutes de marche plus tard, ils furent au pied de l'immeuble.
— Voilà, c'est ici que j'habite, annonça-t-il.
— Cette haute tour t'appartient ?
— Non, on loue juste un deux pièces. C'est un peu comme un fermage, mais sans exploitation de terre, précisa Tim, voyant que Percival peinait à comprendre.
Il tapa le code d'entrée, et exceptionnellement, préféra l'escalier à l’ascenseur pour grimper au quatrième étage. Même si Percival demeurait placide devant tous ses transports et machines modernes, cela ne voulait pas dire que cela ne le troublait pas. Les rares remarques qu'il avait laissé échapper avaient été révélatrices sur ce point.

lundi 12 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 24

Il obtint leur accord et leur permission de récupérer son sac et sa veste dans le car scolaire – il lui suffirait de s'arranger avec le chauffeur.
Il savoura la mine dépitée de Harvey, Côme et Lisle, obligés de rester tandis que lui s'éloignait sans se presser avec son chevalier. Ils lui feraient sûrement hélas payer plus tard cet échec.
Le silence prolongé de Percival qui n'avait pas démenti ses propos devant les gens de son école troubla Tim.
— Désolé de t'avoir entraîné là-dedans. Je t'en prie, ne me déteste pas.
— C'est bon. J'ai eu le temps de réfléchir qu'il n'y avait point une once de malice en toi. Tu n'aurais pas fui devant ses drôles et ton dos ne ressemblerait pas à une peinture si c'était le cas.
L'adolescent fut bien soulagé que Percival soit revenu à de meilleurs sentiments à son égard.
Le chevalier continua :
— Si ce n'est point le Malin, ce ne peut être que divin. J'ai peut-être quelque chose à accomplir à tes côtés.
Tim doutait que Percival soit investi par Dieu d'une quelconque mission, mais  mieux valait qu'il pense ça plutôt qu'il s'imagine que l'adolescent avait des pouvoirs et des intentions diaboliques.
— Tu me crois, alors, quand je t'affirme que nous sommes au XXIème ?
— La façon dont nous avons changé de lieu est assurément merveilleuse et je vois bien des choses inusuelles autour de moi depuis que nous sommes dans cet endroit où sont exposés des œuvres de toutes sortes. Oui, je veux bien admettre que j'ai à présent sept siècles et vingt-trois printemps.
Tim fut étonné d'apprendre qu'ils n'avaient que six ans d'écart tellement Percival lui avait paru mature et expérimenté par rapport à lui. Cependant, cela allait à présent être à lui d'être le guide du chevalier dans le monde moderne. Le problème, c'est qu'il se sentait au bord de l'évanouissement.
— Je peux m'appuyer sur toi ?
Percival acquiesça et glissa son bras sous celui de l'adolescent pour le soutenir.
Tim se concentra pour les mener à la sortie du musée.
Percival observait ce qu'il y avait autour de lui, fasciné, mais ne le bombardait pas de questions, ce qui arrangeait bien Tim, tout en le surprenant. Le sang-froid du chevalier forçait l'admiration.

vendredi 9 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 23

— Hé ! C'est qui le gus en collant à côté de toi ? Vous vous êtes trouvés entre tafioles ? lança Côme.
— Détrompe-moi si je suis dans l'erreur, mais ce manant vient de nous insulter, ce me semble, dit Percival en portant la main à la poignée de son épée.
Tim lui attrapa le bras pour le retenir dans son geste. S'il la sortait, ils couraient à la catastrophe.
— Comment il cause, l'autre guignol ! s'exclama Harvey.
— Ils n'en valent pas la peine, filons, murmura Tim.
— Un chevalier ne fuit pas, rétorqua Percival.
— Fais-moi confiance, si tu les attaques, c'est nous qui aurons des ennuis. Ils ne sont même pas armés.
Sa dernière remarque débitée à toute vitesse entre ses dents fit mouche et Percival le suivit, l'infernal trio sur leurs talons.
Tim n'avait pas de plan précis en tentant d'échapper à Harvey, Côme et Lisle, autre qu'éviter que cela ne dégénère avec Percival, mais le hasard le conduisit à sa classe qui poursuivait sa visite.
— Ah, ses messieurs daignent enfin nous rejoindre, commenta le professeur d'histoire-géo.
Il ne croyait pas si bien dire, car pour Tim, des jours entiers s'étaient écoulés. Cela lui faisait bizarre de reprendre le fil interrompu de sa vie de lycéen.
Il n'envisagea pas plus d'une seconde de prendre place parmi ses camarades comme si de rien n'était. Il ne pouvait laisser Percival seul et c'est ce qui finirait par arriver au moment de monter dans le car qui les ramènerait au lycée. Il n'était par ailleurs pas sûr que le chevalier continue à le suivre très longtemps sans poser de questions. Sans compter, qu'il avait vraiment besoin de se reposer.
Il se dépêcha de raconter une histoire à ses enseignants : il s'était grièvement blessé, mais coup de chance dans son malheur, il était tombé sur son cousin, passionné par les costumes d'époque et amateur de musée, qui pouvait le raccompagner chez lui.
Pour briser les réticences de ses professeurs, il déballa son doigt ensanglanté et leur colla sous le nez, affirmant encore ne vouloir gâcher cette journée exceptionnelle par sa maladresse et assurant que son cousin s'occuperait très bien de lui.

jeudi 8 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 22

Tim n'en revenait pas, Percival encore moins. Des explications s'imposaient. Tout à coup, il regrettait de ne pas avoir dit au chevalier qu'il avait voyagé à travers le temps sans savoir ni pourquoi ni comment.
— Nous sommes au XXIème siècle, c'est l'époque d'où je viens.
— Quelle fable me contes-tu là ? C'est ménestrel que j'aurais dû t'encourager à devenir… déclara Percival, tout en pivotant sur lui-même.
S'il cherchait le mécanisme qui lui permettrait de retrouver sa chambre, il en avait pour longtemps.
Tim exposa brièvement la manière dont il avait été transporté dans le passé, par le biais d'un simple souhait.
— Peut-être Lubin avait-il raison de te prendre pour une engeance du malin, si tu as quelque mauvais génie à ton service pour t'exaucer.
Percival avait l'air furieux contre lui.
Tim déglutit. Il ne croyait pas posséder quelque diabolique pouvoir magique, et pourtant, il fallait reconnaître que c'était étrange, comment il était parvenu à se déplacer dans l'espace et le temps à deux reprises désormais.
— Je peux essayer de te ramener, offrit-il, bien qu'il n'en ait pas la moindre envie.
Percival ne répondit pas, pesant sans doute le pour et le contre.
Tim, dans l'intervalle, constata que certains visiteurs commençaient à s'intéresser à eux. Il faut dire que si aucune loi n'interdisait de se promener en costume du XVIème, cela avait de quoi attirer l'attention. Le port d'une arme blanche pouvait peut-être poser problème, en revanche…
Les pensées de l'adolescent partaient dans toutes les directions, son doigt le lançait et la tête lui tournait. Il était à la fois soulagé et paniqué d'être de retour. Si Percival n'avait pas été là, c'eût été plus simple, mais en dépit des soupçons et de la colère que le chevalier ressentait à son égard, l'adolescent était heureux de ne pas être séparé de lui.
— Trouvé !
Lisle, accompagné de Côme et Harvey venait de débarquer.
— Tu croyais nous échapper avec ton pseudo-tour aux toilettes ?
Tim réalisa qu'il n'aurait pas à expliquer sa disparition de plusieurs jours. A en croire les commentaires des trois affreux, il était revenu à peu de chose près au moment où il était parti, ce qui était une excellente nouvelle, de quoi ne pas être trop contrarié de les revoir.

mercredi 7 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 21

— Tim ? appela soudain Percival.
Il devait être de retour dans sa chambre. L'adolescent ne bougea pas. Il ne pouvait rester au Moyen-Âge. Il ne s'imaginait pas être capable de bouleverser le cours du temps par sa présence, mais il était convaincu qu'il y serait vite mort. Entendre son prénom dans sa bouche, c'était déjà ça.
Il sous-estimait cependant les sens du chevalier, car soudain, il sentit l'épais tissu qui le masquait être soulevé. Il refusa obstinément d'ouvrir les yeux. Il devait regagner son siècle, où il pourrait se soigner comme il faut. Il n'avait probablement pas besoin de point, mais la coupure devait être profonde, sans quoi il n'aurait pas eu aussi mal.
— Pourquoi te caches-tu là ?
— Je veux rentrer chez moi.
— Où tu es battu ?
— Ce n'est pas vraiment pire qu'ici ! répliqua Tim en levant légèrement sa main blessée.
Percival s'en empara dans le but de l'examiner.
— Que s'est-il passé ?
Tim lui rapporta l'incident d'une voix hachée, ainsi que la manière dont Guillemin n'avait cessé de le tourmenter depuis le début.
— Il semblerait qu'avec mon physique de maigrichon, j'attire les brutes, conclut-il, amer.
— Je suppose que j'en suis une aussi, car à te voir ainsi paupières closes, le visage tendu vers moi, je rêve te voler un baiser.
Son intonation était taquine. Tim se demanda s'il espérait lui remonter le moral par cette boutade et puis des lèvres chaudes se pressèrent contre sa bouche.
L'adolescent l'entrouvrit et la langue de Percival le pénétra, quêtant la sienne. En son fort intérieur, Tim souhaita de tout son cœur et toute son âme qu'il soit possible d'emmener le chevalier avec lui au XXIème siècle.
— Mordiable ! Quelle est cette sorcellerie ! s'écria Percival.
La bouche encore toute gonflée du baiser, Tim se décida à ouvrir les yeux. Il était au musée devant la tapisserie du Don d'Amour et Percival était là, avec ses chausses vertes, sa tunique assortie par-dessus une chemise blanches aux manches bouffantes, son épée à la ceinture dans son fourreau, une cape marron accrochée sur ses épaules.
Le miracle avait eu lieu.
Aucun des visiteurs présents dans la salle ne paraissait avoir remarqué la manière dont ils s'étaient matérialisés.

mardi 6 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 20

Guillemin, sans l'ombre d'un remord, lui reprocha sa maladresse. Bernon eut cette fois la bonté d'intervenir en lui enroulant un bout de tissu autour du doigt pour arrêter le saignement.  La douleur était vive et lancinante. Des points noirs dansèrent devant les yeux de Tim qui crut un instant qu'il allait s'évanouir.
— Mais qu'est-ce que je lui ai fait pour qu'il me déteste comme cela ? balbutia Tim.
Bernon haussa les épaules.
— Ton patois, peut-être...
Le chef des cuisines vint mener l'enquête sur l'incident.
L'adolescent expliqua ce qui s'était passé, précisant que depuis le début Guillemin avait une dent contre lui, mais la faute retomba sur lui.
Tim n'en crut pas ses oreilles : pourquoi fallait-il que ce soit la victime qui fut considérée fautive ? C'était comme quand les professeurs jugeaient que c'était lui qui dissipaient ses trois affreux camarades. C'était injuste.
Il obtint quand même le droit se reposer un moment avant de devoir revenir faire sa part, non sans que le chef lui fasse bien comprendre que c'était à lui de se débrouiller pour entrer dans les bonnes grâces de Guillemin.
Tim termina la journée dans un état second, son bandage de fortune rougi par le sang. Même s'il tenait à peine sur ses jambes, il progressa à pas lents dans les couloirs du château jusqu'à la chambre de Percival. Il était résolu à quitter à tout prix ce siècle qui n'était pas le sien, chevalier ou pas, entraînement ou pas. Sa blessure pulsait et il n'avait même pas pu la désinfecter. 
Pas de chance, pour la première fois, il frappa à la porte de Percival sans obtenir de réponse. Il s'adossa contre le battant, puis le poussa et s'introduisit à l'intérieur. C'était l'opportunité de tenter en toute tranquillité de repartir.
Il fouilla dans le coffre pour récupérer les habits qui lui appartenaient, et ôta les moyenâgeux pour les enfiler. Son doigt entaillé le ralentit durant toute l'opération, mais il y parvint.
Il chancela jusqu'à la tapisserie, la décolla du mur pour se faufiler derrière et ferma les yeux. Il aurait dû penser au musée et à sa mère, mais c'est à Percival qu'il se mit à songer. S'il réussissait à retrouver le XXIème siècle, il ne le reverrait plus jamais et cela le rendait infiniment triste. Il  aurait voulu lui parler une dernière fois, obtenir un second et ultime baiser.

lundi 5 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 19

— Vous avez eu des rapports charnels avec beaucoup de partenaires ?
Cette question était la preuve que l'adolescent envisageait sérieusement de découvrir les plaisirs du sexe dans les bras de Percival.
— Je suis expérimenté, ne t'inquiète point, répondit le chevalier qui, même s'il paraissait avoir compris que Tim était désireux de franchir le pas avec lui, n'avait pas saisi ce qui le tracassait.
— Combien ? reformula-t-il.
— Cinq. Trois hommes et deux femmes. Je n'ai point trouvé mon compte avec ces deux dernières, mais il s'agissait que nul malintentionné ne soupçonne mes préférences.
C'était à la fois peu et beaucoup. Tim se morigéna. Il fallait mieux attendre qu'il tombe sur un charmant garçon du XXIème siècle sur lui, un qui l'aimerait en retour. Encore fallait-il parvenir à quitter le Moyen-Âge. Sa mère devait être dans tous ses états qu'il ait disparu depuis trois jours. Mais peut-être avait-il été projeté au XIVème siècle pour une raison précise. Cela semblait néanmoins douteux que ce soit pour être dépucelé. Il manquait peut-être simplement certaines conditions à son retour à son époque, une pleine lune, un orage ou Dieu sait-quoi… Mais repartir, cela signifiait se séparer de Percival. Il n'aurait jamais dû s'attacher à lui.
— A demain, lâcha Tim avant de partir comme s'il avait le diable aux trousses.
Une prochaine fois, il lui demanderait s'il avait été déjà amoureux.
Son sommeil fut agité celle nuit-là. Il rêva qu'avant de quitter la chambre du chevalier, il lui plantait un rapide baiser sur la bouche, que Percival le retenait par le bras, et capturait ses lèvres avant de le plaquer sur le matelas.
Il se réveilla aux aurores, pas frais pour un sou.   Il se rendit aux cuisines d'un pas traînant et dut subir une fois de plus les remarques mordantes et insultes de Guillemin.
— Mais quel coquebert ! Empoté !
Ce qui était bien, c'est que de nombreux commentaires passaient au-dessus de la tête de Tim. Son absence de réaction n'avait hélas d'autre résultat que d'enrager davantage le sous-chef.
Après le casse-croûte, le bonhomme se lassa heureusement, et Tim put respirer un peu. C'était plus facile de travailler sans avoir quelqu'un qui lui tournait autour, guettant le moindre de ses faux-pas.
Il était tranquillement absorbé par sa tâche qui consistait à couper de grandes tranches de pain quand Guillemin arriva subrepticement dans son dos et lui cria dessus, le faisant sursauter. Le couteau ripa et entailla son index. Le sang coula aussitôt rouge et abondant.

vendredi 2 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 18

— Continue donc, lui intima Percival. Ne te laisse point distraire.
— Mais pourquoi vous déshabillez-vous ? demanda Tim, manquant de rater un barreau.
Ses yeux étaient comme aimantés au corps nu de Percival barré de plusieurs cicatrices dont une impressionnante qui descendait de son épaule jusqu'à son téton droit.
— Je m'apprête pour la nuit.
— Mais l'autre jour, vous aviez gardé vos vêtements !
— Je n'ai point pour habitude de le faire, c'était pour ne point t'effaroucher et te retenir de te reposer auprès de moi.
Ainsi, cela avait été une délicate attention de sa part.
Tim acheva sa descente et préféra abandonner l'échelle.
— Si tu es las et ne veut plus t'exercer, rejoins ton dortoir, déclara Percival en se glissant sous les couvertures du lit.
— Pourquoi avez-vous si hâte de vous débarrasser de moi ? Je ne vous intéresse plus, c'est ça ? Vous avez regagné les faveurs de Lubin ?
L'adolescent se laissait peu à peu contaminé par le parlé de l'époque.
— Point du tout, mais mon doux ami, il va falloir te décider, soit mes attentions sont les bienvenues, soit elles ne le sont pas.
En vérité, il n'y avait rien d'incohérent là-dedans. Tim avait développé bien malgré lui des sentiments amoureux pour le chevalier, et il aurait voulu que ce soit réciproque.
Percival continua :
— Et je ne te chasse point, mais il n'est point la peine d'exciter la curiosité des gens.
Bernon l'avait, il est vrai déjà interrogé sur ses escapades nocturnes et Tim avait plus ou moins esquivé, prétendant se familiariser avec les lieux.
— C'est vrai, soupira l'adolescent en esquissant un pas vers la porte.
— Si tu souhaites que je goûte ton clou de girofle, je suis partant, tu sais, mais je ne puis t'offrir mon amour.
Tim devina que la première partie de la phrase était sexuelle sans toutefois bien en saisir le sens. Ce fut surtout la seconde moitié qu'il retint, parce qu'elle le peinait.
Oui, il avait envie de partager la couche du chevalier, mais il n'était pas sûr de vouloir le faire alors que ce dernier n'éprouvait pas la même chose que lui. Il y avait aussi la question des maladies sexuellement transmissibles, parce que bon, à sa connaissance, le préservatif n'existait pas au Moyen-Âge.

jeudi 1 février 2018

Un Chevalier au XXIème siècle - 17

Une nouvelle journée de dur labeur débuta. Le sous-chef Guillemin qui le détestait officiellement le rudoya sans discontinuer.
Tim attendit avec impatience que le soir vienne, et ce, même s'il savait que Percival ne serait pas tendre avec lui.
Comme la veille, le chevalier lui confia une épée en bois. Tim essaya de tenir plus longtemps que la veille, mais son corps le trahit. Cependant, cette fois, Percival n'insista pas et lui souhaita une bonne nuit.
Tim se serait bien attardé pour bavarder avec lui et savoir s'il avait réussi ou non à renouer avec Lubin, mais n'en fit rien. Il n'aurait pas dû s'en soucier et regretter que le chevalier ne lui fit plus d'avances. Percival n'était pas pour lui. C'était un homme du Moyen-âge et lui comptait bien regagner le XXIème siècle.
Le confort moderne lui manquait. Les douches, entre autres. Il n'avait pu faire qu'une toilette sommaire avec un seau d'eau fraîche depuis qu'il s'était comme télé-transporté dans le passé.
Son troisième jour en cuisine fut catastrophique. Le sous-chef crut drôle de lui faire un croche-pied de façon à ce qu'il s'étale de tout son long, renversant tous les légumes empilés dans le panier qu'il tenait à ce moment-là. Personne ne lui tendit une main secourable pour se relever, personne ne ramassa la plus petite carotte, pas même Bernon. Peut-être était-il fatigué de s'occuper du nouveau, à moins qu'il ne craigne de devenir lui-aussi la bête noire du sous-chef.
Tim serra les dents. Face à ce genre de ruse, même la force était inutile. Il lui semblait tout de même que s'il avait dégagé une impression de puissance, il n'aurait pas eu à subir ce type de traitement. En l'état, il faisait une victime facile pour quiconque ayant besoin de tourmenter les autres pour avoir l'impression d'exister.
Même s'il se sentait découragé, Tim ne manqua pas de se rendre à la chambre de Percival.
— Tu es tombé ? demanda le chevalier en effleurant son menton d'un doigt léger.
— Oui, répondit Tim, se retenant de préciser qu'on l'y avait aidé.
Il devait y avoir une trace de sa chute, comme s'il avait besoin d'un bleu de plus.
— Je te propose un nouvel exercice. Il s'agit de monter et de descendre.
L'adolescent remarqua alors une petite échelle aux barreaux grossiers appuyée contre le mur, à quelques pas de la cheminée.
Il s'exécuta, ayant tôt fait de s'imaginer comme une grenouille coincée dans son bocal, obligée de grimper chaque fois qu'il faisait beau.
Il en était à la onzième fois quand il vit que Percival se mettait tout nu. Il se figea au milieu de l'échelle, fasciné par le spectacle.