vendredi 16 mars 2012

L'île du miroir - 3

Au cours de leur conversation peu conventionelle, Orangel apprit que Mitsu était employé dans une épicerie et qu'aujourd'hui, pour son jour de congé, il était venu faire des sculptures de sable au bord de la mer. De son côté, Orangel mentionna son travail de professeur de langues qu'il avait repris l'année dernière et expliqua qu'il rentrait chez lui après avoir donné un cours particulier à un élève en difficulté.
Le doigt de Mitsu avait cessé de le chatouiller durant l'échange se muant en quelque chose de doux et de délicieusement intime. Comme décidémment, Mitsu lui était sympathique et qu'il goûtait tout le charme qu'il y avait à bavarder avec quelqu'un dont le prénom signifiait lumière, il l'invita à boire un verre chez lui.
Le sourd-muet dessina un "oui" sans ambiguité dans sa paume. Orangel lui décrivit sa cabane en se basant sur ses souvenirs pour la couleur des murs et des volets et lui indiqua où elle se trouvait. Mitsu, gardant sa main dans la sienne, l'entraîna dans la bonne direction. D'habitude, Orangel n'aimait pas qu'on le guide. Sa fierté supportait mal qu'on le prenne par le bras pour le diriger. Mais là, c'était différent. Mitsu avait noué les doigts autour des siens et avançait d'un pas léger comme s'ils avaient été un couple d'amoureux en train de se promener. C'était une impression curieuse qu'Orangel ne réussit pas à chasser. Cela faisait trop longtemps que quelqu'un d'autre l'avait touché autrement que médicalement ou pour le guider.  Par ailleurs, comme Mitsu ne pouvait écrire en marchant, Orangel n'arrivait pas à penser à autre chose qu'à la chaleur et la ruguesse de la main qui entourait la sienne.
Le grincement familier de la barrière qui entourait son logis permit à Orangel de savoir qu'ils étaient arrivés à destination. Leurs chaussures claquèrent sur l'allée pavée. Orangel compta les pas et tendit sa main libre pour ouvrir la porte en bois de sa cabane. Il mit un moment avant de trouver la poignée et ne put qu'espérer que son invité ne s'impatientait pas. Enfin, ils furent à l'intérieur.
– Voilà mon chez moi, annonça Orangel sans être certain que Mitsu ait pu lire sur ses lèvres.
Depuis sa perte de vue, le nombre d'objets et de meubles avait été réduit au maximum. Elle devait sembler vide, chacune des quatre pièces ne contenant que le strict minimum. Orangel avait dû apprendre par coeur la place de chaque chose.
Comme il leur était impossible de discuter s'ils  ne se touchaient pas, Orangel proposa qu'ils se serrent dans l'un des deux larges fauteuils capitonnés du modeste salon qui encadraient une table basse rectangulaire au bois usé. Mitsu ne se donna pas la peine de tracer de réponse dans sa paume, et il fit asseoir Orangel à ses côtés.
"C'est joli", écrivit-il ensuite.
Orangel, perturbé par le contact du corps du sourd-muet collé tout contre le sien, ne répondit pas. Il avait envie de savoir à quoi son interlocuteur ressemblait.
– Cela te dérange si je passe la main sur ton visage ?
Le doigt de Mitsu resta un instant immobile avant de tracer : "C'est bon.Vas-y."

3 commentaires:

Jeckyll a dit…

Décidément cet histoire me plait de plus en plus^^

J'adore leurs façon de communiquer et même si le sujet du handicap a été traité et re-traité ton histoire a un plus qui fait que l'on ne tombe pas dans le déjà vu :D

£illou a dit…

Oh j'aime déjà ces personnages! xD Mitsu à l'air tout mignon! espérons qu'il va plaire à Orangelle! Et d'ailleurs où trouves-tu ces noms? xD C'est super original quand même! lol

Illyshbl a dit…

Orangel a failli s'appeler Orlando et en cherchant un prénom qui ressemblait, j'ai trouvé celui-là ! :)