lundi 28 décembre 2015

Contes modernes - 192

Les semaines s'étaient transformées en mois. Albin évitait soigneusement les clients, préférant être vu par le moins de monde possible : si jamais il était reconnu par quelqu'un, que cela parvenait aux oreilles de Roy, alors à nouveau, il serait à sa merci.
Hélas, ce jour-là, le petit dernier ayant une très forte fièvre accompagnée de convulsions, Violette dut le conduire en ville en urgence et René demanda à Albin de servir en salle parce qu'il y avait beaucoup de monde.
Albin qui était plein de reconnaissance à l'égard des nains qui l'avait recueilli prit sur lui.
Il détesta cela, mais cela créa un précédent, si bien qu'à chaque fois le benjamin eut besoin d'être amené chez le pédiatre – hélas trop souvent  – Albin se retrouva en salle.
Les regards sur lui l'incommodaient, surtout celui des hommes adultes. Il se morigénait, tous n'étaient pas gays et susceptibles de lui sauter dessus. Personne ne savait ce que Roy lui avait fait, comment son corps réagissait à sa grande honte, combien il était en réalité sale et laid. Personne ne devait jamais l'apprendre.
Ce devait être la troisième fois qu'il faisait le service quand un homme châtain dans la trentaine le retint.
— Vous êtes nouveau ?
— Je suis en cuisine d'habitude, répondit Albin, se demandant si sa façon de faire le service laissait à désirer.
— Je suis content que vous en soyez sorti pour une fois, répondit l'homme avec chaleur.
Son intérêt visible pour sa personne gêna Albin qui se dépêcha de s'éloigner de la table et se débrouilla au plat suivant pour laisser le client à René.
Il le revit cependant la semaine suivante. Par manque de chance, c'était la pièce à côté de la sienne qui avait été attribuée à l'homme.
Tombé nez à nez avec lui en venant se coucher, Albin sentit que l'homme allait engager la conversation et s'engouffra en hâte dans sa chambre dont il claqua la porte avant de s'adosser au battant, son cœur tambourinant à un rythme effréné dans sa poitrine. Sa peur était absurde, car l'homme, même s'il l'avait regardé avec intensité, ne lui avait rien fait.

Du temps encore passa et Albin se prit à croire qu'il allait pouvoir demeurer là jusqu'à son dix-huitième anniversaire, âge de la majorité, moment où Roy n'aurait plus de prise sur lui. Il se mit même à espérer qu'il pourrait rester plus longtemps que cela, car même si ses cauchemars persistaient nuit après nuit, il aimait l'auberge et s'était pris d'affection pour les sept nains.

2 commentaires:

Jeckyll a dit…

Merci pour l'épisode du jour ^^ il est trop bien, pauvre Albin j'espère qu'il se délivrera de l'emprise de Roy et trouvera le bonheur, en attendant je me demande si ce client mystère n'est pas un détective privé engagé par Roy pour retrouver Albin...

Que de suspens mais j'aime beaucoup lol et les nains sont trop sympa de s'occuper d'Albin comme ça même s'ils ont chacun leur caractère ^^

Vivement la suite XD

Illyshbl a dit…

Théorie intéressante pour le client mystère ! :)