mardi 7 juillet 2015

Contes modernes - 83

— Je vais y aller à présent. Je te ferai parvenir le dossier une fois qu'il sera achevé. Merci pour tout.
— Pour tout, vraiment ? fit Angel en haussant un sourcil. C'est peut-être plutôt à moi de dire ça, ajouta-t-il.
Cain ne répliqua rien, embarrassé. Il se leva et ajusta son sac à dos sur ses épaules.
Angel le raccompagna au portail.
— Au revoir, murmura Cain.
Il s'était monté la tête en croyant qu'Angel allait le retenir. Il avait à présent presque mal au cœur à le laisser dans cette maison trop grande pour une seule personne.
— Reviens quand tu veux. Tu seras le bienvenu. Le mot de passe pour que je t'ouvre est « j'ai les plus beaux yeux verts de tout l'univers. »
Le compliment détourné presque dit sur le ton de la plaisanterie prit Cain au dépourvu.. Cette facette séductrice et légère venait se rajouter aux autres... Peut-être qu'autrefois, avant d'être transformé par le feu, l'ancien pompier avait été du genre charmeur.
— Merci.
Tandis qu'il se mettait au volant de sa voiture, Cain sentit qu'Angel ne le quittait pas des yeux.  Il démarra le moteur et commença à s'éloigner. Jetant malgré lui un coup d'œil dans le rétroviseur, il vit le portail se refermer. Il résista à l'envie absurde de faire demi-tour. Il ne s'était déjà que bien trop impliqué.
Même en ayant réussi à faire son interview, il était au final insatisfait et mal à l'aise et ce n'était pas seulement parce qu'il avait donné de sa personne, ayant une expérience sexuelle qu'il n'aurait jamais imaginée, mais parce qu'il n'était plus aussi certain que son dossier serait d'un quelconque réconfort pour les grands brûlés. Il ne changerait rien ni à leurs apparences ni aux regards des gens qu'ils devaient affronter et face auxquels ils étaient seuls, même si d'autres comme eux, souffraient quelque part du même problème. Son travail ne modifierait pas non plus la façon dont les gens voyaient les grands brûlés car seuls ses professeurs le liraient. Cependant, même s'il avait été publié dans un journal, cela aurait été pareil : être effrayé, avoir pitié, éprouver de la curiosité étaient des réactions normales. La différence interpellait qu'elle soit brûlures, mutisme ou même beauté exceptionnelle. Ce qui était impardonnable, c'était les moqueries, comme si avoir une peau sans défaut rendait supérieur.
De retour chez lui, Cain fut distrait au boulot comme à la maison au point que son père  finisse par le remarquer.
— Que t'arrive-t-il ? demanda-t-il un soir, une semaine après que Cain ait rencontré Angel auquel il ne pouvait s'empêcher de penser depuis.
Le jeune homme mentionna son interview avec l'ancien pompier qui vivait comme un reclus, sans entrer dans les détails.
Son frère aîné qui avait débarqué au cours de la conversation lança :
— C'est sympa de sa part de nous épargner une vision d'horreur.
Cain trouva cela parfaitement déplacé. Son père, lui, rit, ce qui le choqua. Comment pouvaient-ils se montrer si peu sensibles ?

2 commentaires:

Jeckyll a dit…

C'est un plaisir de te lire ^^

Commenter les épisodes à chaque fois n'a rien d'exceptionnel surtout quand on voit que je ne renouvelle pas beaucoup mon stock de commentaire car c'est toujours des "super, génial, merci" XD

Mais ce sont toujours ces mots là qui me viennent tellement j'adore ton univers et c'est ma façon de t'encourager à continuer ^__^

Illyshbl a dit…

Et ça marche, ça m'encourage ! Et je trouve tes commentaires plutôt variés puisque souvent aussi tu réagis à ce qui s'est passé dans l'épisode. :)