Orcéant - 69

Deux nuits plus tard, Byll se réveilla en sursaut en sursaut. Le ciel commençait à peine à s'éclaircir. Le malaise qui ne le quittait plus depuis leur discussion avec Jaro à l'auberge l'avait enfin déserté. Il s'étira avec bien-être et réalisa qu'il était enfin à nouveau lui-même. Il jeta un œil en direction de ses compagnons : oui, Rouge était à sa gauche et non plus à sa droite comme au moment du coucher et surtout le licornéen était allongé à quelques pas, sa longue tresse dorée dépassant de la couverture qui le recouvrait.
Après un instant d'hésitation et non sans quelques scrupules, Byll se leva, s'assit près Rouge, lui posa la main sur l'épaule et le secoua légèrement. Il avait trop envie de partager avec lui la joie d'avoir réintégré son corps.
Les paupières de Rouge s'ouvrirent toutes grandes sur des yeux dorés.
— C'est moi, Byll, lui souffla l'orcéant à l'oreille.
Rouge glissa la main à l'arrière de son crâne, rapprocha son visage du sien et posa ses lèvres contre les siennes. C'était doux et chaud. Sa langue s'insinua ensuite dans la bouche de l'orcéant, l'explorant.
Entre ses jambes, le sexe de Byll durcit pour la première fois. Il se souvint d'être resté inerte sous les doigts de Lyly qui l'avait caressé sur les ordres du garde devant tous les orcéants adultes du dortoir et s'écarta brusquement.
— Korel est à deux pas.
— Allons ailleurs...
— L'aube va bientôt pointer.
— J'ai repéré une grotte hier, non loin d'ici, déclara Rouge. Enfin, il n'y a pas d'obligation, ajouta-t-il.
Byll cessa de chercher des excuses. Ce moment où il avait failli devoir s'accoupler avec Lyly le glaçait encore et il était inquiet pour Pierrick et  Élissande au sujet du mouvement de la Liberté, mais le passé était derrière lui et l'avenir devant. Il avait envie que Rouge continue à l'embrasser et découvrir où cela les menait...
Ils marchèrent d'un pas vif jusqu'à un amas de rochers, puis ils durent se contorsionner pour se glisser dans une étroite faille. Cela rappela à Byll, toutes les fois où il s'était faufilé dans le tunnel qui le conduisait à l'antre de Rouge. Il y avait quelque chose de terriblement juste à ce que ce soit dans un lieu semblable qu'ils deviennent physiquement plus intimes qu'ils ne l'avaient jamais été.
L'orcéant ôta résolument son pagne. Rouge se débarrassa également ses habits. De nouvelles écailles rouges et luisantes étaient apparues sur sa peau. Ils s'étendirent sur lit de mousse. Allongés, leur différence de taille ne posait plus problème, car même en étant fort grand pour un humain, Rouge était nettement plus petit que l'orcéant.